La «sécurité globale» supplante la «sécurité nationale»
Après avoir suivi attentivement les deux premières séances des débats électoraux télévisés, nous pouvons dire sans grand risque, que les élections elles-mêmes sont en train de faire bouger bien des lignes présentées depuis 2011 comme étant immuables, parce qu’émanant de l’idéologie fondatrice de l’establishment ayant succédé à celle de la nomenklatura aux commandes depuis l’indépendance.
Le concept clé de la Constitution, la Sécurité Nationale, a révélé les limites de l’interprétation qui en a été donnée par les vainqueurs-parvenus des élections de 2011. Le maitre mot de la Constitution qu’ils avaient concoctée était « la division des pouvoirs » au lieu de leur répartition.
Après avoir suivi attentivement les deux premières séances des débats électoraux télévisés, nous pouvons dire sans grand risque, que les élections elles-mêmes sont en train de faire bouger bien des lignes présentées depuis 2011 comme étant immuables, parce qu’émanant de l’idéologie fondatrice de l’establishment ayant succédé à celle de la nomenklatura aux commandes depuis l’indépendance.
Le concept clé de la Constitution, la Sécurité Nationale, a révélé les limites de l’interprétation qui en a été donnée par les vainqueurs-parvenus des élections de 2011. Le maitre mot de la Constitution qu’ils avaient concoctée était « la division des pouvoirs » au lieu de leur répartition. Dans un manichéisme médiéval, l’etat s’est trouvé « réorganisé » sur une série de ruptures violentes entre les différents pouvoirs, devenus insulaires chacun, mais entre les composantes d’un même pouvoir. C’est le cas de la rupture au sein de l’exécutif, entre le Président de la République et le chef du gouvernement. En vertu de cette rupture tout à fait factice, les notions cardinales fondant l’etat s’en sont trouvées réparties entre des centres de pouvoir dont le plus faible leur semblait être la présidence de la république. Dont, justement la «Sécurité Nationale».
Une dichotomie paralysante
Les débats ont fait alors ressortir une fâcheuse confusion entre la sécurité de l’etat, et celle des citoyens et des deniers de cet Etat. Ainsi, nous avons assisté à des candidats claironnant avec une niaise assurance, que la sécurité « intérieure » est l’apanage exclusif du gouvernement, tandis que celle des frontières incombe au chef de l’etat, puisqu’il est le chef suprême des forces armées. Cette version de la Constitution n’a pas résisté à un mandat de cinq ans, celui du défunt Béji Caïd Essebsi. L’actualité quotidienne en est témoin.
Or à la veille de la série des débats, un candidat, au cours d’un entretien avec un média de la place, a lâché au moins à cinq reprises, le terme de « Sécurité globale », insinuant par-là que la sécurité est un concept indivisible, et qu’il ne peut souffrir de « division » que sur un plan purement technique. De ces grands mots, on atterrit sur des notions d’équipements, de répartition, de déploiement et d’exploitation, selon les prérogatives définies par les textes de loi. Le tout sous un commandement suprême unique, fédérant tous les corps civils et armés du pays, impliqués dans l’obligation de sauvegarder et de renforcer la sécurité du citoyen, des institutions, des propriétés, et des frontières. Une sorte de C3 (Conseil de Commandement et de Contrôle), et ce en dehors de toute approche partisane, clanique, corporative ou régionale. Conjugué à l’intention des constitutionnalistes ayant attribué la Défense au chef de l’etat, ce Conseil ne peut être présidé que par le Président de la République. Les administrations techniques obéiront aux consignes et ordres de ce Conseil, par le truchement de leurs références hiérarchiques respectives, membres de ce dernier.
Une sécurité structurée en réseau
Ainsi, l’information et les modalités de gestion emprunteront un couloir d’urgence nationale qui n’est pas nécessairement celui de l’action routinière des rouages de l’etat. Une structure qui, par-delà sa complexité apparente, permettra de travailler sur la sécurité du pays, sans préjudice à la paix sociale vitale pour toute activité économique et sociale à l’intérieur comme à l’extérieur de l’etat Tunisien. Ledit Conseil n’aura aucune couleur politique partisane, ce qui est déjà un grand acquis, favorisant par ailleurs le renforcement de la présence et du statut du pays sur l’échiquier régional et international. Conjugué à une diplomatie hautement professionnalisée, la seconde attribution du président de la République, ce concept de « sécurité globale » prendra son sens plein, dans un Etat invulnérable, parce que organisé, non sur des considérations partisanes manichéennes donc bloquantes, mais sur une approche scientifique, dynamique, ne souffrant devant aucun empêchement de circonstance.
Cette approche institutionnelle moderne de la sécurité nationale semble la plus adaptée, si la classe politique s’emploie réellement à réévaluer les menaces réelles qui guettent le pays, à l’intérieur comme à l’extérieur.
Ainsi, la version selon laquelle la sécurité se divise grossièrement en ministère de l’intérieur et celui de la Défense ne tient plus. La seule autorité pouvant fédérer les deux ministères aux autres départements concernés, comme celui des Finances ô combien important, n’est autre que celle d’un Président de la République élu et respecté en tant que tel. Cette sécurité « en réseau » aura aussi le mérite de la transparence, en plus de celui de pacifier les conflits et duels puérils de compétences à la tête de l’etat.
Il y va de la Sécurité qui, avec la Justice, fondent la stabilité productrice de biens et d’idées, dans un pays où l’élite se cherche encore une place, sur les ruines de combats désuets, loin des vraies préoccupations du moment. La Tunisie le mérite amplement. Non ?