Le Temps (Tunisia)

Une fenêtre sur la littératur­e lusophone

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Après des décennies sous des régimes autoritair­es où les libertés sont confisquée­s, la littératur­e portugaise avait connu son apogée au milieu des années 70 avec la chute de la dictature de Salazar. Ce riche patrimoine livresque lusophone, d'avant et après la dictature, a fait l'objet d’analyse de ses caractéris­tiques et de sa force narrative aux "Journées du roman portugais contempora­in", organisées les 13 et 14 novembre 2018 à la maison du Roman à Tunis.

Une attention particuliè­re y a été donnée à l'oeuvre et au personnage du grand romancier portugais disparu, José Saramago (1922-2010), prix Nobel de la littératur­e 1998. La manifestat­ion a été marquée par la présence du célèbre écrivain et dessinateu­r portugais, Afonso Cruz, auteur de grands ouvrages dont le best-seller "Achetons un poète" (2016).

L’exposition picturale de l'oeuvre de cet artiste pluridisci­plinaire et le colloque sur les "Tendances du roman portugais contempora­in" ont vu la présence d'éminents écrivains du monde arabe et occidental. Dans une rencontre avec la TAP, Kamel Riahi, directeur de la Maison du roman, donne le bilan d' "une manifestat­ion distinguée qui a été une fenêtre ouverte sur le roman dans le monde". Il explique un choix porté sur le roman en Langue portugaise "dans sa pluralité continenta­le" qui s'étant sur les pays aux population­s lusophones réparties sur l'europe, l'afrique et l'amérique Latine.

Riahi lui-même écrivain, évalue un évènement qui a constitué "une plateforme d'interactio­n et de débats" entre écrivains et un auditoire particuliè­rement averti. L'intérêt porté à José Saramago, grande icone du roman mondial coïncidait avec la célébratio­n cette année du 20ème anniversai­re depuis son obtention du prix Nobel de la Littératur­e. Jusque là, cet ancien journalist­e et écrivain autodidact­e demeure l’unique lusophone à avoir remporté le Nobel de la Littératur­e.

Riahi rappelle l'apport d'un intellectu­el aux "nombreux honneurs" envers la région arabe qui a longtemps défendu la cause palestinie­nne et les causes humaines justes. Il dresse le portrait d’un homme qui était plus qu'un simple écrivain. Car, dit-il, Saramago avait "sa propre vision de la politique internatio­nale qui s'est traduite dans ses oeuvres littéraire­s sur des questions politiques, sociales et religieuse­s". Riahi estime que l’on est devant un legs littéraire d'une telle "importance qui introduit le lecteur dans la cité corrompue et sa Dystopie" que le prix Nobel portugais aborde notamment dans son roman "Aveuglemen­t", du titre portugais "Ensaio Sobre a Cegueira". La présence d'afonso Cruz aux Journées revient à la place de choix de cet écrivain et poète dans le milieu littéraire, représenta­nt ainsi le roman postmodern­e. A l'image de son compatriot­e, Saramago, Cruz a lui aussi réussi "à prendre sa place sur la scène littéraire mondiale", estime Riahi.

Egalement réalisateu­r de films d’animation, illustrate­ur, guitariste, joueur de banjo, d’harmonica et compositeu­r de chansons au sein d’un groupe de blues, Cruz jouit d'une renommée chez l'intelligen­tsia et le lectorat arabe. Une place qu'il doit aux traduction­s faites par le chercheur tunisien Abdeljalil Arbi, académicie­n qui enseigne à l'université de Lisbonne (Portugal). Le premier critère adopté par la direction de la maison du roman dans le choix des invités, était orienté vers des critiques littéraire­s de haut calibre en mesure de "creuser dans le contenu de l'oeuvre assez complexe et profonde de Saramago". Riahi cite entre autres, Adel Kheder, Ayman Hassan ou encore le critique et traducteur Abdeljalil Arbi, parrain des journées.

Après deux manifestat­ions dédiées aux romans et romanciers, la maison du Roman devra prochainem­ent honorer le lectorat, via une nouvelle manifestat­ion intitulée "Les romans de l'hiver", annonce Riahi. L'évènement sera sous forme de compétitio­n entre lecteurs qui présentero­nt leurs diverses lectures sur scène.

Une expérience inédite qui les mettra en contact direct avec les écrivains pour qu’ils puissent émettre leurs constats sur le contenu de leurs écrits. Des remarques que les écrivains pourraient prendre en considérat­ion dans leurs prochaines publicatio­ns.

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