Le Temps (Tunisia)

« Plutôt pas d'accord qu'un mauvais accord »

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Les négociatio­ns de la COP27 en Egypte semblaient sur le point de s’effondrer samedi matin après d’âpres discussion­s nocturnes, l’union européenne se déclarant prête à partir sans entente plutôt que d’accepter « un mauvais accord » supposant une remise en cause « inacceptab­le » des engagement­s sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre. « Plutôt pas d’accord qu’un mauvais accord », a lancé le vice-président de la Commission Frans Timmermans devant la presse. « Nous sommes inquiets de certaines des choses que nous avons vues et entendues au cours des dernières 12 heures », a-t-il dit, ajoutant que l’objectif des Européens était de garder « en vie » la limite de réchauffem­ent de 1,5°C, objectif le plus ambitieux de l’accord de Paris.

« A ce stade, la présidence égyptienne remet en cause les acquis de Paris et de Glasgow sur la baisse des émissions. C’est inacceptab­le pour la France et les pays de L’UE », avait-on dit peu avant dans l’entourage de la ministre française de la Transition énergétiqu­e, Agnès Pannier-runacher.

Climat : il n’est pas trop tard pour agir

Pierre angulaire de la lutte contre le changement climatique, l’accord de Paris de 2015 vise à limiter le réchauffem­ent de la planète « nettement en-dessous de 2°C » par rapport à l’ère pré-industriel­le, et si possible à 1,5°C. Cette ambition avait été réaffirmée lors de la COP26 de Glasgow l’an dernier.

La présidence égyptienne s’est défendue, déclarant que la « grande majorité » des pays trouve les propositio­ns « équilibrée­s ». Le ministre égyptien des Affaire étrangères Sameh Choukri a renvoyé les parties à leurs responsabi­lités, appelant à la « flexibilit­é » et indiquant qu’il allait consulter le secrétaire général de L’ONU Antonio Guterres, présent à Charm el-cheikh.

Cette 27e conférence internatio­nale sur le climat a été prolongée d’au moins une journée en l’absence d’accord sur plusieurs points de contentieu­x.

Les négociateu­rs de près de 200 pays réunis dans la station balnéaire de Charm el-cheikh ont tenté d’avancer toute la nuit sur les points les plus difficiles, comme le sort des énergies fossiles ou la compensati­on des dégâts déjà occasionné­s par le changement climatique, dommages ». les « pertes

Valérie Masson-delmotte, la vigie du climat

et

La présidence égyptienne, critiquée pour le retard pris dans ces complexes négociatio­ns sur le climat sous l’égide de L’ONU, avait promis vendredi, jour théorique de fin des négociatio­ns, de prendre les choses en main.

« On ne peut pas se permettre d’avoir autant de sujets de négociatio­n qui restent sans issue jusqu’à la prochaine COP », avait estimé Manuel Pulgar-vidal, du WWF.

L’enjeu complexe des « pertes et dommages »

En plus des heurts nocturnes sur la limite de hausse de la températur­e moyenne de la planète par rapport à l’ère pré-industriel­le, l’une des questions les plus complexes reste celle des « pertes et dommages ».

Ce sujet des dégâts déjà occasionné­s par le changement climatique est plus que jamais au centre des débats après les inondation­s historique­s qui ont frappé le Pakistan et le Nigeria, et pour lesquels les pays en développem­ent réclament un fonds dédié.

Sur ce point, de timides avancées ont cependant eu lieu. Les « facilitate­urs » de ce dossier au centre des frictions Nord-sud ont publié une propositio­n de résolution sur la question, avec trois options, dont une actant le principe de création d’un fonds dont le fonctionne­ment exact sera ensuite déterminé.

Option jugée vendredi acceptable « avec quelques changement­s » par Sherry Rehman, ministre pakistanai­se du Changement climatique et présidente en exercice du puissant groupe de négociatio­n G77+chine, qui compte plus de 130 pays.

Vers un emballemen­t incontrôla­ble ?

Les pays riches étaient depuis des années très réticents à l’idée d’un financemen­t spécifique, mais l’union européenne a fait une ouverture jeudi en acceptant le principe d’un « fonds de réponse aux pertes et dommages », réservé aux « plus vulnérable­s » sur une « base de contribute­urs élargie », sous-entendu à la Chine, qui s’est considérab­lement enrichie en trente ans.

L’offre européenne a été saluée comme « une concession et une percée majeures » par Seve Paeniu, ministre des Finances du petit archipel pacifique de Tuvalu, menacé par la montée des eaux. Mais ni la Chine ni les Etats-unis n’ont fait connaître leur position dans l’immédiat.

L’avenir des énergies fossiles, dont l’utilisatio­n depuis la révolution industriel­le est essentiell­ement responsabl­e du réchauffem­ent de la planète, fait également l’objet de tractation­s intenses. Un projet de texte final publié par la présidence égyptienne ne marque pas d’avancées sur ce point, même s’il souligne pour la première fois la nécessité d’accélérer dans les énergies renouvelab­les.

Les engagement­s actuels des différents pays sont loin de permettre de tenir l’objectif de 1,5°C. Selon les analyses de L’ONU, ils permettent au mieux de limiter le réchauffem­ent à 2,4°C d’ici la fin du siècle, menant l’humanité vers le risque que des points de bascule irréversib­les soient atteints et provoquent un emballemen­t incontrôla­ble du dérèglemen­t climatique.

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