Carences de la loi et controverses
Secret professionnel
Le caractère sacré du secret professionnel est indiscutable et constitue l’un des piliers du procès équitable, en vertu duquel les droits de défense doivent être garantis sans aucune exception et quel que soient les faits commis.
Concernant l’avocat, la préservation du secret professionnel, constitue la base de de la déontologie et de l’éthique que ce défenseur de la veuve et de l’orphelin, s’est engagé à respecter au cours de sa prestation de serment devant la Cour. C’est engagement moral qui l’oblige à ne pas communiquer les secrets de son client, au cours et même après le mandat dont ce dernier l’a chargé.
Toutefois, et avec la recrudescence du terrorisme, la tendance législative mondiale, incite de plus en plus les avocats à dénoncer toute opération toute activité suspecte, financière ou terroriste soit-elle.
D’ailleurs le code pénal tunisien a prévu une exception au secret professionnel, dans le cas où l'avocat se trouve en possession de faux documents, il peut les dénoncer sans être poursuivi pour divulgation de secret professionnel.
Déjà dans la loi n°2003-0075 du 10 Décembre 2003 , il est prévu une peine de d'un an à cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de mille à cinq mille dinars quiconque, pour tout celui, même tenu au secret professionnel, qui n'aura pas signalé immédiatement aux autorités compétentes, les faits, informations ou renseignements relatifs aux infractions terroristes dont il a eu connaissance ». Cette disposition a été également consacré dans la nouvelle loi organique du 7 août 2015 , relative à la lutte contre le terrorisme et la répression du blanchiment d’argent.
Y-a-t-il violation du droit de la défense ?
D’aucuns voient en cette disposition une destruction de la relation de confiance entre le client et son avocat, d'autres estiment qu’il y a une nécessité de se conformer à l'effort mondial de lutte contre le terrorisme et le financement d'activités inhabituelles, l’intérêt général primant sur tout autre intérêt.
En contrepartie, l’avocat est en droit de prendre connaissances de tous les éléments du dossier concernant son client, et ne pas se heurter au refus de la part de communication de certains, sous le prétexte du secret de l’instruction par exemple. Sans parler de certaines affaires dans lesquelles des documents essentiels ont été miraculeusement volatilisés, tels ceux relatifs à l’affaire d’assassinats de Chokri Belaid et Mohamed Brahmi.
Par ailleurs outre les mesures dans ce sens, de la loi sur la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent, il est prévu dans le projet de loi de Finances 2019, dans son article 34, des mesures de levée du secret professionnel en cas de suspicion de blanchiment d’argent.
C’est la raison pour laquelle l’association tunisienne des spécialistes en comptabilité (ATSC) refusant catégoriquement ” toute atteinte au secret professionnel ” du comptable et du reste des métiers a précisé, dans un récent communiqué , que la mesure du levée du secret professionnel, prévue dans l’article 34 du projet de la loi de finances 2019, aura des répercussions négatives sur les corporations concernées, ainsi que sur la relation entre les professionnels et leurs clients.
Concernant la loi sur la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent, le ministre de la Justice partant, Ghazi Jeribi, avait indiqué lors de son audition par le Parlement, qu’il y avait des nouvelles propositions amendant et complétant la loi sur la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent de 2015, notamment concernant les manquements constatés lors de son application. Ces manquements concernent entre autres la composition de la commission nationale de lutte contre le terrorisme, chargée entre autres de suivre et évaluer l’exécution des résolution des instances spécialisées de Nations Unies en rapport avec la lutte contre le terrorisme, et proposer à la lumière de ces éléments les mesures nécessaires à prendre concernant les organisations ou les personnes en relation avec les infractions prévues par ladite loi.
Or ces amendements apportés au projet de loi organique ont pour effet d’obéir aux recommandations du Groupe d’action Financière (GAFI ) selon Ghazi jeribi, lors cette même audition devant l’assemblée des représentants du peuple.
Parmi les amendements figurent ceux qui viennent à l’encontre de l’obligation du respect du secret professionnel.
C’est ce que Le bâtonnier, Ameur Mahrezi adéclaré devant les députés et le président de L’ARP en l’informant du refus des avocats des amendements apportés au projet de loi de lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent, précisant que ces amendements vont à l’encontre de l’obligation du secret professionnel qui lie les avocats au cours de leurs missions.
En réalité , le principe du respect du secret professionnel est intangible, et il reste tributaire de la seule appréciation du juge selon les éléments du dossier qu’il lui est demandé d’examiner, en vertu de la loi et de son intime conviction