Elle distille l’art contemporain en Alsace
À Saint-Louis, dans le Haut-Rhin, ce musée d’art contemporain est installé dans l’un des joyaux du patrimoine industriel de la région.
La Route des Vins du Haut-Rhin et ses 37 Grands crus, parmi lesquels les prestigieux Osterberg et Vorbourg, sont la gloire du département. Mais le Haut-Rhin possède aussi de nombreux autres sites patrimoniaux liés aux vins et spiritueux : le remarquable bâtiment du musée d’art contemporain de la Fondation FernetBranca, du nom de la célèbre marque d’amaro italien créée en 1845 par Bernardino Branca, en est un exemple.
UN GLOBE SURVOLÉ D’UN AIGLE
Sise à Saint-Louis, à une quarantaine de kilomètres au sud de Mulhouse et à quelques encablures de la ville suisse de Bâle, la distillerie surprend par son étonnante architecture. Sa toiture est surmontée d’un globe de verre, lui-même survolé par un majestueux aigle en cuivre d’une envergure de 9 mètres. Le rapace tient dans ses serres une bouteille du digestif mondialement apprécié. La structure métallique du globe a été réalisée à Saint-Louis par les ateliers de serrurerie Ruhlmann. L’aigle, lui, trônait sur le pavillon Fernet-Branca de l’Exposition internationale de Milan en 1906. À l’intérieur du bâtiment, dix fûts géants destinés au vieillissement de la liqueur sont installés par l’artisan tonnelier strasbourgeois Rodolphe Fruhinsholz.
UN PROJET SIGNÉ WILMOTTE
En 1996, la façade est inscrite au registre des bâtiments historiques. Quatre ans plus tard, la distillerie ferme ses portes. Dès 2003, la famille Branca, propriétaire de la marque, transforme, avec le soutien des autorités locales, le site en musée. Le chantier est confié à l’architecte Jean-Michel Wilmotte.
Aujourd’hui, c’est l’Association pour le musée d’art contemporain FernetBranca à Saint-Louis qui anime le lieu. De nombreuses expositions d’art moderne et de photos s’y tiennent tout au long de l’année : elles attirent de nombreux amateurs d’art contemporain venus en voisins depuis la Suisse à l’occasion de la célèbre foire Art Basel.
L’ancienne distillerie italienne témoigne aussi d’un riche patrimoine industriel en Alsace bâti du temps de la présence allemande. La distillerie produisait en moyenne 300 000 bouteilles par an qui étaient essentiellement destinées au marché germanique.
Cette liqueur, dont la recette est toujours gardée secrète, est obtenue par la macération d’herbes, de racines, de fleurs, d’écorces, de zestes d’agrumes et d’épices dans un distillat d’alcool de raisin, additionné de sirop de sucre, avant de reposer un an dans des fûts de chêne. Très populaire, elle était destinée « à aider les gens atteints de problèmes de digestion ». On lui attribuait également des effets antalgiques, permettant de se prémunir contre le choléra (une maladie très fréquente dans le nord de l’Italie au XIXe siècle, et dans le bassin méditerranéen au XXe siècle) ou d’en guérir.
TRÈS PRISÉE EN AMÉRIQUE DU SUD
Le digestif reste encore très prisé en Amérique du Sud (le continent a connu une forte immigration italienne). D’ailleurs, après le musée d’art de SaintLouis, c’est en Argentine que FernetBranca a poursuivi son mécénat culturel, en lançant un concours d’arts visuels.
Covid-19 oblige, le musée propose des visites virtuelles de ses collections. Quant aux cinéphiles, ils peuvent revoir la scène du Père Noël est une ordure dans laquelle Thérèse, prise d’un malaise après la mort du réparateur d’ascenseur, demande à Josette un verre de Fernet-Branca. Bonne santé à tous.