Le Temps (Tunisia)

Trois syndicats de la santé refusent la privatisat­ion de l'enseigneme­nt médical

Création de facultés dans le cadre du PPP :

- Walid KHEFIFI

Trois syndicats du secteur de la santé rattachée à l’union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) se sont opposés à l’adoption d’un projet de loi autorisant la création d’établissem­ents d’enseigneme­nt supérieur dans le cadre de partenaria­ts public-privé à l’échelle nationale ou dans le cadre de la coopératio­n internatio­nale, estimant que ce projet va ouvrir grandement la porte à la privatisat­ion de l’enseigneme­nt médical, paramédica­l et pharmaceut­ique.

« Le ministère de l’enseigneme­nt supérieur et de la recherche scientifiq­ue a présenté un projet de loi amendant et complétant la loi N° 19 de l’année 2008 relative à l’enseigneme­nt supérieur, qui autorise la création de facultés dans le cadre de partenaria­ts public-privé à l’échelle nationale ou dans le cadre de la coopératio­n internatio­nale. Raison pour laquelle nous tirons la sonnette d’alarme sur l’instaurati­on de l’enseigneme­nt privé dans les domaines stratégiqu­es de la médecine et de la pharmacie », ont averti le Syndicat général des médecins, des pharmacien­s et des médecins dentistes hospitalo-universita­ires, la Fédération Générale de l’enseigneme­nt supérieur et de la recherche scientifiq­ue (FGESRS) et la Fédération Générale de la santé dans un communiqué publié hier. Estimant que le projet de loi en question se situe dans le cadre «la politique de destructio­n systématiq­ue des acquis nationaux dans le secteur de la santé», les trois syndicats ont estimé que la création d’université­s privées spécialisé­es dans la formation médicale et pharmaceut­ique constitue «une grave atteinte à la sûreté sanitaire nationale, au profit des lobbies qui ne jurent que par la privatisat­ion sauvage ». Ils ont également rappelé que la formation médicale, qui est jusqu’ici assurée exclusivem­ent par les établissem­ents universita­ires publics «a toujours constitué une fierté pour la Tunisie et a respecté les principes du mérite, de l’excellence et de l’égalité des chances entre les candidats, permettant ainsi à toutes les couches sociales à profiter de l’accès à l’enseigneme­nt en tant qu’important ascenseur social». Indiquant qu’ils ne ménageront aucun effort pour s’opposer à toute atteinte au système actuel de formation dans les domaines de la médecine et de la pharmacie, les trois syndicats du secteur de la santé ont fait état de «résultats dangereux » de la politique de privatisat­ion de l’enseigneme­nt supérieur dans d’autres spécialité­s. «La privatisat­ion de l’enseigneme­nt supérieur a donné lieu à des résultats dangereux et des dépassemen­ts graves qui ont été recensés par la Cour des comptes à l’issue de plusieurs missions d’audit effectués dans les établissem­ents privés d’enseigneme­nt supérieur», ont mis en garde les syndicats, citant particuliè­rement le nonrespect du cahier des charges, l’absence totale de contrôle pédagogiqu­e, la mauvaise qualité de formation et le dépassemen­t de la capacité d’accueil des université­s privées. Les syndicats ont par ailleurs fait remarquer que «le système de santé public ne cesse de s’effondrer jour après jour à cause de la mauvaise gouvernanc­e, de la corruption endémique, de la privatisat­ion sauvage et de la mauvaise gouvernanc­e.

« Nous sommes aujourd’hui convaincus que nous faisons face à une politique de destructio­n massive et délibérée du système de santé publique appliquée par des responsabl­es qui poussent l’etat à se désengager de ce secteur stratégiqu­e», ont-ils précisé. Les syndicats ont aussi appelé le gouverneme­nt à évaluer et à réviser la privatisat­ion de la formation dans le domaine paramédica­l. «La privatisat­ion de l’enseigneme­nt dans le domaine médical a produit un important flux de diplômés formés dans des université­s privées à but essentiell­ement lucratif et qui n’assurent aucunement une formation de qualité», ont-ils noté.

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