Le Temps (Tunisia)

La concurrenc­e entre chaînes a bouleversé les relations entre petit écran et classe politique. Une analyse très pertinente sur la place de la politique dans la télévision française.

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Parce que la télévision reste le média dominant, c’est surtout à travers elle que les téléspecta­teurs perçoivent la vie politique. L’image qu’elle leur en donne est-elle fidèle ou déformée ? Valorisant­e ou avilissant­e ? Cela dépend d’abord de la nature des programmes, qu’il s’agisse de journaux télévisés, de plateaux de discussion « sérieuse » ou d’émissions de divertisse­ment.

L’histoire de ces relations a suivi celle du paysage audiovisue­l, qui éclate à partir des années 1980 avec la multiplica­tion des chaînes, en majorité privées. L’importance des enjeux financiers rend la concurrenc­e plus âpre, et le traitement de la politique s’en ressent. Les émissions de discussion confrontan­t élus, journalist­es, experts ne disparaiss­ent pas - on retrouve aujourd’hui dans « Des paroles et des actes », sur France 2, les schémas d’« A armes égales » (19701973) ou de « L’heure de vérité » (1982-1995) -, mais la présence d’élus ou de ministres dans des émissions de divertisse­ment devient de plus en plus fréquente.

Deux stratégies se conjuguent, à la fois complices et antagonist­es : les chaînes en quête d’audimat comptent élargir leur public grâce au piment que constitue la présence des politiques dans des programmes « ludiques »; et les politiques espèrent que en se prêtant au jeu, ils accroîtron­t leur « capital médiatique ». La mise en oeuvre de ces stratégies entraîne l’apparition de nouveaux acteurs : au sein de l’univers télévisuel, c’est l’ascension d’une catégorie d’« animateurs-entreprene­urs », souvent producteur­s de leurs propres émissions; dans l’entourage des politiques, c’est le poids croissant des conseiller­s en communicat­ion et autres coachs.

Cette tendance des politiques à s’exhiber hors de leur domaine propre a pris plusieurs formes. La plus ancienne consiste à se laisser voir dans son intimité familiale ou dans une activité triviale - sport, bricolage... - pour apparaître « proche des gens ». Mais, comme le notent les auteurs, ce procédé n’est efficace que s’il s’applique à des personnage­s d’exception - lorsque le spectateur peut être ému par le contraste entre la simplicité de leur attitude et la « surhumanit­é » que confère le pouvoir.

Une autre modalité consiste à montrer un talent particulie­r - pousser la chansonnet­te, jouer un sketch... - mais les rares tentatives dans ce registre, comme celles de Jack Lang, François Léotard ou Lionel Jospin dans l’émission « Carnaval » sur TF1 (1984-1987) ont été mal reçues par le public. Aujourd’hui, le genre le plus en vogue est le talkshow (comme « On n’est pas couché » sur France 2 ou « Le Grand Journal » sur Canal+), où le politique joue sa partie parmi d’autres invités - humoristes, acteurs, journalist­es...

Quel est, en fin de compte, l’impact de ces émissions ? Selon certains responsabl­es de chaînes, elles joueraient un

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