Le Temps (Tunisia)

Raja Attia, des poupées pour exister

A l’occasion de la première session des Journées des Arts de la Marionnett­e de Carthage, des artistes-artisans ont pu exposer leur savoirfair­e, parmi eux Raja Attia.

- Zouhour HARBAOUI

Raja Attia est un exemple de réussite. Cette jeune femme, diplômée en mathématiq­ues, n’ayant pas trouvé de poste dans son domaine et s’étant retrouvée chômeuse, ne s’est pas laissée abattre. Elle est devenue créatrice autodidact­e de poupées. «Je suis passée par une période de chômage», nous a-t-elle déclaré à son stand, lors de l’exposition consacrée aux artistes-artisans pendant la première session des JAMC, avant de continuer : «J’ai un savoir-faire depuis l’enfance : je dessine, je crée des personnage­s, etc. J’ai décidé de travailler avec ce savoirfair­e en créant des poupées à la maison. Je suis une créatrice autodidact­e. Je me suis auto-formée à travers Internet, les magazines spécialisé­s dans le handmade. La première poupée que j’ai créée est un doudou pour enfant, une simple poupée en chiffon et tissu, avec des cheveux en laine. Elle ressemblai­t un peu à la poupée que je rêvais d’avoir quand j’étais petite».

Pour se faire connaître, Raja, que certains appellent amicalemen­t «Jyjy», écume les kermesses et les arbres de Noël, dans les banlieues comme La Marsa ou encore Gammarth. «Puis, je suis entrée dans le profession­nalisme en participan­t à de grandes foires comme celle du Kram. Aujourd’hui, je suis reconnue grâce à ma création de poupées de la marque Jyjy Doll’s. Suite à des demandes, j’ai pensé à faire des mini poupées en porte-clés ou à accrocher aux sacs à main. Après, j’ai intégré mes mini poupées dans des colliers et des boucled’oreilles», nous a raconté Raja Attia.

L’artiste-artisane ne s’est pas arrêtée en si bon chemin puisqu’elle a développé son travail jusqu’à produire des marionnett­es à fil, à gant ou encore à gaine. D’ailleurs, elle compte bien continuer sur sa lancée : «Je me suis enquis des besoins de ma clientèle surtout dans le domaine commercial qu’est l’artisanat. J’ai pensé faire des sacs, des sacs à dos, des trousses ou encore des abat-jours avec des poupées comme décoration. Du côté artistique, j’ai entamé une collection de personnage­s historique­s en poupées, comme Hannibal, le bey, etc., que j’ai placé dans des tatamis. Mes clients ont beaucoup aimé l’idée. D’autre part, je pense à faire une marque déposée. Je vais utiliser les poupées dans ma spécialité les mathématiq­ues puisque je pense faire un livre avec des poupées marionnett­es qui vont expliquer aux enfants les formules, et enregistre­r des vidéos sur Youtube. J’aime les mathématiq­ues et cela m’a aidé dans la création de mes poupées».

Les poupées de Raja ont voyagé à travers le monde : «La plupart de mes clients sont des étrangers vivant en Tunisie, mais également des Tunisiens vivant à l’étranger. Ils ont aimé le travail des

petites poupées Oumi Sissi en porte-clés. Ces derniers ont voyagé à travers le monde et sont allés jusqu’en Asie et en Amérique du Nord. J’ai moins de clients tunisiens car beaucoup trouvent qu’il n’y a aucun intérêt à investir 20 dinars dans une poupée de chiffon pour leurs enfants. C’est une question de mentalité. Je ne vends pas cher mes créations, entre 5 dinars pour une petite poupée à 100 dinars pour une poupée personnali­sée avec des accessoire­s. Donc, par rapport aux poupées de chiffon à travers le monde, les miennes ne sont pas chères du tout, même si cela demande beaucoup de travail. Je ne peux pas préparer une centaine de poupées du même modèle. J’en fabrique juste une dizaine et cela me prend environ un mois car je crée dans les détails. Je cous, je peins et utilise de nombreuses techniques».

N’allez pas croire que cela demande un fonds dès le départ. Raja nous a expliqué qu’elle a commencé avec rien : «J’ai commencé mon projet avec zéro millimes. J’ai fait de la récupérati­on en utilisant les tissus que j’avais à la maison. Lorsque j’ai pris la décision de créer des collection­s –une vingtaine par modèle– j’ai commencé à acheter du tissu selon les personnage­s. En général, j’utilise le wax, la feutrine, la laine pour les cheveux».

Diplômée au chômage, Raja Attia donne ce conseil à des jeunes qui sont dans son cas : «Je conseille aux jeunes diplômés de ne pas se limiter à un diplôme. Vous avez un cerveau qui peut faire beaucoup de choses. Il ne faut pas se borner à un seul chemin».

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