La Tribune Hebdomadaire

« Il faut être capable de répondre à une situation dégradée. Les pilotes sont là pour ça »

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, a-t-elle déclaré en rappelant l’absence d’accident fatal en 2017 dans l’aviation commercial­e. Alors qu’à la fin des années 1950-début des années 1960 les équipages comprenaie­nt quatre à cinq personnes dans le cockpit (pilotes, mécanicien, navigateur, radio), ils sont passés à deux dans les années 1980. Ce qui reste la norme aujourd’hui. Pour autant, sur les vols long-courriers, l’équipage est renforcé en fonction de la durée du vol (trois ou quatre pilotes sur des très long-courriers) et des pratiques de certaines compagnies aériennes. Sur l’Atlantique Nord, par exemple, Air France a deux pilotes quand les compagnies américaine­s en ont trois.

Les partisans du passage à un pilote dans le cockpit estiment que le maintien de deux pilotes se pose en phase de croisière, « où l’on surveille essentiell­ement les systèmes ». De plus, selon eux, le transfert d’une partie des tâches à « la machine » allège aujourd’hui l’équipage et permettra, demain, de se passer de cette double présence. Ceci dans les phases de croisière uniquement. « En croisière pourquoi pas, mais pas pour les approches d’atterrissa­ge un peu complexe » , explique un pilote d’essai sceptique.

Selon les partisans du SPO, n’avoir qu’un seul pilote dans le cockpit en croisière pendant que l’autre se reposerait permettrai­t de mieux organiser les temps de repos. « À deux pilotes à bord, on peut structurer la sieste. Toutes les compagnies n’ont pas un système de sieste tactique. C’est l’un des éléments qui intéressen­t les compagnies » , explique-t-on chez Airbus. En outre, affirment-ils, la réduction du nombre de pilotes à bord permet à chaque pilote de faire plus de décollages et d’atterrissa­ges et donc de lutter contre un problème de compétence­s observé sur les pilotes de vols à équipage renforcé. Les compagnies aériennes sont évidemment très attentives à un tel projet considéré plus sûr par leurs promoteurs et plus économique, puisqu’il permettrai­t de réduire la masse salariale des pilotes (1 milliard d’euros à Air France, soit le quart de la masse globale par exemple). Il permettrai­t aussi de trouver une parade à la pénurie de pilotes dans le monde. Selon Airbus et Boeing, les compagnies aériennes auront besoin de plus de 500#000 nouveaux pilotes au cours des vingt prochaines années. Une pénurie qui n’est pas sans poser problème aux compagnies, car elle entraîne une hausse des salaires des pilotes mais aussi, dans certaines régions du monde, des problèmes de formation. Pour autant, il va falloir peut-être un peu de temps pour ne pas heurter leurs pilotes. Les plus anciens se souviennen­t tous du passage de trois à deux pilotes dans les cockpits d’Air France dans les années 1980.

« Nous sommes en sous-activité en croisière, c’est une évidence. Pour autant, il faut être capable de répondre à l’immédiatet­é d’une situation dégradée. Les pilotes sont là pour ça. L’être humain a une capacité de réaction et un niveau de finesse que n’a pas la machine, mais il commet des erreurs » , explique un commandant de bord, qui se demande comment un pilote seul pourra gérer le stress d’une soudaine situation dégradée le temps que le commandant de bord ne revienne de sa couchette, notamment le principe de cross check [vérificati­on croisée, ndlr]. Au-delà de toutes ces questions, l’inquiétude des pilotes revêt d’autres formes, qui n’ont pas grand-chose à voir avec la sécurité des vols. Par exemple, le financemen­t, en France, des pensions de retraite des navigants. S’il

UN COMMANDANT DE BORD

y a moins de pilotes, il y a, de facto, « moins de cotisants à la CRPN [caisse de retraite complément­aire du personnel navigant] » , précise ainsi un pilote. Le passage à un pilote dans le cockpit sera, potentiell­ement, la dernière étape avant l’avion autonome. Un sujet qui irrite les pilotes, y compris les moins réticents au SPO. Évidemment, même si l’appel à la technologi­e a permis de rendre le transport aérien très sûr, la question de l’acceptatio­n des passagers va se poser dès le SPO. C’est pour cela que les experts envisagent les premières mises en service sur les avions-cargos.

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