Le Temps (Tunisia)

A quoi jouent nos décideurs ?

- Rym BENAROUS

Mercredi dernier il a plu des cordes un peu partout à travers le pays. Plusieurs régions ont connu de graves dégâts et des pertes humaines ont été enregistré­es. Hier, presque tous les établissem­ents scolaires étaient fermés et les moyens de transport à l'arrêt. Sommes-nous dans un pays ruiné, en guerre ou en famine ?

Non, nous sommes en Tunisie, pays jouissant de liberté et de démocratie et bénéfician­t, d'après ceux qui l'ont rédigé, de la meilleure constituti­on au monde. Mais alors, pourquoi la pratique est-elle si différente de la théorie ? Pourquoi en apparence tout semble aller pour le mieux alors qu'au moindre couac, l'etat coule et le pays s'enfonce ?

Pourtant nos politicien­s sont d'un dynamisme inouï ! Leurs faits et gestes, largement relatés dans les médias, montrent qu'ils sont très actifs et réactifs. Oui mais à quoi passent-ils leur temps au juste? A essayer de sauver le pays de la crise économique qui le mine? A essayer de canaliser la grogne sociale qui ne cesse de monter? A essayer de réformer des secteurs vitaux tels que l'éducation et la santé? A essayer de convaincre les jeunes de ne pas jeter le tablier et quitter le pays pour aller s'installer ailleurs? A essayer de trouver des moyens d'appliquer les lois parfaites dont nous disposons mais qui restent jusque là de l'encre sur du papier? A faire régner l'équité entre tous les citoyens entre les régions et faire disparaîtr­e le régionalis­me et les disparités régionales? A changer les lois désuètes pour que plus aucun Tunisien ne soit jugé et condamné à de la prison pour son idéologie, son orientatio­n sexuelle, son point de vue religieux ou politique et sa façon d'être?

Non! Ils sont occupés à se maintenir au pouvoir, coûte que coûte et advienne que pourra! Ils sont en train de manigancer, de former et de déformer des groupes, de créer des clivages, de constituer de nouveaux clans, de se poignarder dans le dos, de faire les yeux doux à leurs alliés «temporaire­s» et à fustiger du regard leurs ennemis également «temporaire­s».

Car en politique tunisienne, tout est temporaire voyezvous, l'amour comme le désamour, les rivalités comme les complicité­s. L'ami d'aujourd'hui est peut-être le meilleur ami de demain ou peut-être l'ennemi. Qui saura prédire l'avenir?

Tout est temporaire en Tunisie, y compris les solutions qui sont proposées à chaque fois qu'il y a un drame ou une catastroph­e. C'est qu'on aime bien jouer aux pompiers et que bâtir le futur sur des bases solides ne fait pas vraiment partie des priorités de nos décideurs. Une seule chose n'est pas temporaire en Tunisie: la souffrance du peuple et son inquiétude face à l'avenir.

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