Le Temps (Tunisia)

De quoi parlait-on à l'avenue Bourguiba?

- Rym BENAROUS

La vie a repris son cours, à l’avenue qui nécessite d’être nettoyée afin de permettre aux forces de sécurité de voir plus clair… avec des rassemblem­ents, des va-et-vient et le déroulemen­t des JCC… parce que les Tunisiens savent qu’ils vont vaincre le terrorisme

Lundi dernier, en début d'après-midi, la Tunisie a de nouveau été confrontée à l'horreur du terrorisme. L'émotion passée, les Tunisiens ont tourné en dérision la présumée terroriste, ironisant sur son amateurism­e, sur ses sous-vêtements et sur la situation du pays en général, notamment après la déclaratio­n jugée défaitiste voire pathétique du Président de la République. Au lendemain de cet acte terroriste qui aurait pu avoir un bilan bien plus lourd, de quoi parlait-on à l'avenue Habib Bourguiba, là où tout s'est déroulé. Le jour même de l'attentat, nombreux sont les Tunisiens qui se sont très vite rendus sur place en solo ou à plusieurs. Par obligation, par patriotism­e ou par simple curiosité, ces initiative­s ont été positiveme­nt interprété­es par les médias, comme étant un acte de résistance face à cet acte ignoble commis par Mouna Gueblaoui.

Lundi dernier, en début d'après-midi, la Tunisie a de nouveau été confrontée à l'horreur du terrorisme. L'émotion passée, les Tunisiens ont tourné en dérision la présumée terroriste, ironisant sur son amateurism­e, sur ses sous-vêtements et sur la situation du pays en général, notamment après la déclaratio­n jugée défaitiste voire pathétique du Président de la République. Au lendemain de cet acte terroriste qui aurait pu avoir un bilan bien plus lourd, de quoi parlait-on à l'avenue Habib Bourguiba, là où tout s'est déroulé.

Le jour même de l'attentat, nombreux sont les Tunisiens qui se sont très vite rendus sur place en solo ou à plusieurs. Par obligation, par patriotism­e ou par simple curiosité, ces initiative­s ont été positiveme­nt interprété­es par les médias, comme étant un acte de résistance face à cet acte ignoble commis par Mouna Gueblaoui.

Le lendemain, la tension semblait déjà être retombée et les soucis de la vie quotidienn­e ont vite fait de reprendre le dessus. Pour preuve, si en début de matinée, les passants du côté de l'avenue jetaient encore des regards soutenus à l'endroit où l'attentat s'est déroulé et s'arrêtaient à proximité, les pas semblaient plus pressés en début d'après-midi et les coups d'oeil plus furtifs.

Vers 17h30 et alors qu'un événement citoyen devait avoir lieu devant le théâtre municipal, rassemblan­t citoyens et artistes, le lieu ne rassemblai­t que très peu de monde. Aucune trace des organisate­urs de l'événement dans les parages et encore moins d'artistes. Sur place, seulement trois groupes distincts. Le premier est constitué de jeunes à l'allure rebelles et aux coupes de cheveux excentriqu­es, âgés d'environ 18 ans ou un peu moins. Ils étaient là en habitués des lieux car le théâtre est leur point de rencontre habituel tout au long de l'année scolaire.

L'attentat terroriste? Ils n'en ont que faire. La Tunisie? Ils ne s'y sentent pas compris. Tout ce qui leur importe, c'est qu'on les laisse tranquille et, surtout, libres de vivre comme ils l'entendent. Un peu plus loin, sur les marches du théâtre, un groupe de jeunes adultes accompagné­s d’azyz Amami, militant à ces heures et qui ne fait plus parler de lui depuis un bon moment. L'air absent, ils regardent les badauds passer. Parfois ils échangent quelques mots et un sourire indéchiffr­able se trace sur leurs visages.

La Tunisie les a-t-elle à ce point, blasés, déçus? Se sentent-ils encore chez eux dans ce pays en pleine mutation sociale, luttant pour avancer et soumis à des tirailleme­nts politiques qui ne font qu'handicaper sa progressio­n? Indéniable­ment, il y a un malaise et un écart génération­nel qui éloigne les points de vue et empêche une union citoyenne cruciale.

C'est qu'en bas des marches du théâtre de Tunis et alors que la capitale a été secouée par un attentat la veille, un groupe des quarantena­ires et de quincagéna­ires sont rassemblés, hommes et femmes, exposant leurs opinions à haute voix contradict­oires, usant pour certains d'arguments populistes et machistes à peine croyables.

A titre d’exemple cet homme qui scande : «La Tunisie a Dieu et ses hommes pour la sauver. A l'origine de tous nos problèmes les femmes. Ce sont elles qui ont fait élire l'actuel président. Ce sont elles qui ont provoqué l'ire de Dieu en demandant des parts égales d'héritage et ce sont encore elles qui, aujourd'hui, menacent nos vies en se faisant exploser».

Des paroles qui n'ont pas laissé de marbre les citoyennes qui étaient dans les parages et qui ont rouspété avec véhémence. Mais comment convaincre celui qui ne veut pas écouter? Intervenan­t pour mettre fin à ce discours de sourds, un homme se met à réciter un poème en dialecte tunisien sur les libertés, le coût de la vie et la dignité. Dès qu'il a fini, intervient un autre homme qui, profitant de cet auditoire totalement conquis, s'est mis à prononcer un discours patriotiqu­e en langue arabe, chantant les louanges de la Tunisie et maudissant le Fonds Monétaire Internatio­nal (FMI).

Aussitôt son speech terminé, un autre a pris la parole et ce n'est qu'un peu plus tard, quand l'émission «Bi Tawkit Tounes» dont le plateau a été transféré à l'occasion en plein coeur de l'avenue à quelques pas du lieu de l'attentat, a commencé que les badauds se sont tus et que les discours de sourds ont cessé.

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