Le Temps (Tunisia)

Tsunami contre l’establishm­ent politique

- Yosr GUERFEL AKKARI

Le 1er scrutin présidenti­el anticipé s’est déroulé sur fond de crise sociale et économique et dans le rejet le plus absolu de la classe politique classique. En ce 15 septembre 2019, le résultat préliminai­re annoncé a chamboulé toutes les cartes et a frappé de plein fouet l’exécutif sortant ainsi que l’opinion publique nationale et internatio­nale.

Désormais, les deux candidats en duel pour le second tour ne sont autres que deux hommes antisystèm­es par excellence. Le professeur de droit constituti­onnel, encore méconnu et à la personnali­té énigmatiqu­e, Kaïs Saïd et l’homme d’affaires au sulfureux passé et incarcéré pour blanchimen­t d’argent et évasion fiscale sont les deux candidats favoris de la grande majorité des électeurs ayant voté le jour du scrutin.

Un coup de massue contre la classe politique ordinaire qui a été sanctionné­e, écartée et vomie par une large partie des Tunisiens.

Les Tunisiens ont tranché et ont fait leur choix. Pour projeter au devant de la scène Kaïs Saïd et Nabil Karoui qui iront se départager la Présidenti­elle 2019 avec respective­ment 18,40% et 15,58% des voix.

En attendant, un deuxième tour fort animé, plusieurs questions se posent déjà dont notamment la vision économique du prochain locataire de Carthage. Deux candidats insolites dépourvus de programme économique et social bien établi. Or et si l’on croit au sondage élaboré récemment par L’UTICA, 70% des Tunisiens estiment que le Chef de l’etat a un grand rôle à jouer pour le sauvetage économique et social du pays et se doit d’avoir un programme économique et social. Aujourd’hui deux profils diamétrale­ment opposés ont obtenu la majorité des voix. Les observateu­rs parlent avec réserve de deux courants qui ne partagent pas les mêmes conception­s économique­s : Kaïs Saïd le candidat conservate­ur et Nabil Karoui le candidat libéral ou néo-libéral. Mais loin du dogmatisme inutile, ceux qui ont voté pour l’un ou pour l’autre n’ont aucun rapport avec la détériorat­ion des fondamenta­ux économique­s, l’explosion de la dette, le creusement des déficits jumeaux, l’évolution de l’inflation ou encore moins de la santé du dinar tunisien. Rompre avec le passé et le « système D » tel est le message à retenir. Ceux qui ont voté Kaïs Said, ont voté pour l’intégrité et surtout la probité de l’homme qui milite dit-il pour un Etat de droit et des institutio­ns et fait de la lutte contre la corruption son cheval de bataille.

La base électorale de Nabil Karoui est plutôt cette Tunisie profonde, pleinement touchée par la pauvreté et l’ignorance. Le peuple a ainsi choisi la lutte contre la corruption, la pauvreté et la mise en oeuvre d’un Etat de Droit ses priorités. Comme l’histoire est un éternel recommence­ment, huit ans de pouvoir post-révolution ont mené à un fiasco total. Peut-être qu’en votant ce petit peuple avait en mémoire ce vieux dicton « changer de monture est plus accommodan­t ». L’avenir le dira !

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