L’aristocratie à venir
prestige des vignobles atlantiques de la péninsule ibérique. La jeune appellation Bierzo, reconnue depuis 1989, se trouve au nord-ouest de la province de Léon, son cépage est le mencia, dont le caractère oscille du cabernet franc au grenache. On trouve derrière ce projet l’inarrêtable Álvaro Palacios, qui a créé le domaine avec son neveu Ricardo en 1999 à partir de vieilles vignes haut perchées. Plusieurs cuvées parcellaires se dégagent rapidement, Las Lamas, Moncerbal et, en 2001, La Faraona (les plus hautes vignes, à 1 000 m d’altitude). La robe du 2015 (95/100, 1 000 €) est assez tendre. Son nez manifeste d’emblée un charme singulier, prenant, évoquant la rose fanée et la sellerie. Le profil de bouche est atlantique, aérien mais sanguin, possédant beaucoup de caractère et de longueur, une veine acide soutenue, une saveur reprenant ad libitum la gamme des cuirs frais. La “délocalisation” du grand vin rouge ibérique des tropismes méditerranéens et continentaux vers ce tempérament
Voisine du Priorat, l’appellation Montsant est moins réputée. Dès le premier millésime, 2004, ce pur grenache, aidé par la magie du lieu et l’âge des vignes (110 ans), a pourtant attiré l’attention des critiques et le désir des amateurs. OEuvre de René Barbier, l’un des grands acteurs de la renaissance du Priorat, c’est un exemple de reconquête de terroirs exceptionnels en dehors des appellations les plus connues. Le vin est effectivement spectaculaire, on comprend à la dégustation pourquoi il s’est imposé si rapidement. Tout est velouté dans le fruit légèrement confit du jeune millésime 2017 (92/100, 120 €). Suave, généreux, il conserve fraîcheur et définition. La sucrosité évoque des fraises très mûres, chauffées par le soleil. L’aération le complexifie et le tend. La garde permet à cette cuvée à la nature solaire assumée de développer de riches nuances épicées et balsamiques tout en restant toujours très proche du fruit.
D’où viendront les prochains mythes, les prochaines étiquettes rares, novatrices ou coûteuses (probablement les trois à la fois) qui deviendront les nouvelles références du désir ? La redécouverte des vignobles “marginaux” devrait encore s’accentuer. Après la Sierra de Gredos madrilène, quelle autre sierra verra son patrimoine de vieilles vignes en gobelet (de grenache ou de cépages endémiques ayant frôlé l’extinction) ressuscité, valorisé et peut-être adulé ? Pour l’heure, on peut constater la montée en puissance de Toro, autre patrie castillane du tempranillo, où des cuvées comme Termanthia et Teso la Monja commandent déjà des tarifs impressionnants. Le futur : nous parions sur la Galice ! Pour l’originalité de ses vins, leur fraîcheur qui colle à l’air du temps, pour la beauté de ses vignobles restés à taille de vigneron. P. Ci