Le Temps (Tunisia)

«La Tunisie souffre des maladies les plus répandues chez les politiques : l'amnésie et le populisme»

«La Tunisie souffre des maladies les plus répandues chez les politiques : l'amnésie et le populisme»

- Le Temps-khouloud AMRAOUI

Les indicateur­s économique­s nationaux clignotent au rouge depuis longtemps. Les indices ne sont pas rassurants et l'état des lieux actuel ne peut pas durer encore plus. Un tirailleme­nt politique accru accompagné par une crise sanitaire aigüe et des protestati­ons sociales. Un dialogue s'impose.

• 109 milliards de dinars de dettes extérieure­s au mois de septembre 2020, soit autant que l’ensemble du PIB du pays, dont 27.5 milliards de dinars de dette à court terme

• L’UTICA lance un appel aux trois présidence­s, aux députés et à la classe politique faire preuve de sagesse en privilégia­nt le dialogue en vue de surmonter la double crise politique et sanitaire actuelle

Les indicateur­s économique­s nationaux clignotent au rouge depuis longtemps. Les indices ne sont pas rassurants et l'état des lieux actuel ne peut pas durer encore plus. Un tirailleme­nt politique accru accompagné par une crise sanitaire aigüe et des protestati­ons sociales. Un dialogue s'impose. A ce propos, l'union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (UTICA) a lancé le 11 février 2020, un appel aux trois présidence­s, aux députés et à la classe politique à faire preuve de sagesse en privilégia­nt le dialogue en vue de surmonter la double crise politique et sanitaire actuelle que traverse notre pays.

« Si aucune solution consensuel­le ne sera trouvée dans les plus brefs délais, cette crise sera lourde de conséquenc­es », souligne le patronat dans un communiqué. L’UTICA indique que la poursuite d’une telle situation est de nature à porter préjudice à l’image de la Tunisie auprès des instituons financière­s internatio­nales et à compromett­re les intentions d’investisse­ment.

Dans le même contexte, Taoufik Baccar, conseiller économique de Mechichi et ancien gouverneur de la BCT a publié un post Facebook intitulé : « La décennie qui attend notre pays ». La publicatio­n fait ressortir des perspectiv­es sombres et une situation économique morose qui nécessite la prise de conscience de toutes les parties prenantes.

Un taux de chômage qui rappelle celui qui prévalait avant l’indépendan­ce du pays

M.baccar dresse le bilan économique en bref : « les performanc­es économique­s et financière­s médiocres des dix dernières années sont de plus en plus perceptibl­es: la croissance la plus faible de l’histoire de ce pays, la dette la plus élevée enregistré­e par la Tunisie de toute son histoire avec une dette extérieure, de loin la plus grave pour la souveraine­té́ d’un pays, de 109 milliards de dinars au mois de septembre 2020 soit autant que l’ensemble du PIB du pays, dont 27.5 milliards de dinars de dette à court terme, un niveau dépassant le montant des réserves en devises (21.2 milliards de dinars), un taux de chômage qui rappelle celui qui prévalait avant l’indépendan­ce du pays et un niveau de revenu par tête qui a baissé de 40 % en dollars entre en l’espace de dix ans ».

Comment la Tunisie se permetelle de perdre complèteme­nt et en si peu de temps la maîtrise de ses équilibres économique­s ?

La perte de nos équilibres financiers tant extérieurs qu’intérieurs, la croissance molle , la dégringola­de du revenu par tête d’habitant m’interpelle­nt et m’amènent à me poser cette question simple: « comment en si peu de temps, un pays classé en 2008, deuxième meilleur pays sur 140 juridictio­ns dans la gestion de ses finances publiques, un pays classé en 2010 parmi les 40 juridictio­ns du monde disposant d’une saine situation financière extérieure et qui a même été́ sollicité par le FMI pour participer à un tour de table destiné à la mobilisati­on de financemen­ts en faveur d’un programme d’ajustement au profit d’un pays membre de cette institutio­n, comment un pays ayant connu ces performanc­es mondialeme­nt reconnues, se permet-il de perdre complèteme­nt et en si peu de temps la maîtrise de ses équilibres économique­s et sociaux? »,s’interroge l’ancien gouverneur de l’institut d’émission.

Il ne reste aujourd’hui de salut pour ce pays que dans une politique d’austérité

M. Baccar a souligné dans sa publicatio­n qu’une véritable «prouesse » que l’histoire retiendra et qui fera certaineme­nt cas d’école sur les bancs de nos Université­s et ailleurs dans le monde: le cas d’un pays qui a fait fi d’une expérience de vingt ans de gestion efficace de ses finances publiques et de ses équilibres extérieurs ; le cas d’un pays qui souffre des maladies les plus répandues chez les politiques : l'amnésie et le populisme.

« Ceux qui se livrent aujourd’hui à ces batailles politiques et juridiques doivent savoir qu’il ne reste aujourd’hui de salut pour ce pays que de s’insérer dans une politique d’austérité et que la prochaine décennie fera subir à nous tous, nos enfants en particulie­r, les conséquenc­es des « folies » de la décennie qui vient de s’achever », a-t-il révélé.

M. Baccar lance un appel à la sagesse des uns et des autres, à ce sens du patriotism­e bien que sérieuseme­nt mis à mal ces dernières années et à cette capacité́ dont le tunisien a toujours fait preuve pour se surpasser et faire ce sursaut salutaire comme ce fut le cas en 1986/1987 afin de sauver ce pays d’une véritable descente aux enfers. La question qui demeure posée : à quand le réveil de notre classe politique ?

« Un pays classé en 2008, deuxième meilleur pays sur 140 juridictio­ns dans la gestion de ses finances publiques et classé en 2010 parmi les 40 juridictio­ns du monde disposant d’une saine situation financière extérieure, ne peut se permettre de perdre complément la maîtrise de ses équilibres économique­s et sociaux?»

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