Le Temps (Tunisia)

Une Dame du Théâtre arabe à l’honneur !

- Mona BEN GAMRA

Elle fait partie de cette génération d’artistes pas vraiment oubliés mais qu’on garde au fond d’une mémoire individuel­le et collective. A la télévision, ou au cinéma ou encore sur les planches du théâtre, on la retrouve à chaque fois, même regard de vampe, chevelure courte dégagée, large sourire balayant un visage qui a vécu, gestes sobres et même voix à la fois grave et cristallin­e qui cisèle les textes, qu’elle cale sur les mots telle une plume posée sur le sol par un souffle de vent.

L’enfant du Nil qui a toujours gardé intacte son amour pour les planches du 4ème, s'est produite sur les scènes les plus prestigieu­ses du monde arabe ramenant, à chaque fois avec elle, quelque chose des souvenirs des temps révolues d'un Egypte des arts et de la culture qui vit au rythme de ses grands bouleverse­ments politiques tout en s’ouvrant sur les cultures occidental­es. Les années yéyé, les évènements de mai 68, l’ascension de Jamal Abdennasse­r au pouvoir, etc … tout s’est mêlé pour faire de l’art égyptien un fait social total authentiqu­e mais qui a gardé un regard censé sur la modernité. Samiha Ayoub y a évolué et a cumulé les expérience­s depuis l’âge de14 ans notamment lorsqu’elle a fait cette heureuse rencontre avec les grands Zaki Toulaimat et Georges Abyadh lesquels l’ont propulsée au devant de la scène médiatique et artistique. Né sous la belle étoile qui sait faire d’elle un sujet d’amour et de gloire, Samiha Ayoub s’est mariée plusieurs fois avec des hommes du métier dont l’auteur dramatique de renom Saddeddine Wahba. Entre temps, elle a été appelée à diriger le Théâtre Moderne ainsi que le Théâtre national d’egypte. Elle a pendant ces temps-là (les années 70) interprété plusieurs rôles sur les scènes européenne­s et égyptienne­s, dont le personnage de Phèdre, la pièce de Racine, mise en scène par Jean-pierre Laruy, alors directeur du Centre dramatique du Limousin.

Samiha Ayoub a fait du théâtre brechtien, du théâtre classique, du vaudeville aussi ne lésinant jamais sur les genres et ne badinant jamais sur ses principes d’une artiste et d’une femme entière. Elle le croit et le dit dans ses diverses rencontres médiatique­s. Le théâtre brechtien, elle adore ! Brecht qui à lui seul a le mérite d’avoir mis les premiers prémices d’un théâtre moderne grâce à une esthétique qui instaure un rapport dialectiqu­e entre la scène et la salle, pour plus de liberté entre l’acteur et son public « J’espère un jour camper le rôle de « Mère courage » de Brecht et celui de « Mariana Pineda » de Garcia Lorca. » confie-telle un jour à un journalist­e dans une interview donnée à la télévision alors cathodique... Héroïnes aux élans tragiques, ces femmes qui ont bel et bien existé sont toutes à son image, dignes et portant les rêves de leurs nations consécutiv­es. Samiha Ayoub garde toujours le rêve de voir les théâtres et les artistes du monde arabe se rassembler et se rapprocher les uns des autres. De nobles idées qu’on croyait perdues et dont elle parle toujours avec cette constance et cette passion qui font plaisir à voir et à écouter.

Cette année, Les JTC 2021 rendent un vibrant hommage à l’egypte son pays et à elle, Samiha Ayoub, cette icône intemporel­le du cinéma et du théâtre qui a pu s’imposer au milieu d’une génération des années 70 et 80 laquelle comptait dans ses rangs Nabila Abid, Nadia Al Jondi , Souhir Ramzi ,etc. Et bien avant, elle a su incarner la belle époque du bouillonne­ment intellectu­el et artistique des années 60…

Instants de charme, de chaleur, partagés avec cette belle femme qui a toujours habillé la scène du 4ème art de son rare tempéramen­t d’actrice et de sa personnali­té jaillissan­te. N’hésitez pas à la connaître de près… Samiha Ayoub porte en elle les vibrations de ses premiers passages sur scène qu’elle vit comme une suite de haltes, un jour, un soir sur les planches du théâtre qu’elle affectionn­e tant et où elle a toujours aimé être.

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