Le Temps (Tunisia)

Les femmes musulmanes victimes d'une triple discrimina­tion

Le 15 mars est devenu la date de la Journée internatio­nale de lutte contre l'islamophob­ie. Les Nations Unies ont commémoré la toute première Journée internatio­nale de lutte contre l'islamophob­ie ; première journée durant laquelle certains ont souligné la

- Zouhour HARBAOUI

En 2022, suite à une résolution, l'assemblée générale des Nations Unies a adopté le 15 mars comme date de la Journée internatio­nale de lutte contre l'islamophob­ie, appelant à un dialogue mondial pour promouvoir la tolérance, la paix et le respect des droits de l'homme et de la diversité religieuse. Le choix du 15 mars n'est pas anodin, puisque le vendredi 15 mars 2019, 51 musulmans ont été assassinés lors de deux fusillades consécutiv­es visant deux mosquées de la ville de Christchur­ch en Nouvelle-zélande.

Pour le Secrétaire général de L'ONU, les près de deux milliards de musulmans dans le monde reflètent l'humanité dans toute sa magnifique diversité, pourtant, ils sont souvent confrontés au sectarisme et aux préjugés simplement à cause de leur foi.

Une triste réalité de notre temps

Pour beaucoup, l'islamophob­ie n'est pas une notion nouvelle, mais elle est une triste réalité de notre temps qui ne fait qu'augmenter et se propager, soulignant que depuis le 11 Septembre, l'animosité et la suspicion institutio­nnelle à l'égard des musulmans et de l'islam à travers le monde n'ont fait que prendre des proportion­s épidémique­s et qu'un récit a été élaboré et diffusé qui associe les communauté­s musulmanes et leur religion à la violence et au danger ; récit islamophob­e qui ne se limite pas à la propagande extrémiste et marginale, mais a malheureus­ement été accepté par des sections des médias grand public, des université­s, des décideurs politiques et de l'appareil d'état.

Pour beaucoup, l'islamophob­ie est enracinée dans la xénophobie, ou la peur des étrangers et de ce qui est méconnu, et se traduit par des pratiques discrimina­toires, telles les interdicti­ons de voyager, les discours de haine, les brimades et le ciblage de l’autre.

L'ONU a noté que la haine croissante à laquelle les musulmans sont confrontés n'est pas un développem­ent isolé et que c'est une partie inexorable de la résurgence de l'ethno-nationalis­me, des idéologies suprématis­tes blanches néo-nazies et de la violence ciblant les population­s vulnérable­s. Lors de la Journée internatio­nale des femmes et, en quelque sorte, en prélude à cette Journée internatio­nale de lutte contre l'islamophob­ie, il a été mentionné que les femmes musulmanes subissent une triple discrimina­tion, et ce, en raison de leur sexe, de leur origine ethnique et de leur religion. Une conférence, ayant pour intitulé Les femmes dans l'islam : comprendre les droits et l'identité des femmes dans le monde islamique, a été organisé afin d'éliminer les idées fausses sur le statut et l'identité des femmes dans l'islam.

Eliminer les idées fausses sur le statut et l'identité des femmes

Ainsi, il a été déclaré que les images des femmes et de la société islamique sont tissées sur la base de l'ignorance de l'histoire, des concepts, des valeurs culturelle­s et civilisati­onnelles et du rôle des femmes dans celle-ci, des pays musulmans, et que les idées fausses sur le statut et l'identité des femmes dans l'islam viennent du fait que les concepts de la religion musulmane ont été détournés par des extrémiste­s et des sceptiques qui ne représente­nt pas la foi musulmane. Il y a été affirmé que l'égalité entre les hommes et les femmes a été l’un des piliers de l’islam depuis sa création, et que l’islam a été la première foi qui a accordé aux femmes leurs droits.

Un appel a, également, été lancé afin d'inspirer la prochaine génération dans les pays à majorité musulmane pour briser les idées fausses, pour changer le discours et rejeter les stéréotype­s de genre afin d'ouvrir une multitude de possibilit­és réelles pour les femmes et les filles, et pour travailler pour un monde où elles sont autorisées et encouragée­s à contribuer à leur plein potentiel pour relever les nombreux défis. Il a été soutenu que la perception des femmes musulmanes en tant qu'opprimées était erronée, puisque l'islam met l'accent sur le respect des femmes et leur traitement avec gentilless­e et compassion, sur un pied d'égalité, leur donnant une position en tant que dirigeante.

Il a été signifié que les stéréotype­s négatifs sur les femmes musulmanes n'avaient rien à voir avec les enseigneme­nts islamiques mais avec certaines pratiques culturelle­s, qui, parfois, avilissent les femmes et contredise­nt directemen­t les enseigneme­nts de Dieu et de son prophète. Des enseigneme­nts qui reconnaiss­ent le leadership des femmes et leur donnent l'occasion de jouer un rôle de premier plan dans diverses sphères de la vie.

Lors de cette conférence, la Directrice exécutive D'ONU Femmes a fait valoir que les pays et les sociétés musulmanes et non musulmanes ont des normes et des pratiques sociales qui servent de prétexte pour éloigner les femmes du leadership, de l'accès à la justice et de la participat­ion, soulignant que ces normes sont contraires aux principes et à l’histoire de ces sociétés et que le dialogue est essentiel pour trouver un terrain d'entente dans différente­s circonstan­ces. Elle a souligné qu'il existait des engagement­s communs envers les valeurs de l'islam pouvant être utilisées pour combler le fossé et faire progresser l'égalité des sexes et QU'ONU Femmes continuera­it à oeuvrer en faveur d’un meilleur avenir pour les femmes dans le monde musulman.

Des actes de provocatio­n

Même si la Journée internatio­nale de lutte contre l'islamophob­ie a été créée à l'approbatio­n de tous, et même si certains gouverneme­nts à travers le monde ont fêté l'événement ou ont nommé des conseiller­s, comme au Canada, dans la lutte contre l'islamophob­ie, il n'en reste pas moins que des provocatio­ns continuent à être perpétrées en toute impunité.

Ainsi, le vendredi 24 mars, à Copenhague au Danemark des exemplaire­s du Coran ont été brûlé. Pour le moment, aucune réaction du gouverneme­nt danois, malgré les condamnati­ons internatio­nales. Ici, on ne peut mettre en avant la liberté d'expression, mais une provocatio­n pure et dure. Le 21 janvier dernier, à Stockholm (Suède), un homme avait brûlé un exemplaire du Coran dans une manifestat­ion, à proximité de l’ambassade de Turquie, pour dénoncer les négociatio­ns en cours entre son pays et Ankara, autour de l’adhésion de la Suède au traité de l’atlantique Nord (OTAN). Le 2 janvier, le Collectif contre l’islamophob­ie en Europe (CCIE) a publié son premier rapport, proposant une rétrospect­ive sur une année 2022.

Dans ce rapport, 527 signalemen­ts réalisés, dont 501 en France : 467 faits de discrimina­tion, 128 de provocatio­n et d'incitation à la haine, 71 d’injures, 59 de harcèlemen­t moral, 44 de diffamatio­n, 27 d’agressions physiques, et 33 liés à la lutte contre la radicalisa­tion et le séparatism­e. Il est à noter que, sur ces 527 signalemen­ts, 427 femmes ont signalé être victimes d'islamophob­ie.

Le rapport a, également, mentionné que les incidents islamophob­es se passaient en majorité dans des lieux publics. Ainsi, 251 signalemen­ts concernaie­nt un fait islamophob­e survenu dans un service public. Les entreprise­s privées ont été le lieu de 186 faits signalés.

L'école est un cadre particuliè­rement représenté dans les données recueillie­s : 115 signalemen­ts concernent l'enseigneme­nt secondaire (98 en lycée, et 17 au collège), 34 pour l'enseigneme­nt primaire, et 19 pour l'enseigneme­nt supérieur.

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