Le Cycle

Développer sa puissance: passage obligé par la montagne

Beaucoup d’entre vous déplorent leur manque de force. Vous dites maintenant défaut de puissance. S’entraîner dans les cols est un moyen sûr de compenser cela.

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C’est paradoxal. Au mot « puissance », on associe dans la tête « gros braquet ». C’est une erreur. En grimpant les cols cet été, certains coureurs du Tour de France vont développer, sur des pentes à 7% de moyenne et pendant des heures, plus de watts à environ 20 km/h avec un 36-23 (dents sur le plateau avant et sur le pignon arrière), que sur le plat lors de leur contrela-montre à plus de 50 km/h sur un 54-11.

Les lacets sont le révélateur du rapport puissance/poids, au maximum de ses possibilit­és. Une multitude de cyclosport­ifs se demandent: « Quelles sont mes limites, je veux savoir jusqu’où je peux aller, quoi faire pour les atteindre, comment puis-je devenir plus fort, plus puissant ? » En montagne, ils savent d’entrée la vérité sur eux-mêmes, grimpeurs ou non grimpeurs, dès que la route s’élève à plus de 1000 m d’altitude. Le terrain de jeu et d’entraîneme­nt de la haute montagne, vraiment spécifique pour les non-érudits, s’il est apprivoisé, se révèle être un outil d’entraîneme­nt à nul autre pareil. Il n’est ouvert que l’été, car sinon les lacets sont fermés ou hostiles à cause du froid et de la neige. Il faut en profiter. Il est un vrai moyen, fiable, naturel, de répondre aux questions des pratiquant­s qui voudraient pouvoir pédaler plus vigoureuse­ment sur leurs manivelles. Il permet, au travers d’une épreuve préparée ou d’un stage, d’augmenter vraiment son potentiel au niveau physique côté puissance, pour un gain conséquent en watts sur le plat, transférab­le donc au retour en plaine. Aller rouler en altitude est donc un passage presque obligé, pour qui souhaite s’améliorer et trouver une solution à son manque de force et de vélocité combinées qu’il ne sait pas résoudre dans sa région non montagneus­e. Explicatio­ns.

Puissance/poids

La puissance est maintenant un concept entré dans les moeurs. Des capteurs embarqués sont disponible­s sur certains compteurs et toute personne qui s’intéresse, même de loin, au Tour de France, a entendu parler des watts du vainqueur par rapport à son poids.

Le ratio puissance/poids en W/kg est une donnée largement commentée qui permet de se comparer. Dans les cols finaux, des longues étapes du Tour, celui qui peut s’approcher de 6 W/kg est devant. Soit il appuie fort sur les pédales, soit il peut tourner les manivelles avec une grande vélocité, soit il trouve un équilibre entre les deux. C’est cela la puissance. La première raison pour laquelle pédaler en montagne permet d’augmenter son propre ratio est dans la transforma­tion physiologi­que. En effet, dans un dénivelé de plus de 5%, au bout de 3 mn, le coeur bat la chamade à 80% minimum de son maximum. Il se cale à ce rythme entre 150 battements par minute et 180 bpm selon son âge.

La filière énergétiqu­e utilisée pendant des heures de montée est à la limite de l’anaérobie, au seuil comme on dit. Le coût calorifiqu­e est extrêmemen­t élevé et vous puisez dans certaines réserves de graisses comme vous ne le faites jamais, ou à de rares moments courts sur le plat. Bref, vous bousculez votre métabolism­e et par voie de conséquenc­e, vous maigrirez à moyen terme. Vous perdrez du poids sans perdre de forces: votre rapport puissance/poids augmentera. Les efforts en montagne font mincir. En outre, au niveau neuromuscu­laire, c’est un véritable exercice de musculatio­n que de pédaler dans les pentes pendant des heures qui vous attend. Vous raffermiss­ez, modifiez, transforme­z certaines fibres des jambes, des bras, du dos.

Bref, vous vous renforcez, vous vous musclez en permanence. Ainsi, après quelques jours, au lieu de pouvoir développer par exemple

330 watts avec 75 kg, (ratio 4,4 W/kg), avec la pratique, le corps contraint dans les pentes à appuyer sur les pédales et le coeur qui bat vite, il est fort à parier que vous pourrez, avec cet entraîneme­nt, développer 350 watts avec 73 kg (ratio 4,8 W/kg). Vous serez plus puissant. À votre retour en plaine, vous serez transformé (sauf à reprendre du poids…),

pourrez accélérer plus fort, aurez la possibilit­é de mettre une dent en plus. C’est mieux qu’un régime drastique chez vous et des séances dures d’interval training sur le plat que vous n’aurez pas le coeur à faire. C’est souvent beaucoup plus efficace.

C’est une recette qui fonctionne.

un séjour nécessaire

Bien entendu, ce n’est pas avec une seule sortie, une seule épreuve, que ces transforma­tions s’opéreront. Il n’y a pas de miracle. Il faut une adaptation/ accommodat­ion/assimilati­on qui se fait donc en trois temps (3 fois trois jours) grâce à la répétition des montées de cols gérées de manière différente au niveau des intensités et des braquets. Aussi

(voir ci-contre le programme type), nous vous conseillon­s de rester en montagne neuf jours (soit d’un samedi, au dimanche semaine suivante). L’idéal est de ponctuer son stage par une épreuve ou une dernière sortie dure et longue. C’est une cerise sur le gâteau, qui avaleur de test. Il convient d’être logé àunendroit qui vous permet d’avoir une grande gamme de cols possibles à faire autour de ce camp de base, un peu comme vous choisissez un domaine skiable qui vous permet d’aller de l’univers vers le particulie­r. Il peut être situé soit dans une vallée ou (mieux mais plus difficile à trouver) à plus de 1500 m pour bénéficier un peu des bienfaits de l’altitude par une adaptation au phénomène de raréfactio­n de l’oxygène. À l’issue de ce stage, de retour chez soi, une récupérati­on d’au moins trois jours est nécessaire, quasi passive. Vous devriez ensuite constater tous les bienfaits, sur la durée, de ce stage. Que ce soit sur vos parcours habituels ou tests, avec vos compagnons de route, vous devriez être de manière significat­ive plus puissant. Vous aurez les watts et pourrez mettre les gaz!

dix Précaution­s

Les dix principale­s réserves de base pour aborder la montagne et ce stage « améliorer ma puissance » sont à rappeler: ➊ Braquet : Il est hors de question d’avoir les yeux plus gros que le ventre. Les plateaux compacts ou les triples plateaux avec du braquet de secours, en cas de défaillanc­e, sont indispensa­bles.

➋ Position : Ne changez pas votre position. Vous aurez des courbature­s inhabituel­les, c’est normal. Côté matériel, vérifiez les freins, les serrages. Si vous voulez vous faire plaisir, prenez des roues légères.

➌ Vestimenta­ire : Les gammes d’habits actuelles permettent en un rien de temps de se défaire ou de mettre avec un arrêt en haut des cols un coupe-vent, des manchettes et jambières amovibles.

➍ soleil : La crème haute protection est essentiell­e sur toutes les parties exposées, mollets, cuisses, nuque, bras. La casquette sous-casque et les lunettes teintées ne sont pas de trop également, au cas où.

➎ Bidons : Deux porte-bidons avec bidons de 75 cl. Un d’eau, un avec boisson diététique. Vous suerez comme une fontaine par moments. Déshydrata­tion = danger et contre-performanc­e. Arrosez-vous aussi.

➏ alimentati­on : règle n°1 : que ce que vous aimez. n°2 : pas trop sucré au départ, minisandwi­chs, bananes. n°3 : Les gels, seulement à la fin ou en cas de défaillanc­e. n°4 : pas de sirop dans les bidons.

➐ ravitaille­ment : Ne jamais rater un ravito, qu’il soit hydrique ou solide. Souvent. Gare aux fringales! Faites-vous suivre, ou du moins, arrêtez-vous en haut des cols ou dès que vous le sentez pour ravitaille­r.

➑ Parcours : un col de 10 km à fort pourcentag­e, c’est 1 heure environ. Dans les descentes, vous ne compensere­z pas la moyenne. Soyez modeste dans le choix de vos séances pour ne pas arriver tard.

➒ Gestion : C’est le point presque névralgiqu­e qui déterminer­a le côté positif de votre séjour. Aussi, (voir tableau) l’humilité et la spécificit­é des sorties seront déterminan­tes. En montagne, vous souffrirez. ➓ récupérati­on : Profitez du cadre dépaysant sans soucis de la performanc­e. Les arrêts café-ravitaille­ment, non seulement sontagréab­les, mais sont parfois salvateurs dans une sortie. ■

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