Beaucoup d’entraves et côté emploi, ce n’est pas la joie…
Droits des personnes handicapées en Tunisie :
Le Comité des droits des personnes handicapées du Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH) tient, jusqu'au 24 mars, les travaux de sa vingt-huitième session, et ce, à Genève (Suisse). Les rapports de cinq pays sont à l'examen : l'angola, la Géorgie, l'argentine, le Pérou, le Togo, et la Tunisie. Malgré des efforts certains, notre pays est loin de tenir ses
Rappelons que notre pays a signé la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CRPD, du 13 décembre 2006), le 30 mars 2007 et l'a ratifiée le 2 avril 2008. Il a accepté le protocole facultatif ainsi que la procédure d'enquête se rapportant à la CRPD et par-là même les procédures de plaintes individuelles, et ce, le 2 avril 2008.
Les principaux généraux de la CRPD sont le respect de la dignité intrinsèque, de l'autonomie individuelle, y compris la liberté de faire ses propres choix, et de l'indépendance des personnes ; la non-discrimination ; la participation et l'intégration pleines et effectives à la société ; le respect de la différence et l'acceptation des personnes handicapées comme faisant partie de la diversité humaine et de l'humanité ; l'égalité des chances ; l'accessibilité ; l'égalité entre les hommes et les femmes ; et le respect du développement des capacités de l'enfant handicapé et le respect du droit des enfants handicapés à préserver leur identité.
Selon L'ONU, par personnes handicapées on entend des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l'interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l'égalité avec les autres. Selon l’organisation Mondiale de la Santé (OMS), est handicapée toute personne dont l'intégrité physique ou mentale est passagèrement ou définitivement diminuée, soit congénitalement, soit sous l'effet de l'âge ou d'un accident, en sorte que son autonomie, son aptitude à fréquenter l’école ou à occuper un emploi s'en trouvent compromises. Il existe, donc, différents types de handicaps, certains visibles et d'autres non.
Etre handicapé, un handicap !
Dans le dossier de notre pays auprès du Comité des droits des personnes handicapées, se trouve, également, la contribution de notre société civile, représentée par l'association Tunisie Terre des Hommes, l'association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), et IBSAR (association pour l'intégration des non et mal voyants dans les domaines des loisirs, de la vie culturelle, intellectuelle et artistique).
Dans ce document, présentée à Genève en 2020, l'on peut lire que les personnes handicapées, dans leur vie de tous les jours, sont loin de bénéficier d'une jouissance effective de leurs droits fondamentaux, voire même de bénéficier des prestations et services tels qu’accordé dans la législation interne. Cette catégorie de la population du fait qu'elle évolue dans un environnement qui ignore les conséquences de leurs handicaps sont souvent marginalisées voire même objet de discriminations , que cette discrimination soit consciente ou non. Les personnes handicapées rencontrent de nombreux obstacles physiques, techniques, sociaux et surtout culturelles qui les empêchent de jouir pleinement de leurs droits. Les violations des droits de l’homme dont sont victimes les personnes handicapées, les plus observés sont des discriminations indirectes, elles se traduisent le plus souvent par la création ou le maintien d’obstacles qui les engagements envers les personnes handicapées. Le Comité des droits des personnes handicapées du HCDH examine, jusqu'au 24 mars, les rapports de cinq pays dont la Tunisie. Le comité devait étudier le rapport de notre pays daté de 2018 et reçu le 4 septembre de la même année. Notons qu'un dialogue (public) avec la Tunisie aura lieu les lundi 13 et mardi 14 mars. empêchent d’accéder aux services les plus élémentaires et de par la même leur participation sur un pied d'égalité à la vie sociale, économique et politique du pays.
Le document a mis l'accent sur certaines difficultés que rencontrent les personnes en situation de handicap. Ainsi, et par exemple, 95 % des autobus ainsi que la majeur partie des métros leur sont inaccessibles, sans demander l'aide d'autrui, les infrastructure construite par le ministère de l’équipement, à savoir routes, trottoirs, ponts à piétons ne prennent aucunement compte des normes d'aménagement raisonnable, et rendent très difficile, voire impossible le déplacement des personnes handicapées, les sites Web des administrations publiques ne répondent pas aux normes de l'accessibilité numérique ce qui oblige les personnes handicapées à recourir à un tiers ou à ce déplacé avec toutes les difficultés de déplacements et d'accès aux services concernés qui en résultent.
En 2020, il existait plus 400 bibliothèques publiques répartie sur tout le territoire et seules 8 d’entre elles ont reçu l'équipement nécessaire (livres en braille et audios).
Des insuffisances
Lors des résultats du recensement général de la population et de l'habitat de 2014, 241.240 personnes étaient en situation de handicap, soit 2,2 % de la population totale : 106.934 (44,3 %) avaient quelques difficultés, 89.847 (37,2 %) de grandes difficultés, et 44.459 (18,5 %) une incapacité sévère.
Le document collectif de Tunisie Terre des Hommes, L'ATFD, et IBSAR fait état de 2,4 % de la population sont porteurs de handicap : entre 60 mille et 70 mille nonvoyants et malvoyants, 60 mille et 70 mille sourds-muets et mal- intendants, 50 mille à 60 mille handicapés physiques divers et le reste représente les handicapés mentaux, les polyhandicapés et les handicapés invisibles.
Selon le MICS6 (enquête par grappes à indicateurs multiples) 2018 et publié en 2019, 3,3 % des jeunes enfants de 2 à 4 ans et 23,7 % des enfants de 5 à 17 ans ont au moins une difficulté fonctionnelle, 11,7 % des enfants de 2 à 17 ans portent des lunettes et 3% ont de difficultés de vue, 1 % des enfants de 2 à 17 ans utilisent une aide auditive alors que 8 % ont des difficultés à
entendre, 3,3 % des enfants de 2 à 17 ans utilisent un équipement ou reçoivent de l'assistance pour marcher alors que 6,9 % d’entre eux continuent malgré cette assistance à marcher difficilement. Cette enquête a également noté que notre pays compte 336 écoles accueillant près de 1.500 enfants handicapés, 200 classes préparatoires, 40 collèges, et 343 centres spécialisés, précisant que le nombre d'élèves handicapés intégrés au système scolaire reste très limité et la formation des enseignants insuffisante.
Faire face aux manquements
Le rapport «Discriminations et inégalités en Tunisie», rapport des parties prenantes soumis à l'examen périodique universel de la Tunisie (4e cycle-2022) a souligné que notre pays a reçu et accepté les recommandations relatives à la nécessité des statistiques claires, fiables et utilisables et que malgré les chiffres fournis par l'institut National de la Statistique (INS) en matière de handicap et les statistiques du ministère de l’education, qui présentent la répartition des élèves ayant un handicap selon le genre, le type de handicap et le gouvernorat dans l’année scolaire 2020/2021, il n'y a toujours pas de données quantitatives correctement exploitables sur le handicap chez nous, ajoutant que les statistiques fournis par le ministère de l'education ne sont pas ventilées selon l'âge, le pourcentage des élèves ayant un handicap par rapports aux autres élèves et le pourcentage de réussite et d’échec scolaire parmi cette catégorie.
D'autre part, il a été noté qu'aucune statistique relative à la situation des personnes handicapées durant la crise Covid19 n’a été fournie (hospitalisation, confinement, refus de prise en charge, etc.). La Tunisie a accepté la recommandation 125.45 de poursuivre ses efforts en vue d’améliorer les conditions de vie des personnes handicapées.
Côté emplois, ce n'est pas la joie
En 2020, selon ce rapport qui reprend des données de L'ANETI, le taux de chômage des personnes handicapées s'élevait à 40 % ; le rapport ajoutant qu'aucune politique globale et coordonnée n'a été mise en place pour remédier cette situation et que peu de données sont rendues publiques pour vérifier l'application des quotas de 2 % consacré au recrutement des personnes handicapées dans le secteur public et dans toutes les entreprises publiques et privées qui comptent plus que 100 employés.
Dans l'examen Périodique Universel (EPU) 2022 du rapport de l'équipe pays des Nations Unies en Tunisie, dans son quatrième cycle, publié en mars 2022, il a été rappelé que notre pays s'est engagé à promouvoir les droits fondamentaux des personnes handicapées dans tous les domaines, mais que toutefois, la loi 2005-83 reste non conforme à la Convention relative aux droits des personnes handicapées.
Concernant le droit au travail, l'examen a rappelé que la loi 2020-38, dans son article 4, prescrit au moins 5 % des recrutements annuels dans la fonction publique pour les personnes handicapées, mais que ces dispositions ne sont pas appliquées à cause des déficits budgétaires.