Ridha Zahrouni Président de l’association Tunisienne des Parents et des Elèves : « On ne peut pas lire et écrire sans une maîtrise de la langue avec laquelle les matières sont enseignées »
Des pistes de réflexions sont nécessaires pour rehausser le niveau des apprenants en langues. Le redressement de l’enseignement des langues doit être fait en parfaite symbiose avec la révision totale des programmes. Donc, il est impératif de consolider le statut des langues dans notre enseignement. De plus, il faut même envisager un programme assez corseté pour la formation continue de nos professeurs en exercice. Les méthodes anciennes de l’enseignement des langues ont beaucoup évolué et toute une panoplie de sciences a émergé pour renforcer la compétence expressive des apprenants d’une langue. A travers ce point de vue, nous interpellons les opérateurs pédagogiques pour qu’ils agissent en conséquence avant qu’il ne soit trop tard. Dans un pays multilingue et multiculturel comme la Tunisie, chaque langue a sa place logique et naturelle, et chaque langue a sa fonction. Il est temps que chaque langue retrouve sa place
On a bien dégagé qu’en moyenne un Tunisien sur deux a un niveau scolaire qui ne dépasse pas le primaire, que seulement un Tunisien sur huit a suivi un enseignement supérieur et qu’un Tunisien sur vingt est analphabète. Les causes principales à imputer à ce désastre sont intimement liées, mais toujours annoncées discrètement par les responsables tunisiens, à savoir la faible maîtrise par nos apprenants des langues, et spécialement le français et l’anglais. Un désastre qui a été amorcé dès l’entrée en vigueur de la réforme décidée en 1991 -cité souvent comme la réforme du ministre de l’éducation Mohamed Charfi par la loi N°91-65 du 29 juillet 1991, relative au système éducatif qui a introduit le concept de l’enseignement de base obligatoire de neuf ans en deux étapes (article 8), désignées par la suite comme phases primaire de six ans et préparatoire de trois ans, durant lesquelles toutes les matières concernant les humanités, les sciences et les techniques doivent être enseignées en arabe (article 9). La durée de l’enseignement secondaire est désormais réduite de sept à quatre années (article 11).
Pour ceux qui s’intéressent de près à la réalité inquiétante de l'école tunisienne et aux moyens de la sauver, car il faut l’avouer notre système éducatif connaît de difficultés, il devrait s’arrêter sur trois indicateurs très significatifs sur son état, aujourd’hui tous au rouge. A savoir le nombre de décrocheurs parmi nos enfants, une moyenne de 100 milles élèves par ans, le taux de réussite au bac parmi les bacheliers de la même classe d’âge qui est de 15 % au maximum, et le nombre de bacheliers qui ont choisi l’année dernière la section des mathématiques qui est de 6 %. Des chiffres qu’on peut facilement vérifier et corréler à partir des statistiques relatives au niveau de scolarité des tunisiens constatées lors du recensement national de la population et de l’habitat de 2014.
En effet, on a bien dégagé qu’en moyenne un Tunisien sur deux a un niveau scolaire qui ne dépasse pas le primaire, que seulement un Tunisien sur huit a suivi un enseignement supérieur et qu’untunisien sur vingt est analphabète. Les causes principales à imputer à ce désastre sont intimement liées, mais toujours annoncées discrètement par les responsables tunisiens, à savoir la faible maîtrise par nos apprenants des langues, et spécialement le français et l’anglais. Un désastre qui a été amorcé dès l’entrée en vigueur de la réforme décidée en 1991 -cite souvent comme la réforme du ministre de l’éducation Mohamed Charfi par la loi N°91-65 du 29 juillet 1991, relative au système éducatif qui a introduit le concept de l’enseignement de base obligatoire de neuf ans en deux étapes (article 8), désignées par la suite comme phases primaire de six ans et préparatoire de trois ans, durant lesquelles toutes les matières concernant les humanités, les sciences et les techniques doivent être enseignées en arabe (article 9). La durée de l’enseignement secondaire est désormais réduite de sept à quatre années (article 11).
Comment on peut envisager ou espérer, que nos enfants puissent réussir leurs parcours scolaires quand l’école trouve d’énormes difficultés à leur apprendre à lire, à écrire et à compter aussi bien en arabe qu’en français, quand on sait que la maîtrise des matières scientifiques est intimement liée à la maîtrise de la langue avec laquelle les matières sont enseignées ? On ne peut que juger irresponsable, voire même, condamnable, la décision de maintenir l’enseignement des mathématiques, des sciences physiques et des sciences en langue arabe au cours de la phase préparatoire de trois années, pour changer ensuite au français lors de la phase secondaire de quatre années. Une décision prise depuis trois décennies pour des considérations politiques et idéologiques, sous le sceau de la souveraineté nationale ; qui reste à ce jour, fortement préjudiciable de point de vue pédagogique. Alors qu’avant cette réforme les matières scientifiques étaient enseignées en français tout le long de la phase secondaire qui durait sept années. Une décision qui prive nos élèves d’un temps scolaire considérable dont ils ont fortement besoin, au même titre que leurs enseignants. Sans compter la limitation de leurs chances de réussite en les empêchant d’améliorer leur maîtrise à la fois du français et des matières scientifiques enseignées dans cette langue. Aujourd’hui, il faudrait que ceux qui décident de l’avenir de notre école procèdent, sans délai, à l’unification de la langue d’enseignement des matières scientifiques et techniques tout le long des phases préparatoire et secondaire. Néanmoins, ils doivent être conscient que mettre notre système éducatif sur la voie d’arabisation de toutes les matières, ou décider que l’anglais devienne la deuxième langue du pays est une entreprise majeure, très risquée et nécessite des moyens énormes et un investissement considérable pour la formation des enseignants, la traduction des références et la reconversion de tout notre héritage culturel. Elle nécessite également des stratégies très compliquées à mettre en oeuvre alors qu’aujourd’hui, et après 66 années d’indépendance, nous peinons encore à faire apprendre à nos enfants à bien lire, écrire et parler aussi bien l’arabe et que le français.
Il ne faut pas qu’ils ignorent que le choix de la langue doit être uniquement motivé par des considérations pédagogiques, par la projection future de son emploi lors des phases de l’enseignement supérieur et de formation professionnelle, que ce soit en Tunisie ou à l’étranger. Il est à rappeler dans ce cadre que des spécialités scientifiques et techniques : de médecine, de pharmacie, d’ingéniorat et même des sciences sociales, humaines et juridiques sont encore administrées en Tunisie, en grande partie, en langue française. Et le citoyen n’est pas plus ou moins arabe, tunisien, ou musulman suivant qu’il parle parfaitement ou non sa langue maternelle. C’est un argument à la fois péjoratif, discriminatoire et même contraire aux principes des droits de l’homme. Pour les adeptes de l’élargissement de l’emploi de l’anglais dans notre école et d’en faire la deuxième langue du pays, ils réfléchissent sérieusement aux conséquences, aux coûts, aux bénéfices et aux chances de réussite de cette entreprise. Il faut juste croire qu’enseigner une langue est à la portée, si la volonté politique y est, car tout est affaire de politique, il faudrait juste réserver les moyens et le temps nécessaires.