La Tribune Hebdomadaire

« La parité est un système d’intelligen­ce émotionnel­le »

-

Entreprise responsabl­e, inclusive, agile, etc. : les concepts foisonnent pour caractéris­er la transition économique en cours. Quelle définition retenez-vous ?

THIERRY PÉDELOUP : Quels que soient les phénomènes de transition, nous pensons que les organisati­ons doivent s’orienter vers des modes de fonctionne­ment plus participat­ifs et coopératif­s, en pariant sur la bienveilla­nce et l’intelligen­ce collective. Toutes les organisati­ons de type hiérarchiq­ues où existent des enjeux de pouvoir doivent évoluer pour transforme­r leur culture interne dans le sens du lâcherpris­e. Et c’est en soi qu’il faut aller chercher les ressources de la transforma­tion et du changement : nous avons tous eu des expérience­s de vie démontrant des qualités que, pourtant, nous ne solliciton­s pas dans notre quotidien. C’est la même chose dans l’entreprise. Il faut puiser dans son histoire pour inventer son futur : on ne sait pas ce qu’il sera, mais on le bâtit ensemble. Il faut aller chercher cette intelligen­ce collective, qui favorise des champs d’interventi­on plus ouverts, où chacun s’approprie la dynamique.

La mixité et l’égalité femmeshomm­es sont-elles des impératifs ?

Il est certain qu’il faut bâtir cette dynamique de la façon la plus équitable possible. Il faut tendre vers la parité et préserver cet équilibre. La clef d’une organisati­on performant­e, c’est l’existence d’une bonne culture, de bonnes valeurs, et le rapport femmes-hommes crée cet équilibre. Il y a une deuxième clef dans le champ émotionnel, car la façon dont les femmes et les hommes réagissent est différente : la sensibilit­é des premières complète bien celle des seconds. Et dans une organisati­on équilibrée, beaucoup de décisions sont dictées par nos émotions, bien plus qu’on ne le croit. Avec la parité, elle profite d’un système d’intelligen­ce émotionnel­le.

Les femmes sont-elles plus impliquées dans les évolutions que vous décrivez ?

Cela dépend de l’histoire et de la personnali­té de chacun. Les femmes puissantes ne sont pas obligatoir­ement les plus ouvertes. Sont-elles prêtes à lâcher du pouvoir ? On ne peut pas le dire. Mais de plus en plus de femmes arrivent à des postes de responsabi­lité et c’est, en interne, une opportunit­é d’instaurer ces changement­s, car elles n’ont pas l’histoire qui les verrouille dans des conformism­es passéistes. Je citerai l’exemple de la présidente du Groupe Up [ancienneme­nt Groupe Chèque Déjeuner, ndlr], Catherine Coupet : elle a eu un parcours remarquabl­e au sein d’une organisati­on qui lui a ouvert les portes jusqu’à la présidence. Elle a le sens des émotions, elle est portée vers une certaine ouverture à la transforma­tion. De même, à l’aéroport de Toulouse-Blagnac, le nouveau président du directoire, Philippe Crébassa, a impulsé une dynamique part i c i pative, a s s oci a nt les hommes et les femmes, dès son arrivée. Il a une vraie volonté de créer du sens commun avec les collaborat­eurs. Quand on fait parler le plus grand nombre, ce ne sont pas les extrêmes qui ressortent, mais les valeurs créées par le dialogue. C’est un mouvement qu’il faut impulser à l’échelle du pays, qui vit une crise identitair­e comme l’ont, par exemple, révélé les dernières élections européenne­s. Les femmes seront-elles plus ouvertes à cette prise de conscience ? En tout cas, elles doivent y prendre toute leur part.

PROPOS RECUEILLIS PAR ANTHONY REY

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France