WILLIAM JONQUÈRES D’ORIOLA
RICHE DE SA DOUBLE NATIONALITÉ FRANCO-ÉCOSSAISE, WILLIAM CULTIVE SON CÔTÉ GENTLEMAN ÉPICURIEN ET DÉBORDE D’ÉNERGIE, SURTOUT LORSQU’IL S’AGIT DE PARLER NATURE, VIN ET FAMILLE. RENCONTRE SUR SES TERRES DU ROUSSILLON.
5H Hyperactif, je me lève très tôt. Selon la couleur du ciel que j’aime observer, je sais comment va être la journée.
6H Agathe, ma femme, me retrouve. Nous avons trois enfants de 10 mois à 4 ans, alors il vaut mieux être en forme.
7H On prend notre petit déjeuner en famille. Je raconte à mes enfants ma journée, mon métier. Il n’est jamais trop tôt pour faire du lobbying ! J’ai su dès l’âge de 7 ans que je voulais faire du vin. J’ai grandi ici, je passais mes étés en Écosse dans la famille de ma mère, éleveurs de moutons. La nature, la terre, les cours d’eau, la mer sont mon essentiel.
8H Agathe accompagne les enfants à l’école. Ma famille est arrivée au XIVe siècle à Corneilla-del-Vercol. Chez nous, on fait du vin depuis 1485. Arrivé au domaine en 2010 après un tour de monde de vingt mois, je représente la vingt-septième génération de vignerons. Rencontrer des « wine makers », donner des coups de main, déguster, visiter des domaines, s’inspirer… Ces vingt mois ont été fabuleux, enrichissants et trop courts. Je parle anglais et espagnol, j’ai beaucoup de connexions. En rentrant, je suis passé de 56 hectares à 95 sur six appellations différentes.
10H30 À la saison des vendanges, le dernier coup de sécateur se termine à 10h 30. Mon équipe, composée d’une vingtaine de personnes, commence à couper dès 6h30. C’est essentiel de récolter des raisins encore très frais. Tout le process se fait à basse température, comme mon père, précurseur, l’avait initié il y a quarante ans.
11H30 Je fais un tour des différentes parcelles avec mon chef de cave et mon oenologue, leur avis est important : « Seul, on va plus vite ; à deux, on va plus loin. » Je vérifie les degrés de maturité des raisins en dégustant les baies pour définir les dates de récolte. On commence autour du 15-20 août et on finit la première semaine d’octobre. Après, il y a un mois de fermentation et c’est la veille de Noël que l’on soutire les vins.
12H30 Je rentre déjeuner avec ma femme, Bourguignonne et fille de vignerons, qui travaillait dans la communication à Paris, avant de me rejoindre ici, où elle s’occupe désormais de celle du domaine. La montagne, la mer, Barcelone… on a trouvé notre équilibre. C’est important.
14H30 On contrôle les futs, on déguste les différentes cuves. Mon équipe est comme une équipe de rugby, que j’ai longtemps pratiqué. Je « manage » par l’exemple : je nettoie les pressoirs, je file voir un importateur en Belgique, en tant que commercial…
17 H Je vais chez mon père, qui vit au milieu de nos oliviers (6 000 arbres sur 9 hectares). Il est mon confident et mon conseiller de l’ombre. On parle de notre terre : je pratique une agriculture régénératrice, on rend les sols vivants en se basant sur la biodiversité : je plante des radis noirs qui vont apporter de l’humus, j’ai couvert 40 hectares de nichoirs à chauve-souris qui vont manger les papillons, j’ai entouré mes vignes de haies, je ne désherbe pas, je pulvérise des huiles essentielles…
18H J’aime rentrer tôt. Parfois, on ouvre une bouteille avec Agathe, on goûte d’autres vins, d’autres styles, on réfléchit ensemble : refaire le chai, rajouter d’autres cuvées, savoir ce qui plaît aux consommateurs… J’ai besoin de levier pour avancer.
22 H Je me couche tôt en pensant à mes mille projets, comme notre installation au château de Corneilla, bâti par les Templiers au XIIe siècle et dans lequel j’ai grandi.