Le Temps (Tunisia)

Métro, bobo, tombeau !

La Tunisie sous la hantise du braquage

- Slim BEN YOUSSEF

En Tunisie, le braquage fait sa rage et dévale ses ravages depuis 2011. Le militaire en costume civil qui a pris le métro, s’est fait plumer et a trouvé la mort en voulant riposter, n’est en réalité que la goutte qui fait finalement déborder le vase. Doit-on attendre toujours le pire, se mettre hors de gamme et toucher nettement le fond pour enfin se cabrer en sursaut, monter sur ses grands chevaux et ruer dans les brancards ?

En Tunisie, le braquage fait sa rage et dèvoile ses ravages depuis 2011. Le militaire en costume civil qui a pris le métro, s’est fait plumer et a trouvé la mort en voulant riposter, n’est en réalité que la goutte qui fait finalement déborder le vase. Doit-on attendre toujours le pire, se mettre hors de gamme et toucher nettement le fond pour enfin se cabrer en sursaut, monter sur ses grands chevaux et ruer dans les brancards ?

Pas plus tard que la semaine dernière, un tollé général et généralisé sur les réseaux sociaux provoqué par une vraie-fausse histoire d’un braquage au hachoir dans un bus de la ligne 4, a poussé le ministère de l’intérieur à mener une « campagne » de sécurisati­on des transports publics à Tunis qui a eu lieu… un dimanche !

Bien entendu, les Tunisiens sont restés cois devant une telle fanfaronna­de sécuritair­e, qui frise bien sûr le ridicule, en cherchant vainement où réside l’intérêt d’une telle campagne menée durant un jour de repos !

Mais surtout, les Tunisiens ont déjà commencé à se demander sérieuseme­nt si les millions de dinars qui ont été puisés annuelleme­nt dans les caisses de l’etat pour renflouer le budget consacré à la sécurité, si les salaires des agents de sécurité toutes branches confondues qui ont été doublés voire triplés après la révolution, si le budget du ministère de l’intérieur qui ne cesse d’être revu à la hausse chaque année, ne servent-ils finalement à quelque chose…

Car et sur le terrain, jamais la Tunisienne et le Tunisien n’ont si vu ni tant vécu dans ce pays un nombre aussi élevé d’attaques et de vols à main armée se dérouler sous leurs yeux et passer sous leurs nez, du matin au soir et à longueurs de journées. Jamais la Tunisie n’a connu un taux de criminalit­é aussi élevé et aussi visible au soleil. Jamais la Citoyenne et le Citoyen n’ont senti une si terrible et effroyable sensation d’insécurité aussi quotidienn­e que décidément durable dans ces contrées qui avancent sûrement et d’un pas de géants vers un état horrible d’ensauvagem­ent.

En termes de chiffre, et rien que durant la période du 1er janvier au 31 juillet 2019, les données officielle­s ne révèlent pas moins de 150 mille crimes et délits qui ont été enregistré­s. Si vous daignez y ajouter autant -ou plus !- de « crimes et délits » qui n’ont pas été « enregistré­s », vous aurez sans doute deviné combien il est devenu très difficile, voire impossible, de vivre en sécurité dans ce pays.

Pire encore, la capitale Tunis se pointe à l’orée de 2020 dans le top 20 des villes les plus dangereuse­s du continent africain – excusez du peu !- et y figure actuelleme­nt à la 17ème place selon la dernière mise à jour établie par le « Crime Index by City ». Tunis se place même à une alarmante 5ème position du classement des villes les plus dangereuse­s de l’afrique du Nord, avec un indice de criminalit­é estimé à 44.29.

Un chiffre qui se pointe gravement, pas loin de celui d’une ville en guerre comme Tripoli dont l’indice d’insécurité est évalué à 64.03 !

Moralité : à Tunis, comme partout en Tunisie d’ailleurs, il est aujourd’hui fort déconseill­é de sortir à l’air libre, en vue de mener son train-train quotidien, battre l’estrade, trouver sa voie, prendre le métro, aller quelque part, courir par-ci, partir par-là, voir quelqu’un, faire quelque chose, et caetera, et caetera… Aussi, est-il devenu très dangereux de quitter son chez-soi sous peine de se faire corriger sur le tas, de se laisser manger la laine sur le dos, voire de se faire carrément tuer.

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