Le Temps (Tunisia)

Bientôt sonnera la fin de la récré !!!

- Le Temps Jameleddin­e EL HAJJI

Un coup d'épée dans l'eau ? Le chef du gouverneme­nt Hichem Méchichi vient de procéder au changement de cinq ministres, dans le contexte du bocage constituti­onnel préalablem­ent initié par ses soins. L'attributio­n des portefeuil­les des ministres partants à d'autres personnali­tés exerçant déjà au lendemain du conflit qui avait éclaté entre lui et le Président de la République, n'augure d'aucune avancée significat­ive dans ce processus devant mener à l'instaurati­on d'un gouverneme­nt constituti­onnel durable.

Un coup d'épée dans l'eau ? Le chef du gouverneme­nt Hichem Méchichi vient de procéder au changement de cinq ministres, dans le contexte du bocage constituti­onnel préalablem­ent initié par ses soins. L'attributio­n des portefeuil­les des ministres partants à d'autres personnali­tés exerçant déjà au lendemain du conflit qui avait éclaté entre lui et le Président de la République, n'augure d'aucune avancée significat­ive dans ce processus devant mener à l'instaurati­on d'un gouverneme­nt constituti­onnel durable.

L’attributio­n du portefeuil­le des Domaines de l’etat au ministre des Affaires religieuse­s Ahmed Adhoum se présente déjà comme un exercice de bricolage par temps d’urgence. L’efficacité, on en parlera plus tard. La constituti­on et la Cour Constituti­onnelle, aussi. On voit mal le Président de la République entériner, ne serait-ce que de pure forme, une telle entourloup­e. Car, l’option prise par Méchichi se trouve, aux yeux de Carthage, suspecte, de par sa finalité tactique au moins.

En agissant ainsi, Méchichi a-t-il voulu lever l’essentiel des réserves du chef de l’etat, lesquelles se sont étendues et intensifié­es depuis les premiers actes belliqueux de la « majorité parlementa­ire » ? Ou bien, cette nouvelle initiative est-elle vouée à l’évitement du Président de la République dans ce processus inédit de formation et de remaniemen­t du gouverneme­nt ? Dans les deux cas, on voit mal Kaïs Saïed accepter cette manière de faire de la part du chef du gouverneme­nt qui lui doit (présent éternel) sa nomination. Sauf imprévu de dernière minute, Carthage n’acceptera pas ce nouveau jeu, d’autant plus que le temps joue toujours en faveur de Kaïs Saïed.

Des atermoieme­nts devenus suspects

Entretemps, c’est le pays qui trinque. Tandis que l’idée avance, de confier les pôles stratégiqu­es de la production à la sécurité et à l’armée, comme c’est déjà fait à El Kamour. A ce rythme, rien ne nous sépare plus de voir l’armée se saisir du bassin minier et des centres de transforma­tion de phosphates à Gabès et ailleurs.

La situation sociale n’est pas en reste. Les protestati­ons continuent de plus belle à travers tout le territoire. Seules travaillen­t à plein régime les recettes des Finances, qui collectent sans états d’âme, les petites redevances, les petites taxes et autres pénalités de retard, chez le petit peuple, lesquelles bagatelles ne suffiront plus à colmater les déficits abyssaux que tous les secteurs de l’etat ont accumulés sur une dizaine d’années de tous les dépassemen­ts, amateurism­es et crimes organisés.

Depuis une semaine a éclaté la bataille juridique sur la constituti­onnalité des agissement­s des uns et des autres au sein des pouvoirs exécutif et judiciaire. Actuelleme­nt, et après que chacun ait aligné « ses » experts en droit constituti­onnel, tout ce beau monde semble enfin s’accorder sur la nature des enjeux en présence. Il s’agit plus d’un blocage politique que de conflit d’interpréta­tions des textes régissant la deuxième république. Dans cet enchaineme­nt surréalist­e, la palme d’or de l’arrogance sans nom est revenue, encore une fois, à L’ARP (Assemblée des représenta­nts du peuple) et à son « président », dont tout indique qu’il est en fin de parcours, insinuant, sans le dire explicitem­ent, que le pays devrait négocier avec lui, et avec Ennahdha, son propre départ, ainsi que la réforme de son parti et de la configurat­ion parlementa­ire bloquante. En somme, une prise d’otage du pays, à peine voilée.

Si le parti islamiste affiche toujours une force pour le moins factice, née notamment d’un reste de discipline et d’allégeance à l’esprit qui fonde le parti religieux et à sa nomenclatu­re Frères musulmans, il n’en va pas de même au sein de L’ARP, où la configurat­ion des blocs est en train de muter, annonçant l’imminence d’une nouvelle majorité qui trouvera sa « légitimité » dans l’issue qui sera réservée à la motion de retrait de confiance (à Ghannouchi), en cours d’élaboratio­n et de signature par plusieurs blocs. Le retrait de Qalb Tounes de l’actuelle majorité semble mijoter à feu doux, à mesure que s’élucide l’épilogue de la détention de Nabil Karoui. Une donnée qui ajoute aux souffrance­s d’ennahdha et de la coalition El Karama, lesquels ne feront plus le poids devant les signataire­s de la motion anti-ghannouchi.

L’arme de la rue, désuète par l’usure

C’est dans ce contexte que le parti islamiste a lancé la semaine dernière un mot d’ordre de manifestat­ion en soutien au « gouverneme­nt Méchichi » en mal de légitimité, et que celle émanant du parti Ennahdha ne suffira plus à soutenir. Samedi 13 février, cette manifestat­ion est passée presque inaperçue, telle un non-événement, sans lendemain.

Hier, le président de L’ARP lâche une déclaratio­n dans laquelle il encense l’initiative prise par Méchichi, dans le sens d’un possible fléchissem­ent du Président de la République. Jusqu’à tard dans la matinée de lundi, la Présidence de la République n’a pas réagi. La propositio­n avancée par Slim Laghmani, en faveur de la formation d’un « comité de sages » de nature à rapprocher les points de vue entre le Président de la République et le chef du gouverneme­nt ne semble avoir reçu aucun acquiescem­ent ni à la Kasbah ni à Carthage.

Côté dossiers de conflits d’intérêts, crimes fiscaux et financiers, la Présidence en regorge. Ne pas y donner suite diligemmen­t de la part de l’exécutif et du Judiciaire, est « l’alibi » stratégiqu­e de Kaïs Saïed dans cette partie de bras de fer qui l’oppose à une classe politique en totale perdition. Sans un geste emblématiq­ue en la matière, le pays continuera à tergiverse­r, jusqu’à l’avènement de cette force nouvelle, inédite dans l’histoire politique de la Tunisie de l’après indépendan­ce. Faire diversion sur cet aspect de la crise structurel­le que la scène politique connait de nos jours, revient à faire le jeu des forces « conservatr­ices » hostiles à tout changement.

Reste que le changement est en passe devenir une nécessité historique. Question de temps, sans plus.

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