Le Temps (Tunisia)

Signes annonciate­urs de grands changement­s ?

- LE TEMPS-MOULDI MBAREK

Pendant environ une dizaine d'années, Ennahdha faisait la pluie et le beau temps ! Mais depuis les dernières élections de 2019, les cartes sont rebattues. Les nouveaux sondages d'opinion, la publicatio­n du nouveau rapport de la cour des comptes et la grave crise par laquelle passe Ennahdha sont autant de facteurs annonciate­urs de grands changement­s aussi bien au niveau de la nouvelle carte politique que sur le plan des nouvelles alliances...

Pendant environ une dizaine d'années, Ennahdha faisait la pluie et le beau temps ! Mais depuis les dernières élections de 2019, les cartes sont rebattues. Les nouveaux sondages d'opinion, la publicatio­n du nouveau rapport de la cour des comptes et la grave crise par laquelle passe Ennahdha sont autant de facteurs annonciate­urs de grands changement­s aussi bien au niveau de la nouvelle carte politique que sur le plan des nouvelles alliances et stratégies des uns et des autres. Un vrai séisme semble secouer la classe politique ! Sauve qui peut !

En politique, gouverner c'est prévoir, anticiper et ne pas fouler aux pieds ses idéaux. Hélas, chez-nous, gouverner est devenu synonyme de se partager le gâteau et de semer la poudre aux yeux du petit peuple.

Instrument­alisant une Constituti­on qu'il s'était taillée, sur mesure pour s'éterniser au pouvoir, Ennahdha a été, jusqu'aux dernières élections, le faiseur et le défaiseur de toutes les cartes et de toutes les alliances politiques. Ghannouchi dictait ses lois et faisait les « rois » !

Deux nouveaux acteurs

de taille !

Toutefois, le dernier scrutin a tout chambardé avec l'arrivée essentiell­ement de deux nouveaux acteurs politiques faroucheme­nt opposés à Ennahdha : le nouveau président de la république et la nouvelle présidente du PDL, désormais à la tête d'un bloc au parlement.

Et, comme en politique, tout peut basculer du jour au lendemain, Attayar qui s'est bien souvent rallié au mouvement Ennahdha, semble avoir trouvé un nouveau partenaire plus solide et plus fiable : le nouveau locataire de Carthage... Face à cette nouvelle donne qui lui échappe, le président de Ennahdha a trouvé une nouvelle victime : le président de Qalb Tounès, Nabil Karoui qui avait, lui aussi, besoin d'un « parrain », capable de le protéger contre les différente­s casseroles qu'il traîne derrière lui. Certes, rien n'unit, sur le plan politique, Qalb Tounès et Ennahdha, mais, pour sidi Cheikh, comme, d'ailleurs, pour l'ami de Berlusconi, la fin justifie tous les moyens ! En attendant des jours meilleurs !

L'arrogance et les maladresse­s du chef de l'état vis-à-vis de son chef du gouverneme­nt, ont été un don du ciel tombé pour sidi Cheikh et ses deux nouveaux alliés à savoir Nabil Karoui et l'agitateur Seifeddine Makhlouf qui ont sauté sur l'occasion pour dresser le chef du gouverneme­nt contre le président de la république...

Mais le Cheikh semblait avoir oublié que le bonheur est fragile et fugace ! D'abord, même au niveau de son propre mouvement, Ghannouchi est de plus en plus contesté et isolé. Ses adversaire­s lui reprochent d'être à l'origine de la grave crise de confiance que traverse actuelleme­nt Ennahdha. Les contestata­ires au sein du parti demandent à leur chef non seulement de se conformer aux règlements internes du mouvement mais ils lui reprochent ses mauvaises alliances contre nature notamment avec le président de Qalb Tounès ainsi que ses options politiques cyniques et autoritair­es prises sans consulter les cadres du mouvement...

En fait, c'est la nouvelle star des sondages qui est à l'origine des turbulence­s qui secouent tous les partis et les acteurs politiques qui tentent actuelleme­nt de se reposition­ner et de sauver les meubles avant qu'il ne soit trop tard !

La grande pagaille

À titre de rappel, voici les résultats du dernier sondage Sigma le Maghreb, du mercredi dernier: PDL 35, 6%, Ennahdha17%, Qalb Tounès 9, 6%, El Karama 8,8%, Attayar 5,9%...

Résultat : c'est la panique générale ! Un vrai séisme politique ! D’ennahdha, à Qalb Tounès, en passant par Attayar ou le mouvement Echaâb, tous doivent revoir leurs copies pour tenter de freiner

la montée en puissance du PDL.

Face à ce séisme politique, tous les acteurs de la vie nationale s'organisent pour revoir en profondeur leurs stratégies et leurs alliances. C'est ainsi que, sous la pression de son parti, sidi Cheikh semble être contraint de lâcher son nouveau partenaire Nabil Karoui. Il serait même en train de tout essayer pour renouer avec Attayar qui a avait déjà fait son choix : faire partie de la nouvelle initiative du chef de l'état qui mise sur Attayar, le mouvement Echaâb et la centrale syndicale pour unir les Tunisiens autour d'un dialogue national. Comme si Attayar et le mouvement Echaâb représenta­ient vraiment les grands partis politiques en Tunisie !

D'ailleurs, Ennahdha s'oppose à l'initiative du chef de l'état et de L'UGTT, deux de ses « ennemis ». Dans ce contexte, la centrale syndicale a adressé, vendredi, une correspond­ance au président du parlement, Rached Ghannouchi, le mettant en garde contre les atteintes portées par certains députés contre la Centrale syndicale.

Bien entendu, la présidente du PDL ne s'associera à aucune de ces initiative­s visant, en fait, à contrer la progressio­n fulgurante de son parti.

Et, comme un malheur n'arrive jamais seul, il faut ajouter à la pagaille créée par la montée en puissance du PDL, le rapport accablant de la cour des comptes qui accuse notamment Ennahdha et Qalb Tounès d'importants dépassemen­ts et de graves irrégulari­tés.

C'est la panique ! Chacun tente, à sa façon, d'éteindre l'incendie. Mais, en politique, comme dans la vie tout court, on finit, à la fin, par récolter ce qu'on a semé !

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