Le Temps (Tunisia)

La vie comme elle va

- LE TEMPS Hamma HANACHI

Le cinéma Madart a eu la bonne idée de prolonger la programmat­ion du film It must Be Heaven, un film d’elia Suleiman, 1H37 de pure délectatio­n, vécues comme dans un paradis. C’est que le tempo du film, lent, léger, transpire une sensation de gaité et de spleen à la fois, nourris de sens et d’interrogat­ion, la vie en somme.

Dans Must Be Heaven, Suleiman traverse trois villes différente­s avec la même aisance naturelle, Nazareth, Paris et New York ; il joue juste, se trouve là où il doit être, il ne penche ni à sa droite ni à sa gauche, ses expression­s sont neutres, un homme qui pense sans penser, qui s’exprime sans parler, il est en dehors du temps et de l’espace (ce qui le rapproche du héros de Paris Texas de Wim Wenders).

Le cinéma Madart a eu la bonne idée de prolonger la programmat­ion du film It must Be Heaven, un film d’elia Suleiman, 1H37 de pure délectatio­n, vécues comme dans un paradis. C’est que le tempo du film, lent, léger, transpire une sensation de gaité et de spleen à la fois, nourris de sens et d’interrogat­ion, la vie en somme.

Dans Must Be Heaven, Suleiman traverse trois villes différente­s avec la même aisance naturelle, Nazareth, Paris et New York ; il joue juste, se trouve là où il doit être, il ne penche ni à sa droite ni à sa gauche, ses expression­s sont neutres, un homme qui pense sans penser, qui s’exprime sans parler, il est en dehors du temps et de l’espace ( ce qui le rapproche du héros de Paris Texas de Wim Wenders).

Suleiman incarne l’homme sans racine, apatride, étranger ou du moins marginal, partout où il est, palestinie­n arabe, et chrétien, un cocktail explosif et nomade. Il habite Nazareth, ville ô combien symbolique, une maison charmante, entourée de citronnier­s et d’oliviers, un territoire baigné de soleil où il vit seul avec ses souvenirs, ses livres, et des voisins aimables qui lui manifesten­t un grand respect, parfois un ange apparait au fond du paysage. Lui, ne dit rien, chapeau de paille en permanence sur la tête, lunettes cerclées d’intellectu­el, il regarde tout, ne s’étonne de rien, n’a d’avis sur rien, il n’a pas de posture, il est traversé par une sorte de mélancolie; sans souffler mot, il dégage une épaisseur psychologi­que naturelle, rappelant en cela, celle du grand portugais Fernando Pessoa ( écrivain d’une seule ville : Lisbonne) .

Trois temps, trois parties fondent le film, la vie au rythme de la nature, douce, lente, sans encombres à Nazareth, une deuxième partie à Paris, bruyante ( défilé d’avions et de chars du 14 juillet) et séduisante ( défilés de mode récurrents) et une troisième à New York, au pas de course, entre les voitures, dans un parc ou dans quartier noir, sous les hauteurs des tours ; le rythme est endiablé.

Paris est une fête

Le héros, parti de son Nazareth va défendre son scénario dans les deux métropoles. La plupart des scènes se déroulent en extérieur, pour Suleiman Paris est une fête ( pas de même nature que celle d’hemingway) ; il s’attarde au jardin des Tuileries qui se transforme en une scène où des personnage­s sont pris à leur insu dans un jeu de chaises cocasse, un café est une autre scène où une manoeuvre de policiers mesurant la superficie de la terrasse enclenche le sourire ou le rire, des scènes où l’humour de Monsieur Hulot (Jacques Tati), n’est pas loin ... Le scénario est refusé. Troisième partie, New York, ville des building et de la vitesse, le cinéaste est dans un taxi, en manteau d’hiver et feutre sur la tête, c’est la première fois que le chauffeur, noir rencontre un palestinie­n, il jubile, appelle sa femme, lui apprend avec la joie d’un gamin, gestes à l’appui, qu’il conduit un client de la même nationalit­é que le grand leader Karafat ( ce n’est pas une faute de frappe). Des bureaux modernes, Suleiman est assis sur un canapé gigantesqu­e, il attend le verdict sur son scénario, ça sera un refus avec les arguments et les excuses d’usages. Retour à la case départ, le village, la nature, la maison, Nazareth et sa lumière. La vie continue, Suleiman est toujours taiseux, comme dans ses autres films, il montre encore une fois que la société ( l’idéologie, la politique) l’ont dépossédé de tout ( sa terre, son identité etc) et surtout de sa parole. Le cinéma de Suleiman ? cela doit ressembler au paradis.

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