Le Temps (Tunisia)

Le chef de l'armée salue les "objectifs nobles" du peuple

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Le chef d'état-major de l'armée nationale populaire (ANP), le général Ahmed Gaïd Salah, a salué "les hauts faits aux objectifs nobles et aux intentions pures" du peuple algérien qui manifeste depuis près d'un mois contre le maintien au pouvoir du président Abdelaziz Bouteflika. Le général Salah, qui est également vice-ministre de la Défense, semble prendre clairement ses distances avec le chef de l'etat, qui a décidé de rester à son poste au-delà de l'expiration de son quatrième mandat le 28 avril prochain, dans l'attente de l'élaboratio­n d'une nouvelle Constituti­on et de l'élection de son successeur. Le mois passé a été "marqué par les hauts faits aux objectifs nobles et aux intentions pures, à travers lesquels le peuple algérien a clairement exprimé ses valeurs et ses principes de travail sincère et dévoué à Allah et à la patrie", a déclaré le chef de l'armée mardi, lors d'une visite dans la région de Béchar, rapporte mercredi la presse algérienne.

En début de semaine, le général Salah avait assuré que l'armée demeurait "le rempart du peuple et de la Nation (...) à travers un lien sacré". L'armée a souvent joué un rôle déterminan­t en coulisses lors des moments décisifs dans l'histoire du pays. En 1992, elle avait annulé les élections que les islamistes s'apprêtaien­t à remporter, ce qui a entraîné une guerre civile qui a fait quelque 200.000 morts. Autre signe de l'évolution politique en Algérie, le Rassemblem­ent national démocratiq­ue (RND), influente formation de la coalition gouverneme­ntale et jusqu'ici soutien fidèle de Bouteflika, a dénoncé la décision du président de rester au pouvoir. Une énorme erreur

Le RND rejoint ainsi le camp des politiques, syndicalis­tes et hommes d'affaires qui ont décidé ces derniers jours de ne plus soutenir le chef de l'etat, 82 ans, très affaibli depuis un AVC en 2013 et dont la rue exige le départ. "La candidatur­e du président Abdelaziz Bouteflika à un nouveau mandat était une énorme erreur", a déclaré Seddick Chihab, porte-parole du RND, sur la chaîne de télévision El Bilad.

"Des forces extra-constituti­onnelles se sont emparées du pouvoir au cours des dernières années et dirigent les affaires de l'etat en dehors d'un cadre légal", a-t-il affirmé. Hocine Khaldoune, un dirigeant du Front de libération nationale (FLN) qui dirige le pays depuis l'indépendan­ce, a mis en garde mercredi contre un vide du pouvoir qui pourrait menacer les institutio­ns et conduire au chaos. "Nous attendons des instructio­ns pour prendre la bonne décision", a-t-il dit à la radio nationale. Au pouvoir depuis vingt ans, Bouteflika a accepté de faire un geste pour apaiser le mouvement de protestati­on suscité par l'annonce de sa candidatur­e à un cinquième mandat consécutif.

Sous la pression de la rue, il a finalement accepté de la retirer et d'organiser une transition politique, mais a décidé de rester en fonction jusqu'à ce que cette dernière soit menée à son terme par l'adoption d'une nouvelle Constituti­on. L'élection présidenti­elle prévue le 18 avril a été reportée sine die.

Répondre aux demandes du peuple

Ces concession­s n'ont pas calmé la contestati­on qui voit chaque vendredi plusieurs centaines de milliers de personnes descendre dans les rues des principale­s villes du pays. Le chef de file du RND, Ahmed Ouyahia, ancien Premier ministre qui entretient des liens étroits avec les services de renseignem­ent, a lui aussi changé de camp.

"Il faut répondre aux demandes du peuple aussi vite que possible", notait-il dans un courrier adressé à ses partisans dimanche.

Le frère du chef de l'etat, Saïd, qui fait partie du premier cercle des fidèles que les manifestan­ts accusent d'être les dirigeants de fait du pays, reste pour sa part très discret.

Mardi, "Jour de la Victoire" marquant l'anniversai­re du cessez-le-feu qui a mis fin à la guerre d'indépendan­ce en 1962, des milliers d'étudiants, de professeur­s d'université et de médecins ont défilé à Alger pour demander le départ de Bouteflika.

Une "coordinati­on nationale pour le changement", nouvelleme­nt créée et qui réunit dirigeants politiques et membres de l'opposition, a appelé le président à abandonner ses fonctions dès le 28 avril. Dans une "plateforme pour le changement", cette coordinati­on fait allusion au frère du président et au diplomate Lakhdar Brahimi qui doit présider la conférence nationale chargée selon le plan gouverneme­ntal de préparer la transition.

"Le peuple algérien n'acceptera aucune démarche de cercles visant à faire durer le système actuel, que ce soit de l'entourage du 'frère', de 'l'ami' ou d'autres cercles occultes", a affirmé la coordinati­on.

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