RENFORCEMENT DE LA RÉPRESSION ROUTIÈRE : MAIS JUSQU’OÙ IRONT-ILS ?
Naguère, et au-delà de l’impératif utilitaire, conduire un véhicule était synonyme de liberté, et parfois même de plaisir. Aujourd’hui, tout ceci semble de plus en plus appartenir au passé, et les principales mesures annoncées il y a quelques jours par le
Faire baisser et limiter le chiffre de la mortalité, ainsi que le nombre d’accidents sur nos routes est, et doit demeurer l’affaire de tous, mais il ne faudrait pas que le renforcement de la répression routière cache une forêt de nouvelles mesures ayant pour but principal et inavoué, d’engranger encore plus de recettes dans la caisse de l’état qui ne s’en sert pas vraiment pour améliorer, par exemple, notre réseau routier. Et que penser de certains magistrats qui n’hésitent plus aujourd’hui à ordonner la confiscation d’un véhicule pour un excès de vitesse de plus de 50 km/h, une pratique en totale inadéquation au regard des faits reprochés…
Après ce coup de gueule en guise d’introduction, revenons maintenant sur les nouvelles mesures fraîchement imaginées et pondues par notre gouvernement.
ABAISSEMENT DES LIMITATIONS DE VITESSE
La vitesse maximale autorisée sur les routes secondaires à double sens sans séparateur central (terre-plein, barrière), soit la quasi-totalité des routes secondaires et près de 400 000 kilomètres sur le million en France), sera abaissée de 90 à 80 km/h à compter du 1er juillet prochain. Préparez-vous à vous faire suivre de très près par certains chauffeurs routiers, ou encore à regarder constamment votre compteur kilométrique si votre véhicule n’a pas la chance d’être muni d’un limiteur de vitesse. En outre, préparez-vous à recevoir chez vous de plus en plus d’avis de contravention, car ces nouvelles limitations de vitesse iront de pair avec l’implantation de nouveaux radars ainsi que la circulation de véhicules équipés d’un tel dispositif et gérés par des sociétés privées. En revanche, et ce qui paraît être une excellente mesure, le gouvernement “prévoit”, en 2021, de donner la possibilité à un conducteur contrôlé en excès de vitesse de plus de 40 km/h et faisant l’objet d’une suspension de permis, de continuer à conduire, à condition de ne conduire qu’un véhicule équipé d’un contrôleur électronique de vitesse… Attendons de voir…
TÉLÉPHONE AU VOLANT
À l’horizon 2019, un automobiliste qui commettra une infraction routière, avec mise en danger de lui-même ou d’autrui, avec son téléphone tenu en main verra son permis immédiatement retenu par les forces de l’ordre et encourra une suspension de son titre de conduite.
S’il s’agit, une fois n’est pas coutume, d’une mesure qui peut sur le fond se comprendre, que penser des forces de l’ordre qui pourront retenir cette infraction, croyant à tort vous avoir vu téléphoner ou tout simplement avoir tenu en main votre téléphone (l’infraction n’est en effet constituée que par le fait de tenir le téléphone en main) ?
ALCOOL
Un conducteur dont le permis a été suspendu après un contrôle à plus de 0,8 g/l pourra toutefois continuer à conduire s’il accepte d’utiliser un véhicule équipé d’un éthylotest antidémarrage (EAD), à ses frais. Il s’agit là d’une mesure qui aurait dû être mise en place depuis longtemps puisque techniquement possible, et d’ailleurs déjà prévue par les textes et applicable par les magistrats mais jamais prononcée car personne ne sait comment l’appliquer en pratique…
PROTECTION DES PIÉTONS
Le gouvernement prévoit un arsenal encore plus répressif à l’encontre des conducteurs qui ne respectent pas les règles de priorité des piétons, et envisage de les sanctionner sans interception, notamment par vidéo verbalisation.
Il s’agit d’une excellente mesure, mais quid du piéton qui laissera passer le conducteur d’un geste de la main, ce dernier recevant pourtant ultérieurement un avis de contravention puisque “Big Brother” n’aurait pas analysé la scène et notamment le geste du piéton laissant précisément passer le conducteur ?
INFORMATION DE LA PRÉSENCE DES FORCES DE L’ORDRE
Dès la fin de cette année, les forces de l’ordre pourront temporairement “disparaître” des applications de navigation routière indiquant leur position. Cette mesure s’appliquerait dans les cas de lutte contre le terrorisme et de la criminalité, mais également en cas de contrôle d’alcoolémie et de stupéfiants mais pas pour un contrôle de vitesse.
Nous ne sommes pas au bout de nos peines car les réseaux sociaux avertissant la présence des forces de l’ordre, ce qui n’est pas pour le moment interdit, pourront par exemple user de stratagèmes tels des langages codés qui seront nécessairement sources d’interprétation… et d’éventuelle répression !
Vous avez compris que les principales mesures annoncées ne sont pas nécessairement de mon goût. Encore une fois, plutôt que réfléchir sur l’état de plus en plus dégradé de notre réseau routier et parfois autoroutier, le gouvernement préfère asseoir sa politique de “répression rentière”, quitte à prendre parfois des mesures mal réfléchies en amont, je pense notamment à cette loi de désignation du conducteur par les représentants légaux de personnes morales qui aujourd’hui s’avère un total fiasco dans son application. Je préfère de loin des réflexions émises par certains, et notamment celles de notre fameux champion français Bernard Darniche, qui au travers de l’association qu’il a créée en 2004, fonde sa réflexion sur l’automobiliste citoyen et responsable et sur les moyens à engager pour mieux vivre la route, plutôt que sur le tout répressif…
Encore une fois, plutôt que réfléchir sur l’état de plus en plus dégradé de notre réseau routier et parfois autoroutier, le gouvernement préfère asseoir sa politique de “répression rentière”, quitte à prendre parfois des mesures mal réfléchies