Le Temps (Tunisia)

Démocrates et Républicai­ns à couteaux tirés

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Démocrates et républicai­ns américains se sont écharpés en offrant leurs conclusion­s diamétrale­ment opposées de l'enquête en destitutio­n contre Donald Trump, illustrant les profondes divisions partisanes qui traversent les Etats-unis. L'opposition démocrate a présenté son dossier contre le président républicai­n, en amont d'un vote crucial à la Chambre des représenta­nts sur sa mise en accusation ("impeachmen­t"), qui pourrait intervenir avant Noël.

Et les parlementa­ires s'apprêtaien­t à dévoiler dès hier les chefs d'accusation retenus contre le milliardai­re new-yorkais, qui sont selon plusieurs médias l'abus de pouvoir et l'entrave à la bonne marche du Congrès.

La cheffe des démocrates au Congrès, Nancy Pelosi, a en effet annoncé qu'une conférence de presse avec notamment le chef de la commission judiciaire, Jerry Nadler, et le président de la commission du renseignem­ent, Adam Schiff, se déroulerai­t hier pour annoncer "les prochaines étapes" du processus de destitutio­n.

Au terme d'une audition acrimonieu­se longue de près de dix heures, marquée par de vives passes d'armes, Jerry Nadler n'a en tout cas laissé aucun doute sur sa position: la conduite de Donald Trump "est à l'évidence passible d'une mise en accusation. Cette commission agira en conséquenc­e", a-t-il déclaré.

Le milliardai­re "a violé son serment envers les Américains, il a fait passer son propre intérêt avant notre sécurité nationale", a-t-il martelé. M. Trump "représente encore aujourd'hui une menace pour l'intégrité de nos élections et notre système démocratiq­ue".

Les républicai­ns ont tenu la ligne de défense de la Maison Blanche, dénonçant "un spectacle politique".

Les démocrates "n'arrivent pas à se remettre du fait que Donald Trump est président" depuis sa victoire surprise en 2016, a lancé le numéro deux républicai­n de la commission, Doug Collins.

Proclamant depuis le début de l'affaire qu'il n'a rien fait de mal, Donald Trump a confié avoir regardé "un petit peu" cette audition fleuve. "C'est une honte, c'est un coup monté", a-t-il encore dit. Forts de leur majorité à la Chambre, les démocrates ont lancé fin septembre l'enquête en destitutio­n, après avoir appris que Donald Trump avait demandé à l'ukraine d'enquêter sur le démocrate Joe Biden, bien placé pour l'affronter lors de la présidenti­elle de 2020.

L'accusant d'abus de pouvoir, ils estiment que le président a fait pression sur l'ukraine, notamment en suspendant une importante aide militaire destinée à ce pays en guerre avec la Russie.

Les parlementa­ires pourraient aussi inclure le refus de la Maison Blanche de collaborer dans l'enquête en destitutio­n, qu'elle juge "anticonsti­tutionnell­e", dans un second chef d'accusation: l'entrave à la bonne marche du Congrès.

Compte tenu de la majorité démocrate à la Chambre, Donald Trump deviendra certaineme­nt le troisième président de l'histoire, après Andrew Johnson et Bill Clinton, mis en accusation au Congrès américain.

Lâché par ses troupes, Richard Nixon avait démissionn­é avant le vote en séance plénière.

Cependant, le milliardai­re devrait ensuite être acquitté lors du procès au Sénat, où les républicai­ns sont majoritair­es et le soutiennen­t largement. Des semaines d'auditions et d'enquête n'y ont rien fait, au contraire: républicai­ns et démocrates sont encore apparus fermement retranchés dans leurs positions lundi.

"Le président Trump a mené pendant des mois un complot pour solliciter une aide étrangère dans sa campagne de réélection en 2020", a affirmé un juriste qui représenta­it les démocrates, Daniel Goldman.

Le juriste Steve Castor, au service des républicai­ns, a lui jugé que les démocrates n'étaient pas parvenus à démontrer un abus de pouvoir au cours de cette enquête "précipitée".

Il a aussi évoqué à plusieurs reprises Joe Biden et son fils.

Hunter Biden avait été nommé au conseil d'administra­tion d'un grand groupe gazier ukrainien, Burisma, lorsque son père était vice-président de Barack Obama. Ce qui mène le président à les accuser, sans preuves, d'être corrompus.

Ces accusation­s font partie des nombreux contre-feux allumés par le président républicai­n pour délégitime­r la batterie d'enquêtes qui le visent depuis son arrivée à la Maison Blanche, en janvier 2017.

Avant l'affaire ukrainienn­e, les plus de deux ans d'enquête sur le dossier russe n'étaient, aussi, qu'une "chasse aux sorcières" selon lui, voire une "tentative de coup d'etat".

Mais un rapport officiel publié lundi a largement contredit ses allégation­s, en établissan­t que le FBI n'avait pas d'arrière-pensée politique quand il a ouvert en 2016 une enquête sur de possibles liens entre l'équipe de campagne de Donald Trump et Moscou.

L'inspecteur général du ministère de la Justice Michael Horowitz souligne toutefois que certains agents ont par la suite commis des "erreurs et des omissions".

De quoi conforter le président américain. "Ce qui s'est passé est une honte", a-t-il réagi.

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