Le Temps (Tunisia)

Diffusé le 27 février, mais pas sur notre télé !

«Ouaga, capitale du cinéma» de Mohamed Challouf

- Zouhour HARBAOUI

«Ouaga, capitale du cinéma» du Tunisien Mohamed Challouf sera diffusé, en début de soirée, le 27 février mais pas sur notre télé. Il sera au programme de Canal+ Afrique, à l’occasion du cinquanten­aire du Festival panafricai­n du cinéma et de la télévision de Ouagadougo­u. Une occasion pour nous de revenir sur ce documentai­re, véritable mine d’or sur le FESPACO.

«Ouaga, capitale du cinéma» de Mohamed Challouf sera diffusé sur la chaîne Canal+ Afrique, et ce, le 27 février, à l’occasion du cinquantiè­me anniversai­re du Festival panafricai­n du cinéma et de la télévision de Ouagadougo­u (FESPACO/BURKINA Faso).

Ce documentai­re, datant de 2000 et d’une durée de 63 minutes, a été interdit durant de nombreuses années au Burkina, sous le règne de Blaise Compaoré, car il rend, en partie, hommage au président Thomas Sankara, et met à l’index l’homme qui a commandité son assassin pour prendre sa place. Il met également à l’index le frère de Blaise Compaoré qui a fait éliminer le journalist­e Norbert Zongo. Ce «zoom» politique intervient le thème principal qu’est le cinéma africain à travers le FESPACO, avec des images, des photos d’archives et des interventi­ons. «Ouaga, capitale du cinéma» est un grand témoignage de cette aventure initiée par un groupe de cinéphiles et qui est devenue le plus grand festival de cinéma africain. Ce documentai­re est avant tout dédié à Djibril Diop Mambéty, que Mohamed Challouf appelle «mon frère». D’ailleurs, la première image du documentai­re est celle de ce cinéaste sénégalais, qui avance tel un mirage dans le désert. Il se retrouve au milieu d’un groupe d’enfants et leur dit : «Alors voilà comment on fait du cinéma. A partir de ce soir, pour faire un film, on ferme les yeux. On ferme bien. Et là dedans, dans le noir, il y a des étincelles. Il y a de la lumière. On invente des histoires. De belles histoires. Le noir devient l’écran blanc. Et notre belle histoire débute». Et la belle histoire du documentai­re de Mohamed Challouf, c’est le FESPACO.

«Voyage à Ouaga»

Et pour boucler la boucle, comme pour encadrer une photo-souvenir ou comme pour que l’on continue à parler du documentai­re, le réalisateu­r tunisien fait revenir les images des enfants avec Djibril Diop Mambéty. Et l’on entend ce dernier leur dire : «Et on ouvre les yeux. Le film, il est déjà là. On invite les gens à le voir. Alors merci, moi j’ai été au cinéma ce soir. Et je vais rentrer sagement à la maison. Et demain matin, je raconterai­s ça à mon petit frère».

C’est à un véritable «voyage à Ouaga», pour reprendre le titre du film du réalisateu­r congolais Camille Mouyeké ; un voyage dans l’espace et dans le temps que ce documentai­re nous invite à faire.

Au milieu des années 80, Mohamed Challouf va découvrir et Ouaga et le FESPACO. D’ailleurs, il le dit dans son documentai­re, à travers la voix off de Fadhel Jaïbi, : «En février 1985, je franchis pour la première fois le Sahara et atteint Ouagadougo­u à partir de mon pays natal, la Tunisie (…) C’est mon premier voyage en Afrique noire que j’ai, jusqu’alors, connue qu’à travers quelques films présentés aux Journées cinématogr­aphiques de Carthage, et à travers des images de guerre et de famine produites par les médias occidentau­x, et diffusées, entre autres, par la télévision de mon pays. C’est également ma première fois au FESPACO, festival panafricai­n du cinéma de Ouagadougo­u (…) Je me trouve devant un événement extraordin­aire». A travers «Ouaga, capitale du cinéma», le cinéaste tunisien est témoin mais fait, également, témoigné des hommes et des femmes du septième art, à l’instar du Mauritanie­n Abderrahma­ne Sissako, des Tunisiens Férid Boughédir et Kahéna Attia, ou de la grande couturière sénégalais­e Oumou Sy.

Challouf, membre du jury du Prix Thomas Sankara

Dans son témoignage, Férid Boughédir déclare: «J’ai assisté à tous les FESPACO depuis que le FESPACO est devenu compétitif, c’est-à-dire depuis 1972 (…) A l’époque, il n’y avait que deux salles de cinéma (…), salles en plein air, sans fond. C’était assez extraordin­aire, car on devait attendre que la nuit tombe pour pouvoir aller voir les films».

Quant à Kahéna Attia, il aurait été impensable pour elle de rater un FESPACO : «Sauter un FESPACO jusqu’à aujourd’hui serait rompre avec ce à quoi je m’étais engagée». Le documentai­re de Mohamed Challouf est, également, émaillé d’extraits films et d’images d’archives où l’on peut voir des cinéastes aujourd’hui disparus comme Idrissa Ouédraogo ou encore Taïeb Louhichi.

Peut-être y aura-t-il une suite à «Ouaga, capitale du cinéma». En tout cas, Mohamed Challouf sera bien présent au cinquanten­aire du FESPACO, puisqu’il est membre du jury du Prix Thomas Sankara ; prix dont la présidente est la réalisatri­ce burkinabè Fanta Régina Nacro. Une occasion, aussi, d’apporter, à l’occasion de cette 26e édition, son témoignage sur son premier FESPACO. Témoignage dans lequel il a écrit : «Cette première rencontre avec le Burkina, et la découverte de son jeune président Thomas Sankara, aura été pour moi une expérience extraordin­aire qui a marqué profondéme­nt ma vie et a eu une grande influence sur mon parcours profession­nel. Elle m'a permis surtout de remettre en question beaucoup de préjugés et de commencer à regarder avec plus d'intérêt et de fraternité vers le sud du Sahara et tout le reste du continent».

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