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La canne à sucre, un paysage familier et une tradition séculaire

La Réunion compte 2 700 planteurs de canne à sucre à l’image de Virginie K’Bidi, agricultri­ce sur les hauts de Saint-Philippe. Tout ou presque est récolté à la main et à l’aide d’une machette comme autrefois.

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Aux premiers jours de l’hiver austral, la saison de la canne à sucre commence. Les panneaux routiers invitent les automobili­stes à la prudence car la noria des cachalots commence. Ces monstrueux camions bennes acheminent la canne fraîchemen­t coupée depuis les balances (lieux de pesée où les agriculteu­rs déchargent leur récolte) jusqu’aux deux sucreries de l’île, où la canne est transformé­e. Sur les marchés, à une échelle plus petite, les vendeurs de jus de canne pressé à la demande refont leur apparition. Le breuvage est naturellem­ent sucré et offre des parfums surprenant­s, que seul le rhum peut nous rappeler. Toute l’année, la canne à sucre est présente dans le paysage de l’île. L’herbe dense et haute, d’un beau vert chlorophyl­e, ourle le sud-ouest de La Réunion, de Saint-Leu à Saint-Joseph. « La canne à sucre occupe plus de la moitié de la surface agricole de l’île », précise Virginie K’Bidi qui exploite une petite dizaine d’hectares dans les hauts de Saint-Philippe. « C’est une culture anti-érosive et sans la canne, les dégâts de la pluie d’hier auraient été encore plus dramatique­s», ajoute-t-elle à l’adresse de ceux qui trouvent la plante sucrière un peu trop présente dans le paysage. Comme le roseau de la fable de La Fontaine, la canne ne rompt pas, elle plie sous les assauts du vent violent contrairem­ent au caféier ou au cacaoyer. Autrefois, elle nourrissai­t le bétail et les premiers colons la cultivaien­t pour fabriquer une variante du rhum. Le soleil cogne. Virginie empoigne sa machette et part à l’assaut de la canne. D’un geste vif et répété, elle cisaille la plante à la base, puis débarrasse la tige de ses feuilles desséchées. « Je travaille comme mes ancêtres, à la main », explique-t-elle le visage déjà perlant de sueur. « La machine ne peut pas opérer dans ces terrains accidentés. » Virginie taille l’embout d’une tige et le porte à la bouche pour le mâchouille­r et apprécier la richesse en saccharose. En deux jours, l’agricultri­ce coupe le tonnage d’une remorque, c’est-à-dire entre 9 et 10 tonnes. À ce compte-là, il lui faudra presque six mois pour récolter toute la canne à sucre plantée sur ses dix hectares. Une fois coupée et « nettoyée », la canne est jetée en fagots sur le sol, puis transporté­e à la fin de la journée vers la balance ■

 ?? ?? Le taux de sucre (entre 11 et 15 %) détermine le prix d’achat de la canne à sucre : « entre la fourchette basse et la haute, la variation peut être de 50 euros sur une cargaison de 10 tonnes. » La canne de Virginie K’Bidi (ci-dessus à droite) est acheminée dans l’une des deux sucreries de l’île. Elle est transformé­e en sucre roux et les coproduits, la bagasse (déchet de la canne) et la mélasse (déchet du sucre) fourniront la matière première de la centrale électrique de l’île, et serviront à la fabricatio­n du rhum de mélasse, par opposition au rhum agricole.
Le taux de sucre (entre 11 et 15 %) détermine le prix d’achat de la canne à sucre : « entre la fourchette basse et la haute, la variation peut être de 50 euros sur une cargaison de 10 tonnes. » La canne de Virginie K’Bidi (ci-dessus à droite) est acheminée dans l’une des deux sucreries de l’île. Elle est transformé­e en sucre roux et les coproduits, la bagasse (déchet de la canne) et la mélasse (déchet du sucre) fourniront la matière première de la centrale électrique de l’île, et serviront à la fabricatio­n du rhum de mélasse, par opposition au rhum agricole.
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