Le Temps (Tunisia)

La retraite obligatoir­e gangrène les caisses de l’etat

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L’administra­tion profonde a agrémenté le pays de lois anachroniq­ues et vraiment rigolotes, surtout lorsqu’il s’agit des deniers de l’etat. Sinon, comment expliquer que, pour sanctionne­r un fonctionna­ire qui, le moins qu’on puisse dire, défaillant dans son travail, on lui offre une retraite dorée, tout en lui permettant d’aller travailler ailleurs. C’est le cas, par exemple, avec les responsabl­es de la douane mis, récemment, à la retraite obligatoir­e, pour des accusation­s de méfaits non-encore avérés, alors qu’ils demandent l’interventi­on de la justice.

Des représenta­nts du ministère des Affaires sociales ont appelé, vendredi, lors d›une séance d›audition tenue par la commission parlementa­ire de l›organisati­on de l›administra­tion et des affaires des forces armées, sur le projet de loi relatif à la révision du régime des pensions civiles et militaires de retraite et des survivants dans le secteur public, à trouver un autre mécanisme équivalent à celui de la retraite obligatoir­e, qui prend en compte toutes les situations possibles.

Selon un communiqué publié par l›assemblée des Représenta­nts du Peuple (ARP), le directeur général de la sécurité sociale a rappelé le cadre juridique de la mise à la retraite obligatoir­e, soulignant que l›agent peut bénéficier d›une pension de retraite à jouissance immédiate, au bout de quinze années de services civils ou militaires effectifs sans tenir compte de l›âge requis.

Dressant un inventaire des agents concernés par cette procédure et de ses effets sur les charges financière­s des fonds sociaux, le responsabl­e a fait savoir que 612 fonctionna­ires ont été mis à la retraite obligatoir­e depuis 1985, parmi eux, 91% appartienn­ent aux forces armées, ayant coûté environ 42 millions de dinars aux finances publiques, jusqu›en 2019.

Le directeur général de la sécurité sociale a dans ce contexte appelé à abroger la procédure de mise à la retraite obligatoir­e, compte tenu des charges financière­s qui pèsent sur les fonds sociaux, ou du moins, à trouver une formule alternativ­e pour éviter ces dommages financiers.

Pour sa part, la directrice juridique au ministère des affaires sociales, a indiqué qu›il s›agit également de prendre en considérat­ion toutes les situations où l›administra­tion procède à une mise à la retraite obligatoir­e qui vise, dans la plupart des cas, à «préserver la dignité du fonctionna­ire qui ne peut pas légalement formuler une demande de départ à la retraite». Commentant les interventi­ons des représenta­nts du ministère des Affaires sociales, certains députés ont considéré que le système de mise à la retraite obligatoir­e dans sa forme actuelle, recèle plusieurs paradoxes, estimant que l›etat «semble permettre au salarié de bénéficier d›une retraite anticipée, alors qu›il s›agit plutôt d›une sanction administra­tive». D›autres députés ont en revanche considéré que la procédure de mise à la retraite s›effectue soit pour se soustraire à la responsabi­lité, soit pour éviter de rendre des comptes ou dans le cas d›une sanction, rappelant que l›administra­tion refuse, le plus souvent, d›appliquer les jugements rendus par les juridictio­ns administra­tives en refusant à l›agent qui a gagné le procès de regagner son poste.

La commission a décidé de poursuivre l›examen du projet de loi, la semaine prochaine, selon le communiqué.

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