Une appellation, deux styles
Châteaux Beau-Séjour Bécot, et Jean Faure à Saint-Émilion
Texte et photos :
Les crus classés de Saint-Émilion ont connu un bel essor dans les années 1990-2000 grâce à des vins puissants, riches et très boisés. Un style élaboré par quelques oenologues de renom, tel Michel Rolland, pour séduire le célèbre critique américain Robert Parker.
Jouxtant le village de Saint-Émilion sur un plateau calcaire où le merlot s’épanouit pleinement, le château Beau-Séjour Bécot s’est inscrit dans cette mouvance. Mais avec l’arrivée d’une nouvelle génération aux commandes, le style a évolué vers davantage de finesse et de fraîcheur.
À l’autre bout de l’appellation, dans la prolongation du plateau de Pomerol, le château Jean Faure est situé à quelques pas de château Cheval Blanc. Son vignoble repose sur des sols où se mélangent sable et argiles. Les argiles profondes sont de même nature que celles que l’on retrouve à Pétrus. Un terroir approprié au cabernet franc, tandis que la maturité du merlot doit être contenue. Le vin possède un caractère d’un naturel frais et élancé.
Malgré leurs différences de terroir et de profil, ces deux crus majeurs poursuivent le même objectif : redéfinir l’équilibre du grand saint-émilion d’aujourd’hui et de demain. Des vins orientés vers moins d’opulence et de richesse, qui privilégient la fraîcheur et l’élégance pour ciseler l’identité de leur terroir avec précision et pureté.
LA PUISSANTE MINÉRALITÉ DE BEAU-SÉJOUR BÉCOT
Contigu à Saint-Émilion, le vignoble de Beau-Séjour Bécot repose sur une épaisse dalle calcaire, dont le matériau pierreux en sous-sol a servi à construire le village. Propice au merlot, son terroir chaud donne des vins amples mais toujours guidés par une puissante minéralité due à la présence du calcaire.
Julien Barthe a pris les rênes du domaine de sa belle-famille en 2014, misant sur des vins plus accessibles jeunes, des vins tendus et frais mais surtout moins opulents. Il y est parvenu en vendangeant plus tôt, en introduisant partiellement de la vendange entière dès 2017 et en utilisant un peu moins de fûts neufs. Pour abonder dans cette quête de fraîcheur, les jeunes vignes sont plantées nord/sud et non plus est/ouest.
À l’arrivée, Beau-Séjour Bécot a perdu en surépaisseur et a gagné en profondeur, avec un fruit plus précis et plus frais, un boisé moins envahissant que par le passé, tout en ayant préservé son beau potentiel de garde.
JEAN FAURE, ÉLANCÉ ET RACÉ
Situé à l’extrême nord-ouest de l’appellation, le vignoble du château Jean Faure repose, lui, sur un sol argilo-sableux donnant de magnifiques résultats avec le cabernet franc. Depuis son rachat en 2002 par Olivier Decelle, propriétaire de Mas Amiel dans le Roussillon, il a été cultivé en agriculture biologique, puis conduit en biodynamie. Un mode cultural qui a permis de redonner vie à ce superbe cru.
Arrivée en 2018 comme directrice technique, Marie-Laure Latorre fait partie de cette génération de vinificatrices qui refuse les vins opulents et surboisés. « J’aime les vins fins et frais, mais avec de la tenue. Dès mon arrivée, j’ai tout vinifié sans soufre afin d’obtenir un fruit encore plus pur », s’enthousiasme-t-elle.
Résultat : Jean Faure a gagné en épure et en précision au cours des derniers millésimes, tout en confortant la singularité de son terroir. Avec un assemblage où domine de plus en plus le cabernet franc (grâce aux argiles lui évitant le stress hydrique) et un usage très modéré du bois neuf, Jean Faure se montre élancé, racé, avec une fraîcheur presque innée. Il s’affirme comme l’un des crus majeurs de Saint-Émilion.
Château Jean Faure Agriculture biodynamique Bouteilles : 60 000 33330 Saint-Émilion Tél. : 05 57 51 34 86
Site : www.jeanfaure.com
Château Beau-Séjour Bécot Agriculture raisonnée Bouteilles : 85 000
1, lieu-dit La Carte, 33330 Saint-Émilion
Tél. : 05 57 74 46 87
Site : www.beausejour-becot.com