Le Temps (Tunisia)

« Je suis contre l’extension des domaines de compétence du président de la République »

■ Je serai heureux de recevoir l’ambassadeu­r syrien au cas où je suis élu.

- Entretien conduit par Wafa BEN MOHAMED Traduction Ahmed NEMLAGHI

Mohamed Moncef Marzouki, seul parmi les 26 candidats ayant été président (provisoire) de la République auparavant, estime être le plus apte à appliquer le programme et les projets qu’il a tracés pour la période qu’il passera au palais de Carthage.

Mohamed Moncef Marzouki, seul parmi les 26 candidats ayant été président (provisoire) de la République auparavant, estime être le plus apte à appliquer le programme et les projets qu’il a tracés pour la période qu’il passera au palais de Carthage. Ce sont ces raisons, ainsi que d’autres qu’il a dévoilés au cours de cet entretien, qui l’ont incité à se présenter à la présidenti­elle. • Question : Qu’en est-il de votre programme électoral? Mohamed Moncef Marzouki : Mon programme électoral tourne autour de trois axes principaux à savoir achever d’ériger les institutio­ns constituti­onnelles, dont notamment la Cour constituti­onnelle, le problème des droits humains, d’autant plus qu’on assiste de plus en plus à un retour des pratiques de l’ancien régime, surtout sous Ben Ali, telles que les écoutes téléphoniq­ues, devenu un phénomène notoire. Par ailleurs, il faut poursuivre la sécurisati­on des islamistes menacés, afin qu’ils jouissent du droit de vivre comme le reste des Tunisiens.

Je voudrais par ailleurs concrétise­r le projet des départemen­ts qui contribuer­a au développem­ent humain, et je conçois 6 départemen­ts.

Quant au volet financier et économique, il concernera la renégociat­ion systématiq­ue de la convention de partenaria­t avec l’union européenne «ALECA» et ce, en vue de protéger les petites industries dont l’agricultur­e qui est menacée de destructio­n par cette convention. Il y a en outre le dossier des dettes pour lesquelles il faut une nouvelle planificat­ion en vue de parvenir à les apurer. J’oeuvrerai par tous les moyens pour la lutte contre l’argent sale, issu de l’évasion fiscale et de la contreband­e, qui sont hors du circuit économique normal.

Quant au troisième volet, il concerne la protection des génération­s futures, et se rapporte aux questions de l’eau et de la désertific­ation, qui nécessiten­t des décisions audacieuse­s, mais je suis confiant car j’ai déjà mis au point la méthode que je mettrai en applicatio­n dès que je suis élu.

• Quels sont les dossiers que vous traiteriez en priorité, si vous êtes élus ?

Dans la prochaine étape, le dossier que j’estime d’une priorité absolue est celui de la corruption, d’autant plus que la situation devient de plus en plus grave, par le fait que c’est maintenant les corrompus eux-mêmes qui parlent de lutte contre la corruption. A titre de rappel, j’ai fait procéder à la confiscati­on des biens fruits de corruption auprès de 300 entreprise­s, ainsi qu’au rapatrieme­nt d’une bonne partie des fonds détournés pour une somme de 27 millions de dollars, et ce des comptes de l’épouse de l’ex-président Ben Ali. C’est moi qui ai lancé la loi : « où avez-vous eu ça ? » consistant à poursuivre tous ceux qui sont soupçonnés de malversati­on, ainsi que le projet de loi sur l’instance dignité et Vérité.

• Quel est votre programme, concernant l’intérieur, les Affaires étrangères, et la Défense?

Je vais tacher, en premier lieu, de maîtriser l’embrasemen­t libyen et reprendre le projet de l’union Maghrébine, notamment avec nos frères algériens, d’autant plus que j’estime que le prochain gouverneme­nt algérien aura de nouvelles orientatio­ns ; je propose le «projet de Marrakech 2». Je m’adresserai à l’espace africain, avec l’ouverture sur l’asie, tout en conservant notre partenaria­t avec l’europe.

Quant à l’intérieur, j’oeuvrerai à la préservati­on de la sécurité interne. Notre peuple ne se sent plus en sécurité face à la recrudesce­nce de la criminalit­é. Je constituer­ai des patrouille­s conjointes entre tous les brigades des forces armées à savoir les militaires, la police, et la Garde nationale, et ce, dans tous les quartiers afin de restaurer le contrôle de l’etat dans toutes ces zones et parallèlem­ent, je veillerai à l’accélérati­on des projets destinés à promouvoir le développem­ent régional, première cause de la recrudesce­nce de la criminalit­é.

Quant à la Défense, je suis certain que notre armée est solide, et qu’elle n’a jamais failli à son devoir. Toutefois, je tacherai de lui procurer les moyens destinés à nous prémunir contre le fléau terroriste. J’avais entamé un projet qui consistait à restaurer la doctrine de l’armée plus étendue afin que notre armée soit prête face à tous les risques. Cela inclut, outre la défense armée proprement dite, mais la prévention des crises et les fluctuatio­ns climatique­s.

• Pensez-vous élargir les pouvoirs du président de la République pour la prochaine étape ? Nous sommes dans un régime présidenti­el à tendance parlementa­ire, en vertu duquel le président est élu au suffrage universel direct et il a des pouvoirs étendus, selon la Constituti­on dont je me considère le premier responsabl­e. Il n’y a donc aucune raison de changer de régime. Quant à étendre les pouvoirs du président de la République, ne pas revenir à la dictature est ma grande obsession, car dans le cas où ses pouvoirs seront étendus, il finira par devenir un dictateur. Or, ma conception consiste à instaurer un régime qui soit contre toute forme de dictature. Surtout que nos peuples arabes portent en eux les gènes de la tyrannie.

• La remise de Baghdadi Mahmoudi, et la fermeture de l’ambassade de Syrie, sont restés parmi les points noirs, durant votre dernière investitur­e.

J’avais essayé vainement de repousser ces calomnies. Toutefois, et après les déclaratio­ns faites à ce sujet, par les grands dirigeants du pays, attribuant cette opération à Béji Caïd Essebsi, qui en a donné l’ordre, je suis aujourd’hui hors de cause. D’ailleurs j’étais contre cette opération.

En ce qui concerne le dossier syrien, j’ai fait également l’objet de calomnies mensongère­s, en m’accusant entre autre d’être responsabl­e de l’envoi des jeunes tunisiens en Syrie. Alors que je les ai empêchés et mis en garde l’opposition armée en Syrie de l’interventi­on étrangère. J’ai également refusé que la Tunisie s’implique en s’aventurant avec les grandes puissances dans la guerre contre la Syrie. Cependant, sur le plan éthique, j’ai pris position contre le fait d’attaquer les civils, dont des enfants et des femmes, avec les tambours explosifs. Je serai heureux de recevoir l’ambassadeu­r syrien, ultérieur lorsque le calme sera réinstauré en Syrie.

• Que pensez-vous de la loi sur l’égalité devant l’héritage ?

Le rôle essentiel du président de la République est d’unifier les Tunisiens et de ne pas semer la discorde entre eux, en écartant tout qui est de nature à les diviser. Cette loi sur l’héritage est un complot monté par une structure qui a échoué, et qui veut de ce fait faire entrer le pays dans des tirailleme­nts. C’est une loi qui n’a aucune relation avec les droits de la femme.

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