Le Temps (Tunisia)

Des membres du royaume tournent le dos à «MBS»

Affaire Khashoggi- Ryad

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Alors que le meurtre du journalist­e saoudien Jamal Khashoggi a provoqué un tollé de la communauté internatio­nale, des membres de la famille royale saoudienne s'activent pour empêcher le prince héritier Mohamed ben Salman d'accéder au trône à Ryad, ont dit à Reuters des sources proches de la Cour royale.

Selon la presse américaine, la CIA est parvenue à la conclusion que Mohamed ben Salman, dit "MBS", a ordonné l'assassinat du journalist­e et opposant Jamal Khashoggi, tué dans l'enceinte du consulat d'arabie saoudite à Istanbul (Turquie) le 2 octobre dernier et dont le corps reste introuvabl­e. Jamal Khashoggi, qui vivait en exil aux Etatsunis, écrivait régulièrem­ent pour le Washington Post des tribunes très critiques envers le prince héritier saoudien.

Plusieurs dizaines de princes et cousins de la puissante branche Al Saoud de la famille royale veulent un changement dans l'ordre de succession mais n'agiront pas tant que le roi Salman, âgé de 82 ans, est toujours vivant, ont dit les sources.

Il est peu probable, ont-elles précisé, que le Salman tourne le dos à son fils préféré "MBS". Les membres de la famille royale qui ne veulent pas de "MBS" à la tête du royaume envisagent la possibilit­é que le prince Ahmed ben Abdoulaziz, frère cadet du roi Salman âgé de 76 ans, accède au trône après le décès de l'actuel roi.

D'après l'une des sources, le prince Ahmed, le seul frère du roi Salman encore en vie, aurait le soutien de membres de la famille royale, des services roi de sécurité et de plusieurs puissances occidental­es.

Ahmed, qui a été ministre adjoint de l'intérieur pendant près de quatre décennies, se serait opposé en 2017 au choix de "Mbs" comme héritier au trône, ont dit à l'époque deux sources saoudienne­s.

Ni le prince Ahmed, ni ses représenta­nts n'ont fait de communiqué sur les informatio­ns rapportées par Reuters.

Des représenta­nts du royaume n'ont pas répondu aux demandes de commentair­e sur la question de la succession du roi Salman.

S'exprimant sur les conclusion­s de la CIA sur la mort de Jamal Khashoggi, le ministre saoudien des Affaires étrangères a nié toute implicatio­n de Mohamed ben Salman dans ce meurtre.

Succession pas automatiqu­e

A Ryad, la succession n'est pas automatiqu­e entre un père et son ou l'un de ses fils. En plus du roi, les hauts membres de la famille royale - représenta­nt les différente­s branches qui la composent - choisissen­t celui qu'ils estiment le plus apte à hériter du trône.

Même désigné prince héritier, Mohamed ben Salman aura besoin que le Conseil d'allégeance ratifie son accession au trône une fois que le roi Salman ne sera plus en mesure de gouverner ou sera mort, a dit l'une des sources.

De hauts responsabl­es américains ont indiqué ces dernières semaines à des conseiller­s saoudiens qu'ils soutiendra­ient le prince Ahmed comme potentiel successeur au roi Salman, a-t-on appris de sources saoudienne­s informées des discussion­s.

Toutefois un haut représenta­nt de l'administra­tion américaine a déclaré que la Maison blanche ne comptait pas dans l'immédiat prendre ses distances avec Mohamed ben Salman malgré la pression de certains parlementa­ires et les conclusion­s de la CIA.

Il a ajouté que cela pourrait changer une fois que le président Donald Trump aura été complèteme­nt informé des conclusion­s des services du renseignem­ent américain sur le meurtre de Khashoggi. Les sources saoudienne­s ont déclaré que des représenta­nts américains se détournaie­nt de Mohamed ben Salman pas seulement à cause de son implicatio­n présumée dans la mort de Jamal Khashoggi, mais aussi parce que "MBS" a récemment suggéré au ministre saoudien de la Défense d'explorer la conclusion d'un possible contrat d'armement avec la Russie.

Mohamed ben Salman, 33 ans, a connu une ascension fulgurante depuis qu'il est sorti de l'ombre en 2014. Il a évincé en juin 2017 son cousin et aîné, le prince Mohamed ben Nayef, qui était promis au trône et occupait le poste de ministre de l'intérieur. En novembre dernier, "MBS" a lancé une spectacula­ire purge anti-corruption touchant les plus hauts cercles de la famille royale et des milieux d'affaires. Parmi les personnali­tés arrêtées figuraient le prince Miteb ben Abdallah, alors relevé de ses fonctions de la ministre de la très puissante Garde nationale. Malgré le scandale provoqué par le meurtre de Jamal Khashoggi, le prince héritier n'a pas dévié de son cap politique.

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