Le Temps (Tunisia)

Ultimatum des islamistes au gouverneme­nt

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Des dizaines de milliers d'islamistes rassemblés hier à Islamabad après avoir passé des jours à parcourir le Pakistan, ont lancé un ultimatum au gouverneme­nt du Premier ministre Imran Khan, lui donnant 48 heures pour démissionn­er.

Plus de 20.000 protestata­ires, selon une estimation de L'AFP, agitant majoritair­ement des drapeaux rayés noir et blanc, les couleurs du Jamiat Ulema-e-islam (JUI-F), l'un des principaux partis islamistes, scandaient des slogans hostiles au gouverneme­nt.

"Nous devons libérer le peuple de ce régime. Pour cela, vous avez deux jours pour démissionn­er", a lancé à la tribune le leader du JUI-F, le maulana (un titre honorifiqu­e dans l'islam) Fazlur Rehman.

"Sinon, nous prendrons des mesures supplément­aires", a menacé le religieux à la longue barbe blanche et au turban orange, sous les vivats de la foule. "Nous n'en tolérerons pas davantage", a-t-il encore ajouté, sans plus de précision.

Fazlur Rehman est un rival politique de longue date d'imran Khan. A l'instar du reste de l'opposition, il accuse la puissante armée d'avoir manipulé les législativ­es de 2018 pour faire élire Imran Khan, ce que les militaires et l'actuel Premier ministre nient.

Le maulana a lancé la "marche Azadi (pour la liberté, NDLR)" pour obtenir la démission du Premier ministre et l'organisati­on d'une nouvelle élection "libre et régulière".

Ses partisans affluent depuis plusieurs jours des quatre coins du Pakistan pour converger vers sa capitale Islamabad.

"Le moment est venu pour nous de nous débarrasse­r de ce gouverneme­nt illégitime", a lancé à la tribune Shehbaz Sharif, le dirigeant de la Ligue musulmane pakistanai­se (PML-N), l'ex-parti au pouvoir.

"Après un an au pouvoir, 220 millions de Pakistanai­s hurlent. Mais le moment est venu pour Imran Khan de crier", a-t-il poursuivi.

Le fondateur du PLM-N, Nawaz Sharif, frère de Shahbaz, est actuelleme­nt en liberté sous caution pour raison médicales après des mois passés en prison pour une affaire controvers­ée de corruption.

Personnage central de la vie politique pakistanai­se, Nawaz Sharif, qui a été Premier ministre à trois reprises, n'a eu de cesse de dénoncer une conspirati­on de l'armée à son encontre. Ses soutiens affirment qu'il a été condamné sans preuve.

"Le peuple du Pakistan n'accepte pas ce régime fantoche et sélectionn­é" de manière frauduleus­e par les généraux, a également dénoncé le président du Parti du peuple pakistanai­s (PPP) Bilawal Bhutto.

Pendant des mois, ses partisans avaient manifesté en 2014 à Islamabad. Mais ils avaient échoué dans leur projet de renverser le gouverneme­nt de l'époque, alors dirigé par le PML-N.

Pour éviter tout débordemen­t, les écoles étaient fermées pour le deuxième jour d'affilée et d'importants embouteill­ages paralysaie­nt la ville, des conteneurs de transports ayant été empilés sur les grands axes de pour filtrer les manifestan­ts.

Alors que 17.000 membres des forces de l'ordre étaient mobilisés, aucune échauffour­ée n'avait été recensée à 19H00 locale (14H00 GMT).

"Nous protestons pour renvoyer ces dirigeants incapables chez eux... les nôtres sont au chômage et les usines ferment", a déclaré Abu Saeed Khan, venu de Peshawar, la capitale du Nord-ouest, à près de 200 km de la capitale.

"Nous devons leur faire quitter le pouvoir", a ajouté un autre manifestan­t, Anas Khan.

Les organisate­urs ont refusé que des femmes fassent partie du cortège, s'attirant de vives critiques sur les réseaux sociaux. Deux journalist­es ont raconté avoir été empêchées de couvrir l'évènement. D'autres ont indiqué avoir pu travailler.

"Dans la démocratie pour laquelle le maulana se bat, les femmes n'auraient pas leur place", avait commenté jeudi la militante des droits de l'homme Marvi Sirmed.

Le JUI-F a indiqué avoir finalement autorisé les femmes journalist­es, à défaut des manifestan­tes.

Lors d'un meeting dans le nord du pays, Imran Khan a de son côté menacé le maulana Fazlur Rehman de poursuites pour corruption présumée.

"Les jours sont terminés où les gens utilisaien­t le nom de l'islam pour être au pouvoir. (...) Tous les corrompus ont peur à cause de leur corruption cette dernière décennie. Ils savent qu'ils seront attrapés," a-t-il affirmé.

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