La Banque Mondiale prévoit une croissance en dessous de 2% en 2019 pour la Tunisie
• L’institution internationale met en garde contre la menace oligarchique sur les pays de la région • Affaire BFT : la BM interpelle les autorités quant à la nécessité de constituer des provisions
La Banque Mondiale vient de publier son rapport sur la croissance économique dans la région MENA. L’institution prévoit une croissance de 0.6% en 2019 contre 1,2% en 2018. Un niveau dérisoire, expliqué par la baisse des cours du baril et la contraction plus forte que prévue de l’économie iranienne. « Des risques de dégradation substantiels assombrissent les perspectives économiques de la région, dont notamment l’intensification des difficultés de l’économie mondiale et la montée des tensions géopolitiques », souligne le rapport.
À moyen terme, la Banque mondiale prévoit une progression du PIB réel de 2,6 % en 2020 et 2,9 % en 2021. Le rapport a mis en exergue l’accroissement de la croissance en Egypte stimulée par les réformes du régime de change, des finances publiques et du secteur énergétique. L’égypte a ainsi affiché au premier semestre 2019 une croissance de 5,4 %, en hausse par rapport à 2018 (5,2 %).Dans son bulletin d’information économique, la BM appelle les décideurs de la région à promouvoir une concurrence loyale. « Le moment est venu pour les pays de la région de s’atteler à la fois à démanteler les monopoles qui existent sur leurs marchés et à tirer parti de leur demande intérieure collective pour promouvoir une croissance tirée par les exportations vers les autres pays de la région et au-delà. », souligne la même source. L’institution de » Bretton Woods » épingle la domination des marchés par les entreprises publiques et des opérateurs à la faveur de bonnes connexions politiques, pratique déloyale qui décourage l’investissement privé, réduit par-dessus le marché le nombre d’emplois et exclut de la prospérité un bon nombre de jeunes plein d’enthousiasme. La BM met en garde ainsi contre la menace oligarchique, ou encore l’influence pesante des puissances financières sur le pouvoir politique. La Tunisie, cette jeune démocratie se trouve aujourd’hui contrainte de faire face à cette menace. Dans son ouvrage : « L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie », Hervé Kempf a appelé à la séparation entre la sphère publique et la sphère économique comme étant l’un des fondements essentiels de la démocratie.
« L’absence de concurrence loyale dans la région freine le développement du secteur privé, alors qu’il s’agit du moteur d’une croissance généralisée et de la principale source d’emplois, explique Rabah Arezki, économiste en chef de la Banque mondiale pour le Moyen-orient et l’afrique du Nord.
Les pays de la région pourraient transformer leur économie en instaurant des règles du jeu équitable et en fournissant un environnement qui encourage la prise de risques et récompense les efforts d’innovation et de productivité. », ajoute le rapport qui préconise entre autres d’assurer une gouvernance plus efficace des entreprises publiques, de promouvoir le secteur privé et asseoir le pouvoir des autorités de régulation nécessaires. Pour ce qui est des prévisions de croissance pour la Tunisie, la BM prévoit une croissance en dessous des 2% en 2019.
« L’inflation devrait continuer à diminuer, pour autant que la politique monétaire reste focalisée sur ses objectifs centraux. Le taux de pauvreté devrait rester en deçà de 3 %. Le déficit budgétaire pour 2019 devrait atteindre 5,3 % du PIB par rapport à l’objectif initial fixé par la loi de finances, soit 3,9% du PIB, en raison d’un taux de croissance du PIB nettement inférieur aux prévisions, des hausses de salaires dans la fonction publique et d’une croissance à deux chiffres des paiements d’intérêts. La dette publique culminera », prévoit la BM.
En ce qui concerne l’affaire BFT, et en relation avec la récente décision de justice à la défaveur de l’etat, la BM souligne la nécessité de constituer des provisions. L’amélioration de la situation en 2020 dépendra toutefois du train des réformes à engager après les élections présidentielle et législatives.
« Les marchés sont dominés par les entreprises publiques et les opérateurs jouissant des bonnes connexions politiques »