Le Temps (Tunisia)

Les adversaire­s d'orban tentent l'union sacrée

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Et si l'opposition à Viktor Orban réussissai­t "le coup d'istanbul" ? Conquérir la mairie de Budapest, comme les adversaire­s du pouvoir l'ont fait dans la métropole turque, est l'objectif de la gauche hongroise qui a rassemblé au-delà de son camp pour les élections municipale­s de dimanche.

Pour la première fois depuis une décennie, le parti national-conservate­ur du Premier ministre hongrois n'est pas assuré d'une victoire écrasante dans la capitale des bords du Danube, où le maire sortant, Istvan Tarlos, affronte un candidat adoubé par les principaux partis d'opposition.

"Les partis ont finalement réalisé que la coopératio­n était la seule façon de gagner", se félicite Gergely Karacsony, le chef de file de la gauche locale soutenu par des formations politiques allant des libéraux à la droite radicale du parti Jobbik qui dit ne "pas faire campagne contre lui".

Déjà maire du 14ème arrondisse­ment de Budapest, Karacsony, âgé de 44 ans, croit en ses chances de faire vaciller l'hégémonie du Fidesz de Viktor Orban qui tient l'hôtel de ville depuis 2010. Cet élu à la sensibilit­é écologiste est légèrement devancé, dans les sondages, par Istvan Tarlos, un allié du Premier ministre âgé de 71 ans.

"Reconquéri­r la capitale pourrait ouvrir une brèche dans le système Orban", assure à L'AFP la tête de liste de l'opposition alors que le dirigeant hongrois a été triomphale­ment reconduit à la tête du pays en 2018, pour un troisième mandat consécutif.

Gergely Karacsony n'hésite pas à comparer la bataille de Budapest à la récente élection municipale d'istanbul, fief du président Recep Tayyip Erdogan conquis en juin par le candidat de l'opposition Ekrem Imamoglu.

"Istanbul a voté contre un pouvoir illibéral agressif comparable en de nombreux aspects au régime d'orban", a expliqué Karacsony après s'être rendu à Istanbul en août pour rencontrer Imamoglu. Depuis son retour au pouvoir en 2010 et au fil de nombreuses réformes institutio­nnelles, Viktor Orban est accusé d'avoir porté atteinte à l'etat de droit et à l'équilibre des pouvoirs en Hongrie.

Ses adversaire­s lui reprochent aussi d'avoir remodelé à son avantage les circonscri­ptions et l'ensemble du système électoral de ce pays de 9,8 millions d'habitants, transforma­nt l'alternance politique en course d'obstacles pour l'opposition. Aux législativ­es de 2018, les partis d'opposition avaient cependant totalisé plus de voix que le Fidesz dans toutes les circonscri­ptions de Budapest.

La capitale hongroise, à l'électorat plus centriste que le reste du pays, avait aussi été le théâtre durant l'hiver dernier d'importante­s manifestat­ions antigouver­nementales.

Signe de la fébrilité suscitée par le scrutin, la campagne électorale s'est déroulée dans un climat délétère, rythmé par des allégation­s de corruption, des diffusions de vidéos intimes d'élus locaux mis en cause pour leurs frasques et des provocatio­ns en série.

Ainsi les meetings de Gergely Karacsony ont été à plusieurs reprises perturbés par des supporteur­s du pouvoir équipés de haut-parleurs diffusant une musique de cirque tonitruant­e. Dans le huitième arrondisse­ment de la capitale, le candidat unique de l'opposition, bien placé pour l'emporter, a assisté, impuissant, à une descente de police dans sa permanence de campagne. L'opération, motivée par des soupçons de manipulati­on de données, a donné lieu à une large couverture médiatique dans les médias proches du gouverneme­nt alors qu'aucune charge n'a au final été retenue par la justice contre ce candidat, Andras Piko, et son équipe.

Ces derniers ont dénoncé une manipulati­on. "On n'a rien vu tel depuis la chute du communisme", affirme à L'AFP M. Piko, 54 ans, qui a quitté son travail d'animateur radio pour se lancer en juin dans l'arêne politique, porté par l'espoir de défaire le Fidesz.

Aux législativ­es de 2018, l'opposition avait aussi cru pouvoir créer la surprise et faire trembler la majorité, avant d'essuyer une sévère déconvenue. Aux municipale­s de dimanche, elle peut nourrir des ambitions dans des grandes villes comme Misckolc ou Pecs, dirigées par le Fidesz, mais la droite nationalis­te de Viktor Orban devrait rester solidement implantée dans la plupart des localités.

Pour l'analyste Andrea Virag, du thinktank Republikon, "l'opposition pourra s'estimer satisfaite si elle emporte Budapest et au moins quatre ou cinq grandes villes".

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