Le Temps (Tunisia)

Répondre aux aspiration­s de la jeunesse

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Depuis quelques mois, les jeunes sont toujours plus nombreux à descendre dans les rues du Moyen-orient et d’afrique du Nord (MENA) pour réclamer l’améliorati­on de la gouvernanc­e, de la transparen­ce, des services publics, de l’environnem­ent et des perspectiv­es d’emploi.

Si ces manifestat­ions nous rappellent les « printemps arabes » de 2010 et 2011, c’est parce qu’elles en sont, pour de nombreux experts, la prolongati­on et qu’elles trouvent leur origine dans l’attente, trop longtemps insatisfai­te, de véritables changement­s structurel­s dans la gouvernanc­e économique et sociale. Mais tandis que les manifestat­ions de 2010-11 ont été concomitan­tes à plusieurs chocs exogènes et endogènes (comme le brusque effondreme­nt des prix du pétrole ou le déclenchem­ent de conflits civils) qui ont bouleversé la région, les mouvements d’aujourd’hui ne doivent pas fatalement produire les mêmes effets déstabilis­ateurs. De fait, les troubles de l’année 2019 offrent à la région une occasion unique d’accélérer le déploiemen­t de réformes porteuses de transforma­tion et capables de libérer l’incroyable potentiel de l’un de ses meilleurs atouts : sa jeunesse et ses multiples talents. Et c’est exactement ce que la stratégie du Groupe de la Banque mondiale pour la région MENA cherche à obtenir.

Toute évaluation de la situation des jeunes dans la région doit commencer par un rappel de statistiqu­es qui donnent à réfléchir : deux tiers des habitants ont moins de 35 ans ; le chômage des jeunes (15-24 ans) dépasse les 25 % ; et pratiqueme­nt la moitié de ce groupe (40 %) est constitué de femmes, y compris de diplômées de l’enseigneme­nt supérieur. C’est d’ailleurs la seule région au monde où la probabilit­é de se retrouver au chômage augmente avec le niveau d’instructio­n, alors même que ses pays investisse­nt généreusem­ent dans le système public d’éducation, avec des dépenses médianes supérieure­s à la moyenne de L’OCDE. Clairement, l’utilisatio­n du capital humain constitue un défi de taille. Tout comme le développem­ent de ce capital : un enfant qui naît aujourd’hui dans un pays de la région MENA aura à 18 ans un niveau de productivi­té de 55 % inférieur à celui qu’il pourrait atteindre en bénéfician­t d’une éducation et de soins de santé de qualité. Et, actuelleme­nt, près de 60 % des enfants ne savent pas lire couramment. Le cumul de ces handicaps est inquiétant.

Face à la gravité de la situation, la Banque mondiale a lancé en 2019 sa stratégie élargie pour le Moyen-orient et l’afrique du Nord. S’appuyant sur celle de 2015, élaborée dans le sillage du Printemps arabe et des différents chocs connexes, la stratégie de 2019 entend créer des débouchés économique­s pour les jeunes en axant les efforts sur l’améliorati­on du capital humain, le levier des technologi­es numériques et le développem­ent de l’activité du secteur privé, y compris pour les jeunes entreprene­urs, en garantissa­nt une concurrenc­e libre et équitable sur les marchés des biens et des services.

Le déploiemen­t opérationn­el de ces axes est désormais bien engagé. Nous venons de lancer un plan d’action pour le capital humain dans la région MENA, qui définit des objectifs ambitieux en termes d’améliorati­on de l’éducation, de la santé, de la protection sociale et de l’emploi. Ce plan régional est en train d’être décliné pays par pays. Nous sommes également déterminés à doubler les connexions internet haut débit et, face à leur rôle essentiel pour l’essor d’une nouvelle économie numérique, à généralise­r les paiements décentrali­sés. Parallèlem­ent à la mise en oeuvre de cette stratégie élargie, nous nous employons à mieux comprendre l’étendue et la diversité des aspiration­s d’une jeunesse tout sauf monolithiq­ue. Ainsi, alors que notre vision pour la région repose sur un rôle plus prononcé du secteur privé dans la création d’emplois durables de qualité, des enquêtes récentes montrent que les jeunes de la région MENA souhaitent voir l’état continuer à jouer un rôle important dans la création d’emplois et la fourniture de biens et de services abordables (comme le logement), signe d’attentes fortes sur le plan de l’égalité des chances et des opportunit­és mais aussi de l’égalité de traitement. Comme la plupart de ces pays disposent d’une marge de manoeuvre budgétaire limitée, il est cependant évident que le secteur public ne peut pas rester la solution de premier recours, ce qui oblige à s’intéresser de plus près au rôle optimal de l’état dans les économies du 21e siècle. (Source Banque Mondiale)

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