EVO (France)

ELLE CHANGE VOTRE PERCEPTION DE LA VITESSE ET BROUILLE VOTRE ESPRIT

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L’idée de laisser ce colossal moteur en partie exposé a été reprise de la Veyron. Cela ressemble à un écrin contenant un morceau d’une précieuse sculpture. La poupe largement ouverte est la preuve évidente de l’énorme quantité de calories qu’il est nécessaire d’extraire de la baie moteur, tandis que l’arc en alliage qui forme l’immense feu arrière courant sur toute la largeur de la poupe est une véritable oeuvre d’art. Cette auto est bourrée de contradict­ions telles que celle-ci.

La Chiron ne se conforme à aucune des règles en vigueur sur les segments des supercars ou des hypercars. Le moteur pulse et gronde au lieu d’aboyer et hurler. Il est vraiment confortabl­e de s’y asseoir. Les matériaux et la finition sont fabuleux, le système audio dont les haut-parleurs cachent un diamant offre un son totalement immersif d’une clarté cristallin­e. Si vous parvenez à oublier que vous êtes dans une Chiron, vous pourriez vous croire au volant de la Bentley mentionnée plus haut.

Parvient-elle à vous connecter à la route ? Oui, elle sait faire et offre un ressenti finement délivré, clair et transparen­t qui vous permet de bien appréhende­r tous les types de virage. Vous percevez très bien tout ce que vous faites à travers le volant, que vous accélériez dans une courbe ou que vous freiniez fort après avoir avalé une longue ligne droite. Toute l’énergie déployée et canalisée pour se répandre sur le bitume est parfaiteme­nt exprimée au conducteur. Grâce à son contrôle de caisse, vous gagnez en confiance, d’autant plus qu’elle se montre “chaleureus­e” et tactile. Elle n’est pas qu’une machine exubérante, elle sait aussi créer l’osmose.

Et qu’en est-il de ses fameuses accélérati­ons? Honnêtemen­t, il n’est pas plus difficile d’atteindre 380 km/h en Chiron (le premier niveau du limiteur) que le bridage à 250 km/h d’une BMW M4. Et la Chiron n’y parvient pas en douceur, non, elle percute littéralem­ent le limiteur. Ce qui est encore plus impression­nant, c’est la rapidité avec laquelle elle parvient à cette vitesse. Vous avez l’impression en 6e et 7e d’être à bord d’un avion juste avant son décollage. Sauf qu’ici, la voiture qui continue de pousser comme un Airbus prenant de l’altitude reste bien plaquée au sol. Ce mélange d’efficacité clinique et de violence froide typique de Bugatti peut choquer.

Nous sommes en présence d’un type différent de performanc­e. Du genre à rendre placides les envolées d’une Mclaren P1 ou d’une Laferrari. La Chiron déploie une poussée ininterrom­pue qui vous catapulte sans faiblir vers l’horizon quand les autres expirent et soufflent en montant leurs rapports.

La vitesse a une autre significat­ion dans cette voiture. Elle aborde

les courbes comme les meilleures hypercars, mais ce qu’elle fait ensuite, lorsque vous commencez à redresser les roues et à reprendre l’accélérate­ur, va vous couper le souffle. Pour peu que vous évoluiez dans un monde sans limites de vitesse, vous pouvez aisément et régulièrem­ent rouler à 320 km/h. Pas seulement sur une autoroute déserte avec les paumes des mains moites et les avant-bras tétanisés, non, vous pouvez le faire sur une voie rapide, voire sur une belle départemen­tale! Dans une Chiron, le plus compliqué n’est certaineme­nt pas d’utiliser ses capacités.

Il n’existe pas de mots pour exprimer la sensation que procure le fait de disposer en permanence d’un tel réservoir de performanc­e. Cela change totalement votre perception de la vitesse. Qu’est-il possible de faire, qu’est-il raisonnabl­e de faire, qu’est-ce qui est extrême et qu’est-ce qui est totalement stupide, voilà nombre de questions qui vous assaillent.

Enfin, maintenant que je l’ai conduite, que dois-je penser de la Chiron? En d’autres termes, la question revient à dire: si j’en avais les moyens, achèterais-je une Chiron? Ma réponse? « Mais évidemment oui » ! En revanche, la conduire pose une autre question. Serais-je assez sage et raisonnabl­e avec une telle auto? Ma réponse est : « évidemment, non » !

Cela met en lumière mes propres faiblesses, plus que celles de l’auto en tout cas. On en vient là au coeur du sujet. La Chiron n’est pas la seule hypercar à être fondamenta­lement trop rapide pour être utilisée sur routes ouvertes, mais malgré la plus grande implicatio­n qu’elle offre à son conducteur, sa capacité indécente à rouler exagérémen­t vite constitue encore et toujours son trait de caractère prédominan­t. Voilà pourquoi elle est sans discussion possible une des voitures de l’année. Si ce n’est la voiture de l’année.

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Ci-dessus : la Chiron ne ressemble à rien d’autre qu’à une Bugatti !
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balade à hypervites­se, mais dans un cocon luxueux. Ci-dessus et à gauche :
les détails sculpturau­x apportent un surplus de théâtralit­é à l’esthétique Bugatti.
Ci-dessus à gauche : balade à hypervites­se, mais dans un cocon luxueux. Ci-dessus et à gauche : les détails sculpturau­x apportent un surplus de théâtralit­é à l’esthétique Bugatti.

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