« Ne pas essayer de se calquer sur les appellations de fromages »
Vous suivez depuis longtemps toutes les alternatives aux produits animaux. Que pensez-vous des « fromages végétaux » ? L’évolution du marché est enthousiasmante. Il y a 15 ans, on trouvait en magasins bio des sortes de tartinables et quelques marques anglaises de produits plutôt médiocres, type cheddar ou mozza. Depuis 5 ou 6 ans, tout s’est accéléré. On a d’abord trouvé davantage de « fromages » de cuisine (blocs à couper, tranches à gratiner…), mais toujours en magasins spécialisés ou kasher. Il n’y avait pas de marques françaises avant Nature et moi [All in Foods, racheté par Bel, NDLR]. Ensuite sont arrivés les affinés, avec de la crème de cajou ensemencé. Les premiers étaient américains, difficiles à trouver et à des prix prohibitifs. D’ailleurs, alors qu’on peut désormais s’en procurer facilement, les prix des produits artisanaux restent très onéreux.
Vers quoi va votre préférence ? Je ne fais pas de blocage sur certains produits contenant de l’amidon, de la fécule ou certains additifs (plutôt industriels donc). La cuisine, c’est de la chimie ; ça ne me dérange pas de consommer de temps en temps ce type d’alternatives pour les faire cuire. J’ai aimé quasiment tous les affinés (de nombreuses marques) que j’ai goûtés. Le problème, c’est le prix, cela reste encore un produit d’exception. Autre défaut : le fait d’essayer de se calquer sur les appellations de fromages que l’on connaît. Oui, certaines alternatives ressemblent aux fromages – les croûtes fleuries par exemple –, mais c’est un univers gustatif différent : la longueur en bouche n’est pas la même, ces produits-là ont une autre identité.
Dans vos ouvrages, vous livrez des recettes pour les faire soi-même. Quels conseils donneriez-vous ? Je ne propose que des recettes sans ferments. Ils sont compliqués à trouver, il faut maîtriser l’affinage et avoir une cave saine ou une cave à vin, ce qui n’est pas le cas de la majorité d’entre nous. Dans mon livre [voir ci-contre], j’ai travaillé sur des recettes avec d’autres ingrédients que la noix de cajou, comme le riz, le tofu ou les pommes de terre. Il y a parfois besoin d’agar-agar, pour le fondant, et souvent de poudre d’ail ou de levure maltée pour le goût fromager. J’ai aussi une recette à base de noix de cajou et de bière brune de haute fermentation, qui apporte une touche de profondeur et de subtilité.