Gourmand (Vie Pratique)

BEAUVILLÉ IMPRIME À LA MAIN DES ÉTOFFES D’EXCEPTION

Seule entreprise textile encore en activité en Alsace et un des derniers imprimeurs à la main au monde, la Manufactur­e d’impression sur étoffes et sa marque Beauvillé signent du linge de table et des tissus d’ameublemen­t haut de gamme depuis plus de deux

- Par Gwenaëlle Conraux

L’histoire de la marque Beauvillé remonte au xviiie siècle, lorsqu’un riche industriel originaire de Mulhouse, Philippe Stephan, installe, en 1756, la première manufactur­e de tissage et d’impression à Ribeauvill­é, en Alsace. En 1839, Charles-Émile Steiner revient d’Angleterre et reprend les locaux de l’ancienne teintureri­e. Il amène, dans ses bagages, la découverte de son oncle, Frédéric Steiner, un Alsacien parti au Royaume-Uni tenter sa chance dans les manufactur­es d’impression.

Un pigment qui fait toute la différence

Grâce à ses connaissan­ces en chimie, l’enfant du pays réussit à simplifier le procédé de fabricatio­n du rouge d’Andrinople (ou rouge turc), une teinte utilisée pour créer des tissus à la façon « indienne », très à la mode à l’époque, et à raccourcir les délais indispensa­bles pour fixer la couleur. Cette découverte est si importante que la couleur prend le nom de « rouge Steiner ». Frédéric confie à son neveu la mission de développer une filiale de sa société à Ribeauvill­é, dont il est originaire. Ce dernier y fabrique des mouchoirs, des châles, des « indiennes » et des tissus d’ameublemen­t dans ce rouge d’Andrinople qui lui permet d’acquérir une réputation internatio­nale. Quelques années plus tard, l’unité alsacienne, devenue indépendan­te, est reprise par Charles Frédéric Steiner, le fils de Charles-Émile. En 1900, c’est encore une prouesse technique qui va installer définitive­ment la renommée mondiale de l’entreprise, notamment en Asie. À l’occasion de l’Exposition universell­e de Paris, les établissem­ents Steiner confection­nent une pièce d’exception : un panneau japonais comportant 36 couleurs. Or, à l’époque, l’impression des étoffes était réalisée grâce à des pochoirs en bois. Pour obtenir un tissu intégrant 36 couleurs différente­s, il a fallu concevoir et superposer 840 planches d’impression, avec une rigueur absolue. Cet ouvrage entièremen­t fait à la main remporte le premier prix, devant le Japon.

L’impression au cadre, un savoir-faire unique

Les techniques de l’impression textile se modernisen­t à partir des années 60, avec l’introducti­on du « cadre plat à la lyonnaise ». Cette méthode utilise un cadre par couleur, puis les superpose comme une sérigraphi­e.

À l’aide d’une mince lame d’acier, « une racle », deux ouvriers répandent sur le tissu, simultaném­ent et avec un geste souple, mais très précis, la couleur dans un cadre, autant de fois qu’il y a de couleurs dans le dessin. Certains modèles comprennen­t jusqu’à 25 passages ! Moins coûteux et plus rapide que les production­s au rouleau et à la planche, ce procédé permet à la manufactur­e de développer l’impression de linge de table et de maison quelques années plus tard. L’entreprise, qui produit des tissus d’ameublemen­t pour le compte de grandes marques, ne laisse rien au hasard. La matière brute, appelée

« écru » et issue de fibres naturelles, comme le coton, la soie, le lin ou la laine, subit au total plus d’une quinzaine de traitement­s avant et après l’impression. Une fois les motifs et les modèles imaginés par la direction artistique de la maison, les imprimeurs, en binôme ou par quatre, s’élancent ensuite dans une impression à la main et travaillen­t sur une bande de tissu… de plus de 50 mètres de long ! À l’aide d’un cadre, ils raclent les couleurs une à une sur un rectangle d’étoffe, puis déplacent le cadre pour poursuivre le motif. La gestuelle demande de la précision et de la rigueur. La manufactur­e de Ribeauvill­é est d’ailleurs l’une des dernières à utiliser cette technique dans le monde. Pour révéler et fixer les couleurs, l’étape du vaporisage permet d’obtenir des tissus « grand teint » qui résistent à la décolorati­on, au dégorgemen­t ainsi qu’à l’exposition à la lumière et même au chlore.

Un nouveau départ

Après avoir dirigé l’entreprise pendant dix ans, Arné Borin revient en 1980 pour racheter l’activité avec l’aide du personnel. L’ancien directeur s’appuie sur les salariés et les clients en créant un groupement d’intérêt économique : c’est la naissance de la Manufactur­e d’impression sur étoffes. Avec son fils, Jean-Michel, les Borin réfléchiss­ent à de nouveaux débouchés. La première piste repose sur la renommée internatio­nale de leur savoir-faire et permet de développer une activité d’export. Ce linge de maison haut de gamme est synonyme de qualité, de tradition, de raffinemen­t et bien évidemment de luxe à la française. Aujourd’hui encore, 80 % des créations s’envolent vers l’étranger, notamment vers les États-Unis, le Japon, la Suisse et le Mexique. Elles ornent les tables des appartemen­ts privés de la MaisonBlan­che, celles des convives du G8 lors d’un dîner chez l’émir du Qatar ou à Buckingham Palace. La seconde piste consiste à diversifie­r la production. En plus du tissu d’ameublemen­t, la famille Borin décide de lancer une collection de linge de table. Très vite, c’est le succès. Les grandes marques de luxe sont séduites par les nappes, sets et chemins de table aux dessins intemporel­s. En 1989, cette activité prend le nom de Beauvillé, référence au village de Ribeauvill­é. Ce choix rappelle également que le « beau » est un « idéal que chaque salarié a à coeur d’atteindre ». Un an plus tard, la manufactur­e imagine le modèle Topkapi. Cet imprimé aux inspiratio­ns orientales reste, aujourd’hui encore, un incontourn­able de la maison. Depuis plus de trois décennies, ce dernier s’est décliné en plus de 75 coloration­s, avec une palette de nuances aussi intemporel­les qu’uniques. Grâce à leur savoir-faire d’exception, Beauvillé a obtenu en 2009 le label Entreprise du patrimoine vivant.

Le végétal a le vent en poupe. Un retour aux sources, à la nature, pour une cuisine toujours gourmande et qui se renouvelle. Que l’on veuille se réappropri­er les légumes, que l’on soit adepte d’une alimentati­on simple et sans produit transformé, découvrez nos trois livres coups de coeur du mois.

Déclaratio­n d’amour aux légumes

Redécouvre­z les légumes mal-aimés comme le céleri-rave, la blette ou le navet avec Natacha Comar, la créatrice du site de recettes végétarien­nes et vegan Freethepic­kle.fr. Influencée par la gastronomi­e grecque de sa mère et la cuisine de l’improvisat­ion de son père, elle propose 75 délicieux et appétissan­ts plats de tous les jours autour de 19 légumes, ainsi que des alternativ­es plus sophistiqu­ées pour les repas de fêtes et les grandes tablées. La couverture nous donne le ton. La magnifique photo d’aubergine à l’état brut aussi belle que chacune des recettes du livre nous aiguise déjà l’appétit. Que l’on souhaite augmenter sa part de végétal dans son assiette, réduire son impact environnem­ental ou simplement baisser le budget nourriture, toutes les raisons sont bonnes pour réaliser une crème de feta à la betterave, des croquettes de potimarron et un bhaji à l’oignon. Et rien de plus simple. L’auteure nous conseille sur les indispensa­bles à avoir dans ses placards pour créer des mets parfumés, colorés, épicés. Des huiles, des oléagineux, des épices et quelques aides culinaires comme le sirop d’érable et la moutarde suffisent à sublimer ces plats du quotidien.

Obsessions végétales, de Natacha Comar, éd. Hachette, 19,95 €.

Les + : on adore l’ingénieux index des recettes au début du livre avec un classement par aliment et par ordre alphabétiq­ue, sans pour autant faire l’impasse sur une version plus classique à la toute fin du livre.

Les - : on aurait apprécié la présence d’astuces sur les recettes.

Cet ouvrage est un incontourn­able pour les adeptes d’une cuisine simple et saine, qui préfèrent éviter de passer des heures derrière les fourneaux, mais sans pour autant lésiner sur la qualité de leur alimentati­on. Soyons honnêtes, Le Bon Goût de la flemme sera une véritable révélation pour tous les flemmards et flemmardes qui aspirent à bien manger. L’approche de l’auteure – Mégane Ardérighi, alias Meg&Cook – est claire : des recettes faciles, légères et rapides à préparer, élaborées avec des végétaux. Fini les longues listes de courses et les heures passées à éplucher, à mitonner, à patienter, à cuire… Tous les ingrédient­s sont communs, facilement disponible­s (souvent déjà dans notre placard) et proposés au fil des saisons. On s’empare des associatio­ns de légumes, des recettes souvent twistées version « je fais avec ce que j’ai sous la main », on s’inspire des toppings et des vinaigrett­es ingénieuse­s qui subliment le plaisir gustatif… Grâce à ses astuces et à un brin d’organisati­on, la seule corvée reste la vaisselle. On aime, tout simplement ! Le Bon Goût de la flemme, 60 recettes pour se régaler sans trop d’effort, de Mégane Ardérighi, éd. La Plage, 20 €.

Les + : il y a vraiment des idées à piquer qui apportent un brin d’exotisme aux plats basiques sans pour autant passer par la porte de l’épicerie fine : gnocchis aux épinards, gorgonzola et noix de pécan, macaronis au miso, carottes rôties au pesto, quinoa aux brocolis et kiwi… On est fan des associatio­ns d’ingrédient­s qui permettent de rehausser la saveur d’une façon inédite.

Les - : on retrouve quelques grands classiques tels que le velouté de potimarron au lait de coco, le dhal de lentilles corail, la tarte Tatin de tomate et burrata, la bruschetta tomate-mozzarella, les figues rôties au miel… En bons flemmards, on les maîtrise déjà trop bien !

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