Une journée avec… LIDEWIJ VAN WILGEN

QU’EST CE QUI DÉCIDE UNE NÉERLANDAISE QUI TRAVAILLE DANS LA COMMUNICATION À TOUT PLAQUER POUR FAIRE DU VIN? LA PASSION BIEN SÛR. ON LA SUIT SUR SON DOMAINE BIEN NOMMÉ TERRE DES DAMES EN OCCITANIE.

8h

Depuis 2002, je me lève au chant des oiseaux et vais dans ma cave vérifier que les cuves sont fermées, que tout fonctionne. Souvent Alix, l’oenologue, me retrouve et on déguste. J’ai la chance d’avoir trouvé quelqu’un qui a un super palais et elle est sur la même longueur d’ondes que moi. Elle sait ce que j’aime.

10 h

Je file dans les vignes et discute taille, entretien. Il y a vingt ans, j’étais directrice de stratégie dans la communication à Amsterdam et je rêvais d’une vie plus simple, plus proche de la nature. Une fois en France, je me suis installée en Languedoc et j’ai trouvé un vignoble près de Béziers. Je me suis inscrite au lycée agricole et j’ai passé un diplôme de tractoriste.

12 h

Dans la matinée, je suis au bureau et réponds à mes mails et aux questions des sommeliers. Mais ma vie suit le rythme des saisons. Pendant les vendanges, après avoir commencé à ramasser les raisins à 5 h 30, je suis dans ma cave à surveiller mes vinifications. Je soutire mes blancs, remonte les rouges. Toutes les heures une nouvelle remorque arrive, je trie, j’ôte tout ce qui me déplaît. Je presse, je déguste pour voir si les jus sont bons. Je fais cela jusqu’au soir, je range et nettoie jusqu’au lendemain pour retrouver ce rythme de journées de 11 h.

14 h

L’année prochaine, au lieu de déjeuner dans notre coin et sur le pouce, je réunirai tout le monde autour de repas communs dans la cuisine. C’est un métier difficile pour une femme et j’aurais aimé trouver des copines plus vite. Il y a quelques années, j’ai rencontré trois autres vigneronnes dans l’association Les Vinifilles, engagée dans la viticulture en Occitanie, avec lesquelles nous avons créé le collectif Les Intrépides.

15 h

Je retourne en cave. Je veux des vins dans la fraîcheur, pas trop marqués. Je recherche les rendements bas, les cuvaisons longues et des extractions douces. Tous mes cépages sont vinifiés séparément et mes vins restent deux ans en cave avant que je les assemble.

16 h

J’aime me balader dans mes vignes, croquer les raisins pour évaluer leur maturité. Je connais par coeur les 25 parcelles de mon domaine de 14 ha. La plupart sont entourées d’anciens murets ou d’arbres qui les protègent des maladies, sous la terre coulent des sources et des rivières qui leur apportent la fraîcheur présente dans mes vins. J’habite dans une bâtisse du XVIIIe au milieu des vignes. Certaines ont plus de 100 ans. Je suis restée fidèle aux cépages ancestraux que je travaille en bio.

18 h

J’ai la chance d’avoir élevé mes trois filles, Marijn, Fiene-Marie et Lara, sur ce domaine. Chacune à sa façon participe à sa vie. Lorsqu’elles étaient petites, on dînait toutes les quatre et je me souviens de ces moments d’échanges et de complicité comme si nous étions seules au monde et heureuses de l’être. J’ai appris mon métier, tout en les éduquant. Aujourd’hui, ma fille aînée s’intéresse aux vignes et à la permaculture, la deuxième à l’oenologie et la troisième est « mon artiste ». Sur les étiquettes des flacons, on retrouve les trois coeurs qui les représentent, Lara y a ajouté la représentation de mes parcelles en filigrane.

20 h

Lorsque je prends le temps de me retourner sur mon travail et ce que j’ai fait, je suis fière de retrouver mes vins dans le monde entier et sur les tables des étoilés, qu’ils aient trouvé leur place parmi les meilleurs vins de la région. Mon rêve serait que mes filles continuent l’aventure de La Terre des Dames et reprennent le domaine un jour.