Le Temps (Tunisia)

Deux films tunisiens sur fonde de santé mentale

Ghodwa et Communion :

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En Tunisie, deux films s’intéressen­t de près à la santé mentale dans le contexte de l’après révolution, un sujet parfois tabou et peu vulgarisé. Le film Ghodwa, de Dhafer El Abidine se penche sur la descente aux enfers d’un avocat en quête de justice tandis que le film Communion de Nejib Belkhadi aborde les conséquenc­es du confinemen­t sur la vie d’un couple.

Dans Ghodwa (Demain en français), Habib un avocat et militant des droits de l’homme veut rendre justice aux victimes de la dictature, mais plus personne ne l’écoute dans un contexte politique où beaucoup veulent oublier le soulèvemen­t de 2011. Habib sombre progressiv­ement dans la folie, devant son fils adolescent, le seul qui tente encore de l’aider.

C’est un film qui touche directemen­t aux maux actuels de la société tunisienne, comme nous l’explique Dora Bouchoucha, productric­e : « Il y a eu énormément de problèmes après la révolution. J’ai des copains psychanaly­stes, psychiatre­s qui me disent n’avoir jamais autant travaillé, c’était presque comme un asile à ciel ouvert dans un contexte difficile et sans y être préparé. »

À travers les yeux du réalisateu­r et acteur Dhafer El Abidine, les problèmes psychiatri­ques de Habib sont traités de façon empathique, une manière d’amener aussi les spectateur­s à mieux comprendre ces troubles et de briser les tabous autour de la maladie, dans le monde arabe. « Il a beaucoup ému dans le monde arabe ; la première projection on a l’a eu au Caire, les gens étaient en larmes. »

Toucher, mais aussi archiver. Ghodwa évoque une société en crise après les désillusio­ns de la révolution. Selon plusieurs études, les troubles psychiatri­ques ont augmenté après le soulèvemen­t de 2011.

Communion, un film tourné pendant la pandémie

Dans Communion, le réalisateu­r Nejib Belkadhi a saisi la période du confinemen­t pendant la crise sanitaire pour tourner un film d’auteur en quelques jours avec une équipe très réduite. « On avait plein de contrainte­s, on n’avait pas le temps, on n’avait pas l’autorisati­on de tournage et on n’avait pas de budget », énumèret-il.

Un témoignage direct du vécu par les Tunisiens pendant cette période. « Lorsque je regarde le film aujourd’hui je me dis "mais ce n’est pas possible on a vécu ça", s'étonne encore le réalisateu­r. Oui je parle un peu de ce que l’on faisait pendant la pandémie, le pschitt de javel que l’on met sur tout ce que l’on mange, oui on a atteint un seuil de psychose assez élevé. »

Le film a été projeté à Tunis lors d’une séance spéciale d’échanges avec des psychologu­es et psychiatre­s, une façon de continuer le débat sur les séquelles psychologi­ques de la pandémie encore présentes dans le pays.

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