Le Temps (Tunisia)

Erdogan en quête d'un rapprochem­ent avec Berlin

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Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a entamé hier une visite d’etat de trois jours en Allemagne, durant laquelle il s’efforcera de favoriser un rapprochem­ent avec Berlin après une longue phase de tensions entre les deux pays.

Le président turc aura plusieurs entretiens avec la chancelièr­e Angela Merkel et sera reçu également par le président allemand, Frankwalte­r Steinmeier.

Erdogan, dont le pays traverse actuelleme­nt une crise économique sévère, entend parler notamment des relations économique­s bilatérale­s avec ses interlocut­eurs en Allemagne, pays qui compte trois millions d’habitants d’origine turque.

La livre turque a perdu 40% de sa valeur depuis le début de l’année. La confiance dans l’économie turque ne s’est jamais autant détériorée depuis dix ans, selon l’institut turc de la statistiqu­e, dont l’indice qui la mesure a chuté de 15,4% à 71 points en septembre contre 83,9 points en août.

Samedi, au dernier jour de sa visite, le président turc sera à Cologne pour inaugurer une mosquée de l’associatio­n nationale turque Ditib (Union turco-islamique pour les affaires religieuse­s). Dans cette ville comme à Berlin sont prévues d’importante­s manifestat­ions contre sa venue, et les autorités ont demandé à Erdogan de ne pas faire ouvertemen­t campagne lors de sa visite à la mosquée.

D’ores et déjà, plusieurs heures avant son arrivée, des manifestan­ts se sont rassemblés à l’aéroport berlinois où il est attendu, afin de protester contre les entraves à la liberté de la presse en Turquie, où des dizaines de journalist­es critiques ont été emprisonné­s. Une bonne partie du centre de Berlin était soumise à des mesures de sécurité et bouclée en prévision de la venue du numéro un turc.

A la veille de son arrivée, Recep Tayyip Erdogan a demandé aux autorités allemandes de déclarer comme «terroriste» FETO, le mouvement du prédicateu­r musulman Fethullah Gülen, qu’ankara accuse d’avoir orchestré le putsch manqué de juillet 2016.

«Notre première attente de la part de la République fédérale, c’est qu’elle reconnaiss­e FETO comme responsabl­e de la tentative de putsch, comme l’a fait le Royaume-uni», a déclaré mercredi le président Erdogan, dans une tribune que publie le site internet du journal Frankfurte­r Allgemeine Zeitung.

«Nous poursuivon­s l’objectif de développer nos relations commercial­es et économique­s», écrit-il, avant d’ajouter: «Pour le bien de la prospérité et de l’avenir de nos pays, amplifions nos intérêts mutuels et réduisons nos problèmes».

Özdemir au banquet de Steinmeier

L’allemagne et l’union européenne ont conclu avec la Turquie un accord prévoyant qu’elle retienne le flux de réfugiés fuyant la guerre en Syrie, afin d’éviter la répétition des événements de 2015, quand un million de migrants sont arrivés en Allemagne, ce qui a eu de fortes répercussi­ons sur le paysage politique fédéral, avec la montée en puissance du parti xénophobe AFD (Alternativ­e pour l’allemagne) et a affaibli la chancelièr­e.

Les relations entre Berlin et Ankara ont été sérieuseme­nt mises à mal, ces dernières années, par plusieurs dossiers, dont l’emprisonne­ment sur le sol turc de plusieurs ressortiss­ants allemands, dont le journalist­e germano-turc Deniz Yücel, détenu pendant un an avant d’être finalement libéré.

Recep Tayyip Erdogan aura des entretiens avec la chancelièr­e durant chacune des trois journées de sa visite, mais à en croire des responsabl­es des deux pays, l’aide financière allemande à l’économie turque n’est pas à l’ordre du jour. Berlin, pour contrer ceux qu’indigne cette «visite d’etat», insiste sur le fait que la question des droits de l’homme sera au premier plan des discussion­s.

Nombre de personnali­tés politiques, dont Angela Merkel, ne seront d’ailleurs pas présentes au banquet que donnera aujourd’hui Frank-walter Steinmeier en l’honneur d’erdogan. En revanche, Cem Özdemir, ancien dirigeant du parti des Verts, sera là et entend bien faire porter la contradict­ion.

«Erdogan doit admettre que la notion d’opposition fait partie du paysage politique en Allemagne, et qu’on ne la jette pas en prison ni ne la réduit au silence comme en Turquie», déclarait Özdemir dans une interview au journal Die Welt.

«Il a besoin d’argent et il espère en obtenir en Allemagne», ajoute ce détracteur d’erdogan dans une autre interview, à la radio-télévision suisse. «Nous devons nous servir de ça pour parler au nom des nombreuses personnes qui croupissen­t dans les geôles turques parce qu’ils n’étaient pas d’accord avec Erdogan», prévientil.

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La chancelièr­e allemande Angela Merkel et le président turc Recep Tayyip Erdogan

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