DANS LES VIGNES
L’élite des vins du Mâconnais
COMME DES AVANCÉES DANS LE PAYSAGE, SIGNES DES TEMPS RECULÉS, SOLUTRÉ ET VERGISSON, LES ROCHES TUTÉLAIRES DU SUD BOURGUIGNON SONT LES PHARES QUI SIGNALENT LA PRÉSENCE D’UNE PRODUCTION DE QUALITÉ, MODERNE ET ABORDABLE, DANS LES VIGNES DE SAINT-VÉRAN ET POUILLY-FUISSÉ.
De là-haut, François Mitterrand, au terme de son ascension rituelle de la roche de Solutré, disait : « D’ici j’aperçois ce qui change et surtout je vois ce qui ne change pas. » De ce moutonnement des collines, le grand historien Fernand Braudel disait qu’il reflétait jusqu’aux confins du Morvan et au-delà « L’identité de la France ». On était dans les années 1980, le vignoble du Mâconnais s’éveillait aux grands vins. Aujourd’hui, presque trente ans plus tard, la reconnaissance en marche s’apprête à voir l’adoubement des vins de ces monts aux pieds des roches. Car elles sont deux : Solutré et Vergisson. Et sur les ossements de chevaux qui témoignent de la présence ancestrale des hommes de la préhistoire en ces lieux, des couches et des couches de calcaire ont fondé le terroir d’une paire de vignobles vertueux. D’un côté les pouillys. Et puis Saint-Véran ; amputé de son « d », le village fait rayonner son appellation sur les communes alentour. Saint-Véran et ses terroirs binaires, des calcaires et des terres rougies des oxydes de fer et, au milieu, chastement lovée entre les pentes douces du vignoble, Fuissé et ses vignes bordées sur les côtés de Loché et Vinzelles, les jumelles délicates dont la fortune n’a pas suivi celle de leur aînée.
La reconnaissance devrait tomber dès 2020 pour une trentaine de climats de pouilly-fuissé, suivi de saint-véran
Des titres noblesse bientôt gagnés
Communes vedettes, Fuissé et Saint-Véran coiffent de leur panache de raisin blanc l’ensemble des vins du Mâconnais. Ici, les blancs chardonnays ne rougissent plus devant les aristos du Nord, ceux de la Côte de Beaune classés depuis des lustres… eux ! Question d’histoire, d’hommes ou de querelles de clocher ; les vins du sud bourguignon, s’ils ont toujours eu la faveur d’un public, n’ont jamais été adoubés par un classement désormais inévitable. La reconnaissance devrait tomber dès 2020 pour une trentaine de climats de pouilly-fuissé – qui en compte 217 – et le dossier saint-véran suivra dans la foulée. Et ce, malgré quelques grincements de dents justifiés, car on regrette que d’excellentes parcelles aient été évincées du classement parce que mal exposées ou trop en altitude ! L’Institut national des appellations d’origine a en effet fixé la limite d’altitude. Or on sait que par les temps qui courent, les raisins qui prennent de la hauteur s’en sortent au mieux… Dont acte. Dans le cadre de la nouvelle réglementation pour l’obtention de la mention convoitée : un Premier Cru ne pourra être produit à plus de 56 hl/ha (60 hl pour ceux qui n’auront pas la particule). Cette limitation n’effraie en aucun cas les meilleurs vignerons qui, compte tenu des années climatiquement compliquées, font de plus en plus rarement le plein. Il faut donc se presser dans la contrée, où les clochers saillants des églises romanes déchirent un paysage aux charmantes rondeurs gardées par des jumeaux. Dans ce pays où les tuiles se courbent, les maisons prennent les teintes blondes du sol rougi par les oxydes de fer… On dirait le Sud, les troupeaux de charolais ne regardent pas passer les trains, mais les tracteurs des vignerons inspirés du pays que Lamartine chantait dans son Milly ou la terre natale.