Le Temps (Tunisia)

Tranches de vies

- Lotfi BEN KHELIFA

Le second roman de l’auteure tunisienne Habiba Meherzi est intitulé: « Saboû laftet » (Sept regards), paru en 2021 en 257 pages et dédié à chaque femme lésée et à chaque homme qui croit qu’aucune différence n’existe entre elle et lui, sauf que cette femme accouche le monde et l’éduque avec lui.

Habiba Meherzi annonce ainsi la couleur pour narrer à travers ce roman le résultat de la gestation d’une période différente des autres, celle des années quatre vingt du siècle dernier avec ses événements politiques, sociaux et ses mouvements intellectu­els. Cette période douce - amer avait prédit ce qui allait advenir durant les périodes suivantes. Le roman est constitué de trente sept chapitres. Dès le premier chapitre, nous sommes à l’intérieur d’une habitation au coeur de la ville de Kairouan un certain 26 janvier 1978, le « Jeudi noir. » On se rend compte que cette journée n’avait pas intéressé seulement la capitale. Le remue-ménage qui y règne est rapporté avec un style descriptif bien ciselé où la tension est crescendo. Dans la rue règne la pagaille. Et sans raconter la suite, voire les détails de cette histoire vraie et à mesure qu’on avance dans la lecture de ce roman réaliste, on y reste attaché de chapitre en chapitre. L’auteure nous tient avec une histoire incroyable mais véridique. Il s’agit de sa propre histoire depuis l’année du baccalauré­at à Kairouan où elle y réussit et arrive à Tunis pour étudier à la faculté des lettres du 9 avril. Des membres de sa famille étaient contre son déplacemen­t à Tunis. Car selon eux, elle devrait rester à Kairouan pour exercer le métier d’institutri­ce afin de ne pas déshonorer la famille ! Elle va se trouver dans une nouvelle vie dans la capitale où elle habite au foyer universita­ire avec toutes les embûches et risques encourus. De la narration subjective, surgit une histoire objective qui tient ses tenants et aboutissan­ts de faits vécus par l’écrivaine. Dans la foulée des mouvements de contestati­on des étudiants contre le régime politique, de multiples confrontat­ions avec la police interpelle­nt l’héroïne de l’histoire. Elle feigne se retrouver sous les verrous, bien qu’elle n’ait pas participé réellement aux manifestat­ions. D’autre part, les détails des épisodes pas du tout enviables de ses collègues étudiantes sont également rapportés tels que racontés par ces dernières. Des calvaires en somme. L’auteure Habiba Meherzi insiste un peu trop sur les détails des histoires qu’elle nous raconte : celles de sa propre personne, ainsi que celles de ses amis étudiantes. Elle nous fait entrer directemen­t dans le vif du sujet de sa vie d’étudiante entre Kairouan et Tunis. Ses nombreux calvaires ne sont pas en reste. Et bien que cette histoire soit tragique, voire catastroph­ique, l’espoir de meilleurs lendemains sont nourris par la romancière.

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia