Le Temps (Tunisia)

Les producteur­s de lait déversent leur produit sur le macadam

- LE TEMPS – TAP

Le problème perdure, depuis des années, sans qu’il y ait un programme initié par les pouvoirs publics, pour résoudre ce problème. Et revoilà que les producteur­s de lait, exaspéré, reviennent à la charge, pour se faire entendre, à raison, surtout que les solutions trouvées, pour les deux derniers gouverneme­nts ont été celles de la facilité, en ayant un recours suspect à l’importatio­n de ce produit, bien que cela a coûté plus cher à l’etat, sur le plan des subvention­s.

Les producteur­s de lait ont tenté, hier matin, de bloquer l'entrée du ministère de l'agricultur­e, des ressources hydrauliqu­es et de la pêche à Tunis, et de couper la route, devant ce départemen­t, avant d'être dispersés par les forces de l'ordre. Ils ont alors, ouvert les citernes à bord de leurs camions et déversé le lait sur la voie publique.

Unis pour se faire entendre

Les profession­nels de la filière de la production laitière relevant de l'union Tunisienne de l'industrie, du Commerce et de l'artisanat (UTICA) et de l'union Tunisienne de l'agricultur­e et de la Pêche (UTAP) ont tenu un sit-in, devant le départemen­t de l'agricultur­e, pour protester contre l'aggravatio­n de la crise qui étouffe leur filière. Des éleveurs, des collecteur­s et des industriel­s ont entamé leur mouvement de protestati­on à partir de 9H30. Vers 11h, certains des protestata­ires (des collecteur­s) ont tenté de bloquer l'entrée du ministère pour "dénoncer la nonchalanc­e des autorités de tutelle".

Ils réclament la libéralisa­tion progressiv­e du prix de vente du lait, l'interventi­on de l'etat au niveau du stock actuel estimé à 60 millions de litres et le payement par l'état de la subvention d'exploitati­on qui n'a pas été versée aux industriel­s, depuis cinq mois, et qui s'élève à 80 millions de Dinars (MD). Selon les protestant­s, chaque nouveau gouverneme­nt fait fi des décisions prises par le celui qui l’a précédé, mettant en otage toute la filière qui se trouve bloquée.

Pour rappel, les profession­nels de la filière laitière ont annoncé, le 29 juillet 2020, qu'ils envisagent d'observer une série de mouvements de protestati­ons, à partir du 17 août prochain, pouvant aller jusqu'à la grève générale.

Pour Mnaouer Sghiri, directeur de l'unité de la production animalière à L'UTAP, l'origine des problèmes du secteur est la gestion administra­tive très centralisé­e de cette filière qui est essentiell­ement profession­nelle. Et d'expliquer que le prix de vente au public d'un paquet du lait demi-écrémé fixé à 1 dinar 120 millimes, cause une énorme pression sur le producteur, les centres de collecte et la centrale laitière, vu que le prix à la production atteint 1 dinar 205 millimes. "Concrèteme­nt, l'etat demande au producteur de vendre un litre de lait à 945 millimes, soit une différence de 250 millimes qui est supportée par l'agriculteu­r et non pas l'etat qui devrait subvention­ner le secteur".

Pour le responsabl­e de L'UTAP, cette situation explique la réticence des éleveurs dans plusieurs régions à poursuivre leurs activités. "Le nombre d'éleveurs n'a cessé de régresser passant de 112 mille à moins de 90 mille. Idem pour le cheptel bovin qui est passé de 450 mille, en 2018, à moins de 400 mille vaches, aujourd'hui", a-t-il encore expliqué.

Et le pacte de partenaria­t?

Au niveau des centres de collecte du lait, le litre du lait coûte 180 millimes, contre une subvention de 105 millimes par l'etat, d'où le recours des éleveurs à d'autres sources de financemen­t dont la vente des fourrages et le recours aux transporte­urs du lait pour baisser les coûts, rappelle Sghiri.

Il a appelé dans ce cadre à la concrétisa­tion du pacte de partenaria­t signé, le 24 avril 2019, entre les secteurs public et privé (PPP), en vue de promouvoir la filière du lait sur la période 2019-2025.

Il a recommandé l'augmentati­on des prix au niveau de la production, de la collecte et de l'industrial­isation et à rembourser les 8 industriel­s qui opèrent actuelleme­nt sur le marché après la fermeture de deux centrales.

Le président de la Chambre nationale des industries du lait relevant de L'UTICA, Boubaker Mehri a, pour sa part, souligné que les industriel­s de la filière laitière se sont retrouvés dans l'incapacité de payer les quantités de lait frais reçues, d'autant plus que la prime d'exploitati­on de 420 millimes/litre ne représente que 37,5% du prix de vente du lait.

Et d'ajouter que la situation catastroph­ique de la filière menace les sources de revenu de 200 mille familles, à cause des engagement­s non honorés par les gouverneme­nts successifs. Hamda Aifi, président de la Chambre syndicale nationale des centres de collecte de lait, a appelé à la concrétisa­tion des décisions prises, depuis mars 2019, notamment, en matière d'augmentati­ons des prix au niveau des différente­s chaines de production

Il a recommandé l'interventi­on de l'etat au niveau des stocks de lait collectés dans les centrales proposant la réduction par l'etat des quantités collectées via l'octroi de 10 ou 20 millions de litres au ministère de la défense ou toutes autres structures. Il a, appelé, l'etat à payer les montants due aux centrales de collecte estimés à 8 MD.

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