Porto : ces tawnys qui n’ont pas l’âge de leur étiquette
Analysés au carbone 14 par des scientifiques hollandais, des vins n’avaient pas exactement l’âge indiqué sur la bouteille. Y a-t-il fraude pour autant ?
En publiant en janvier un article intitulé “Du vin de Porto à vendre avec un faux âge ?”, le journal portugais Expresso a lâché une petite bombe sur les rives du Douro.
La mèche a été allumée par des journalistes intrigués par des prix de vente assez bas de certains portos Tawny avec indication d’âge. Ces tawnys sont des assemblages de vins fortifiés. Ils sont le résultat d’un long élevage oxydatif en pipas, un type de fût de 522 litres et peuvent porter la mention 10, 20, 30 ou 40 ans d’âge. Cette mention est en réalité une moyenne – cela a son importance – des vins assemblés, pas l’âge du plus jeune vin de l’assemblage. L’indication est censée garantir au client qu’il trouvera dans la bouteille les caractéristiques typiques d’un vin de cet âge.
LE VERDICT DU CARBONE 14
Les journalistes ont fait appel au Centre de recherche isotopique de l’université de Groningue qui a analysé au carbone 14 des bouteilles de tawnys 10 ans et 20 ans achetées au hasard. Les scientifiques ont déterminé l’âge de l’éthanol et l’âge du sucre. Que pensez-vous qu’il arrivât ? L’âge de quatorze des vingt
portos analysés n’était pas celui de l’étiquette : dix étaient plus jeunes et quatre plus âgés. Boum ! Des chaînes de distribution portugaises et certains importateurs ont illico écarté ces portos.
Pour éteindre l’incendie, l’Instituto dos Vinhos do Douro e Porto (IVDP) a assuré qu’« il n’y a aucune indication de comportement frauduleux de la part de l’une des entreprises mentionnées ». Puis de garantir que le vin « est parfaitement encadré par la législation et la réglementation en vigueur ».
Surtout, l’IVDP explique que : « Les tawnys 10 ans et 20 ans correspondent à un art d’assemblage séculaire, permettant aux vins de présenter les caractéristiques d’un âge ». Autrement dit, il y a bien des vins plus jeunes et plus vieux dans une bouteille de 30 ans, c’est leur réunion qui, en moyenne, restitue les caractéristiques d’un porto élevé 30 ans…
En découle le dernier argument de la défense : la méthode d’analyse, qui n’a pas été approuvée par l’Organisation internationale de la vigne et du vin, est-elle 100 % crédible ? Le centre de recherche néerlandais reconnaît qu’il y a une marge d’erreur de deux ans sur les résultats. Alors cette enquête, bombe ou pétard mouillé ?