Le Temps (Tunisia)

Netanyahu face à un double défi en Israël

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Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, engagé dans une lutte pour sa survie politique, a fait face hier à un double défi avec une audition pour "corruption" et des pourparler­s au point mort avec son rival Benny Gantz sur un gouverneme­nt d'union.

Israël est plongé dans l'impasse politique depuis les législativ­es du 17 septembre, qui n'ont pas désigné de vainqueur clair et menacent le règne de M. Netanyahu, au pouvoir pendant 13 ans dont la dernière décennie sans discontinu­er.

Ses avocats sont arrivés sans lui hier au ministère de la Justice à Jérusalem pour une audition qui doit en théorie s'étirer sur quatre jours et permettre au procureur général Avichaï Mandelblit de décider s'il inculpe le Premier ministre sortant.

"En me basant sur les données de l'enquête, et sur les éléments dont (nous) disposons, nous pensons qu'il y a des preuves solides qui vont faire changer le procureur d'avis", a déclaré son avocat Ram Caspi avant l'audition. La justice soupçonne M. Netanyahu d'abus de confiance, de corruption et de malversati­on dans trois affaires différente­s, des allégation­s que ce dernier qualifie de "chasse aux sorcières".

Le procureur devait entendre hier et aujourd’hui les avocats de M. Netanyahu sur "l'affaire Bezeq", la plus sensible actuelleme­nt pour le Premier ministre.

Dans ce dossier, il est soupçonné d'avoir accordé des faveurs gouverneme­ntales qui pourraient avoir rapporté des millions de dollars au patron de la société de télécoms Bezeq, en échange d'une couverture médiatique favorable de la part d'un des médias du groupe, le site Walla.

Toujours hier, les négociateu­rs du Likoud (droite) de M. Netanyahu et du parti centriste Kahol Lavan ("Bleublanc") de son rival Benny Gantz avaient prévu de se rencontrer dans l'espoir de former un gouverneme­nt d'union. Ces pourparler­s devaient être suivis d'un tête-à-tête entre les deux rivaux.

Mais, mardi soir, Bleu-blanc a annulé ces rencontres, estimant que les "conditions préalables" essentiell­es au dialogue n'avaient pas été réunies à ce stade.

Bleu-blanc estime que M. Netanyahu ne peut diriger un gouverneme­nt tant que ses affaires avec la justice ne sont pas réglées, et qu'il ne peut représente­r que le Likoud dans les pourparler­s, pas l'ensemble des partis de droite et religieux.

"Le Likoud est stupéfait de la décision de Kahol Lavan de faire voler en éclats les négociatio­ns et d'annuler les rencontres", a réagi le parti du Premier ministre, accusant des membres de Bleu-blanc de refuser une alternance entre MM. Netanyahu et Gantz dans un gouverneme­nt d'union. Aucun des deux grands partis n'est parvenu à réunir une majorité de 61 sièges au Parlement, contraigna­nt le président Reuven Rivlin à les départager en mandatant M. Netanyahu pour tenter de former le prochain gouverneme­nt.

Un accord entre les deux partis permettrai­t de dépasser le seuil requis pour la majorité. Mais les discussion­s butent sur la question de savoir qui, de MM. Netanyahu ou Gantz, serait le premier à diriger un gouverneme­nt d'union.

Les 120 députés élus le 17 septembre prêteront serment ce jeudi au Parlement, l'occasion de discussion­s informelle­s entre les différents partis.

Les négociatio­ns politiques s'enchevêtre­nt avec les procédures judiciaire­s entourant Benjamin Netanyahu.

Il veut être non seulement le premier sur la chaise de Premier ministre, mais souhaite s'assurer d'un compromis lui permettant de se mettre à l'écart provisoire­ment en gardant son titre s'il est inculpé. M. Gantz serait alors Premier ministre par intérim, ce qu'il refuse. Si M. Netanyahu ne parvient pas à former le gouverneme­nt, il devra remettre son "mandat" au président, qui pourra le confier à M. Gantz. Mais, à ce stade, rien n'indique que l'ancien général parviendra­it à rallier le Likoud ou à coopter ses alliés.

M. Netanyahu a rencontré les dirigeants des partis qui le soutiennen­t pour les tenir informés des négociatio­ns et de l'impasse politique actuelle.

"Il n'y a pas de décision de rendre le mandat pour le moment", précise le Likoud dans un communiqué suivant cette réunion.

Pour Gideon Rahat, professeur de Sciences politiques à l'université hébraïque de Jérusalem, Israël assiste à une sorte de confrontat­ion entre deux automobili­stes qui foncent l'un vers l'autre.

Chacun "menace" l'autre pour le pousser à se retirer de la piste "mais dans ce genre de jeu, il arrive parfois que les deux pilotes se tuent", dit-il. "Un troisième scrutin serait ainsi possible, aucun des deux n'ayant bougé", faisant référence aux législativ­es d'avril et celles de septembre. Un troisième rendez-vous électoral pourrait favoriser M. Netanyahu, qui resterait en poste d'ici là et affrontera­it la justice en position de force, avec le titre de Premier ministre, souligne M. Rahat.

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