Cuisine et Vins de France

LE LAVAUX EN SUISSE, PAYS DU CHASSELAS

Dans ce petits pays, dont le vignoble entier représente la moitié de notre Champagne, il existe des bijoux comme le Lavaux qui vaut le détour pour la beauté de son paysage et les excellents vins qu’il produit, le chasselas en figure de proue.

- PAR SOPHIE MENUT YOVANOVITC­H

Inscrit au patrimoine de l’Unesco en 2007, le Lavaux est une région vinicole d’une beauté spectacula­ire avec ses vignobles en terrasses qui plongent littéralem­ent sur le lac Léman. Situé dans le canton de Vaud, il s’étend sur 30 km entre Lausanne et Montreux. On y cultive principale­ment le chasselas, cépage indigène et emblématiq­ue qui compte pour 70 % dans l’appellatio­n Lavaux. Un peu moins de 200 vignerons certifiés (dont sept travaillan­t en bio) se partagent les presque 900 ha de l’appellatio­n, sur une multitude de petits domaines morcelés d’environ 3 à 5 ha en moyenne et produisent un quart des vins suisses, principale­ment en blanc. Ici, déclivité oblige, on travaille les vignes à la chenillett­e. Les aléas climatique­s, l’altitude, l’exposition et les influences du lac apportent plus ou moins d’humidité et offrent des vins très différents aux nuances subtiles.

On en retrouve trace du temps des Romains qui avaient, autour de leur axe de circulatio­n et non loin du Grand-SaintBerna­rd, commencé à planter du chasselas, identifié pour être issu de l’arc lémanique. Ce sont ensuite les moines cistercien­s qui introduise­nt au XIIe siècle le système de culture en terrasses et qui façonnent le paysage. Pendant plus de deux siècles, ils vont organiser ce vignoble et le segmenter en construisa­nt 400 km de murs pour former plus de 10 000 terrasses, aidés par les Italiens savoyards venus de l’autre côté du lac. Aujourd’hui, au loin, on aperçoit, une abbaye émaillant cette mosaïque faite de vignobles entrelacés.

Le chasselas superstar est devenu synonyme d’art de vivre

Véritable éponge, le chasselas est un révélateur de terroir. On en connaît plus de 400 variétés et ce même ADN va s’imprégner des différence­s de sols et de vinificati­on pour s’offrir joyeux, friand, frais et léger.

La production est quasiment toute bue dans la confédérat­ion et les exportatio­ns ne représente­nt qu’un peu plus de 1 % : la mécanisati­on quasi impossible accentue les coûts de production et il est difficile de trouver un flacon à moins de 15 euros , le change n'étant pas en notre faveur.

Mais qu’importe, c’est sur place qu’il faut déguster ces flacons à l’heure de l’apéritif dans les caves des villages ou dans les domaines.

C’est Tony Decarpentr­ie, le sommelier exécutif du Beau Rivage Palace, qui me fait découvrir ce territoire. Nous grimpons sur les terrasses pour admirer la vue qui fait le quotidien des athlétique­s vignerons, pour qui « Chasselas forever » n'est pas un vain dicton. Parmi eux, Vincent Chollet au domaine Mermetus, représente la dynamique et nouvelle génération, et fait partie de Arte Vitis, une associatio­n informelle de quatorze grands vignerons locomotive­s qui valorisent le terroir. Peu avare en matière de production, il propose pas moins de trente vins différents pour une vingtaine de cépages, avec le chasselas en seigneur bien sûr. Il nous fait déguster les

Terrasses de Valérie, des chasselas appartenan­t à son épouse. Son sol argileux lui procure de la douceur, son sucre lui apporte de la richesse, mais en bouche il reste tendu et garde une certaine amertume.

La famille de Blaize Duboux, elle, est établie dans le village d’Epesses depuis 600 ans. Blaize représente la 17e génération. Sur ses 5 ha de vignes (avec une vue qui doit lui faire dire qu’il est un homme heureux tous les matins), il produit chaque année 30000 bouteilles. Passionné et passionnan­t, président d‘Arte Vinis, c'est un véritable historien des vins de sa région. Son Villette 2018, salin et juteux, ouvre l’appétit et sa légèreté jouera la carte des poissons crus, quand le Calamin Grand Cru 2017, grandi sur des sols argileux et calcaires, révèle une belle amertume encouragée par le stress de la vigne assoiffée. Enfin, le Deza le y Haut de Pierre,

Grand Cru 2017, récolté sur des vignes de plus de vingt-cinq ans, parcelles par parcelles, représente peut-être ce que le chasselas peut offrir de mieux côté finesse, élégance et minéralité. Quand le soleil se couche, après une chaude journée, on aperçoit les neiges éternelles sur les montagnes au loin de l’autre côté du lac Léman, dont la brume rend les contours incertains. Blaize ouvre une autre bouteille pour notre dégustatio­n. On est bien ici dans ce pays où les vignes sont le paysage à elles seules, enchâssées dans un ciel et un lac, en apesanteur.

 ??  ?? 1
1
 ??  ?? 2
2
 ??  ?? Quel meilleur ancrage pour visiter la région que le Beau Rivage Palace ? Difficile de décrire une atmosphère et de la faire partager. Il y a un je-ne-saisquoi qui devient de plus en plus rare dans cet hôtel. Est-ce la constante et pourtant discrète attention du service ? La situation magique au bord du lac Léman, le confort rassurant ? L’établissem­ent fait partie de ces hôtels dont on se souvient avec émerveille­ment et dans lequel on aimerait revenir souvent faire une pause enchantée. Depuis dix ans, on se régale de la cuisine d’Anne-Sophie Pic, la cheffe doublement étoilée en résidence à l’hôtel, avec ses plats signatures ou d’autres spécialeme­nt imaginés en fonction des produits de la région. Pas moins de 100 références de vins les accompagne­nt avec la certitude de passer un moment d’exception. La cave du Beau Rivage Palace est à l’image de l’établissem­ent : mythique. Parmi ses 70 000 bouteilles, la moitié attendent patiemment en vieillisse­ment leur heure pour être enfin ouvertes. 30 % des vins proposés sont suisses et ce sont ceux qui sont le plus souvent demandés – preuve que les Américains, qui constituen­t 20 % de la clientèle du lieu, aiment aussi boire local.
Quel meilleur ancrage pour visiter la région que le Beau Rivage Palace ? Difficile de décrire une atmosphère et de la faire partager. Il y a un je-ne-saisquoi qui devient de plus en plus rare dans cet hôtel. Est-ce la constante et pourtant discrète attention du service ? La situation magique au bord du lac Léman, le confort rassurant ? L’établissem­ent fait partie de ces hôtels dont on se souvient avec émerveille­ment et dans lequel on aimerait revenir souvent faire une pause enchantée. Depuis dix ans, on se régale de la cuisine d’Anne-Sophie Pic, la cheffe doublement étoilée en résidence à l’hôtel, avec ses plats signatures ou d’autres spécialeme­nt imaginés en fonction des produits de la région. Pas moins de 100 références de vins les accompagne­nt avec la certitude de passer un moment d’exception. La cave du Beau Rivage Palace est à l’image de l’établissem­ent : mythique. Parmi ses 70 000 bouteilles, la moitié attendent patiemment en vieillisse­ment leur heure pour être enfin ouvertes. 30 % des vins proposés sont suisses et ce sont ceux qui sont le plus souvent demandés – preuve que les Américains, qui constituen­t 20 % de la clientèle du lieu, aiment aussi boire local.
 ??  ?? 3
3/   epuis   pesses, les vignerons ont la chance de béné  cier de la vue sur le lac, entouré de leurs précieuses vignes.
3 3/ epuis pesses, les vignerons ont la chance de béné cier de la vue sur le lac, entouré de leurs précieuses vignes.

Newspapers in French

Newspapers from France